Pour celles et ceux qui auraient le don d'ubiquité, il vaut mieux travailler à Copenhague et dépenser son argent à Kuala Lumpur. C'est du moins ce qui ressort de l'enquête annuelle d'UBS menée dans soixante et onze grandes villes de la planète. De la compilation des données concernant salaires et temps de travail dans quatorze corps de métier, il ressort que les salaires les plus élevés sont versés en Scandinavie (Copenhague donc, suivi d'Oslo), en Suisse (Zurich et Genève) et dans le monde anglo-saxon (New York, Londres et Chicago), Lyon et Paris n'arrivant respectivement qu'aux 23e et 24e places du palmarès. En bas de l'échelle, sans grande surprise, on trouve des métropoles comme Manille et Delhi, avec des niveaux de salaire vingt fois moins importants que ceux observés en Suisse. « Dans les villes d'Europe occidentale et d'Amérique du Nord, les salariés gagnent près de 15 euros brut l'heure, alors que dans celles d'Europe de l'Est et d'Asie étudiées, leur salaire ne s'élève qu'à 3 ou 4 euros brut l'heure », précisent les économistes d'UBS. En conséquence, pour compenser en partie leurs faibles rémunérations, les salariés des grandes villes asiatiques triment plus longtemps. Séoul enregistre ainsi la durée de travail la plus longue (avec 2 317 heures par an), à l'inverse de Paris, où l'on travaille le moins (1 480 heures). Les Parisiens champions du monde du temps libre : il n'est pas sûr que Bertrand Delanoë inscrive ce titre de gloire sur le frontispice de l'Hôtel de Ville... S'agissant du coût de la vie, si l'on retient un panier de marchandises comprenant 122 biens et services (vêtements, nourriture, transports, etc.), Oslo, Londres, Copenhague, Zurich et Tokyo sont les villes les plus chères au monde, Paris occupant la 11e place du classement. En revanche, « si l'on intègre également les coûts de loyer et de logement, c'est à Londres et New York que la vie est la plus chère, observe l'UBS. Le panier de marchandises le meilleur marché se trouve à Kuala Lumpur, Mumbai, Delhi et Buenos Aires ». Mais le plus éclairant est de croiser le niveau de salaires et le coût de la vie pour déterminer le pouvoir d'achat des habitants de ces grandes villes du globe. Dans ce cadre, Zurich et Genève arrivent encore en tête, Paris étant reléguée à la 31e place. Ce qui ne devrait pas contribuer à faire revenir en France les réfractaires à l'ISF... Enfin, pour être encore plus éclairant, l'UBS a utilisé un indicateur très spécial : l'indice « Big Mac », du nom de ce célèbre hamburger à deux étages vendu dans le monde entier par la chaîne McDonald's. En divisant le prix de ce produit par le salaire horaire net, on obtient le temps de travail nécessaire à l'achat d'un Big Mac. A Jakarta, Nairobi et Bogota, il faut une heure et demie de labeur pour pouvoir se l'offrir, alors qu'une dizaine de minutes suffit à Los Angeles, Chicago et Miami pour acheter cette spécialité de la restauration rapide (21 minutes à Paris). Comme l'écrivait le poète Jules Laforgue, « l'égalité entre les hommes est une règle qui ne comporte que des exceptions ». • Gérard Blandin (Vie Financière)