La Libye est prête à signer le protocole additionnel au traité de non prolifération (TNP) nucléaire, a affirmé hier le Premier ministre libyen Choukri Ghanem. «Nous adhérons à notre engagement envers l'Agence internationale pour l'énergie atomique (AIEA) et nous avons l'intention d'obéir à ses règlements et d'appliquer ses recommandations, quels qu'ils soient », a-t-il déclaré. Au lendemain de l'annonce surprise par la Libye qu'elle renonçait à tout programme de développement d'armes chimiques, biologiques ou nucléaires, une délégation de haut niveau avait rencontré le directeur général de l'AIEA, Mohamed Elbaradei, pour discuter de ce dossier La Libye a fait son annonce de renoncer aux ADM après neuf mois de «diplomatie discrète» de Washington et Londres qui ont exprimé leur satisfaction et espéré que ce pays longtemps considéré comme « État voyou » rejoindrait bientôt «la communauté des nations». La Libye reconnaît avoir « tenté de développer ses capacités défensives du fait que ses appels à ce que le Proche-Orient et l'Afrique soient exempts de toute ADM sont restés sans effet ». La décision libyenne a été saluée par le président américain George W. Bush, qui a déclaré que l'initiative allait « contribuer à renforcer la sécurité des États-Unis ». Tripoli et Washington n'entretiennent plus de relations diplomatiques depuis 1981, mais M. Bush a estimé qu'« avec cette annonce, la Libye a entamé le processus pour rejoindre la communauté des nations ». M. Bush a précisé que la voie diplomatique avait permis de convaincre la Libye de mettre fin à ses ambitions dans ce domaine. Le président américain pourrait décider rapidement la levée des sanctions et le retour en Libye des compagnies pétrolières américaines. Durant une bonne partie du "règne" de Kadhafi, la Libye a dû vivre avec des sanctions imposées par les Etats-Unis et l'Onu, accusée qu'elle était de soutenir le terrorisme international, voire de commettre elle-même des attentats ou d'entraîner des activistes. Rappelons que les Nations unies ont levé leurs sanctions cette année, la Libye ayant accepté de verser des dédommagements aux familles des victimes de l'attentat de Lockerbie, commis voici exactement 15 ans, mais Washington a maintenu ses propres sanctions, en accusant le régime libyen de continuer à vouloir se doter d'armes chimiques et biologiques. Ghanem a estimé que la décision de son pays intervenait au moment approprié et était courageuse, ajoutant qu'elle permettrait de développer les relations entre Tripoli d'une part, Washington et Londres d'autre part. Il a exhorté dans le même temps Israël à suivre l'exemple de Tripoli en renonçant à ses bombes atomiques. La coopération de la Libye ne s'est pas arrêtée aux ADM, selon l'Observer de Londres qui a affirmé dimanche que Tripoli avait décidé de fournir des renseignements sur des centaines de membres d'Al-Qaïda et sur des militants islamistes, afin d'obtenir une levée des sanctions américaines. L'annonce de Tripoli intervient huit mois après le renversement du régime de Saddam Hussein en Irak, dont le programme d'armement supposé avait été invoqué par Washington pour déclencher l'invasion de ce pays. Elle s'est en outre produite au lendemain de la signature par l'Iran du protocole additionnel au TNP, permettant des inspections poussées de ses sites par l'AIEA, alors que Téhéran est soupçonné par Washington de vouloir se doter d'armes nucléaires. Pour la Grande-Bretagne, la Libye a peut-être été conduite à renoncer à ses programmes d'armes de destruction massive en voyant le sort de Saddam Hussein, renversé par les forces américano-britanniques en avril dernier et arrêté le 13 décembre dernier. De l'avis des services de renseignement américains, le colonel Kadhafi serait le principal instigateur du revirement libyen et il a dû y être poussé par la situation de l'Irak, mais aussi par une volonté d'en finir avec l'isolement de son pays, ou encore par des questions de politique intérieure. La presse américaine considère que les pressions internationales, mais aussi la peur inspirée par la guerre en Irak, avaient poussé Tripoli à entamer des pourparlers avec Londres et Washington. « Kadhafi était soumis à une telle pression qu'il était obligé de chercher une issue à l'isolement économique et politique qui menaçait son gouvernement et sa propre survie », écrivait ainsi le Washington Post. Une issue que les pays arabes souhaitent désormais voir suivie par Israël. « Nous espérons que les autres pays de la région suivront (cet exemple) », a ainsi déclaré le ministre égyptien des Affaires étrangères Ahmed Maher, dans une claire allusion à Israël, tandis que le secrétaire général de la Ligue arabe Amr Moussa estimait : « Il n'est pas logique de faire une exception pour Israël. » Le président égyptien Hosni Moubarak a aussi estimé « nécessaire » dimanche qu'Israël élimine ses armes de destruction massive. Les décisions de la Libye interviennent au moment où l'Iran vient, sous la pression de la communauté internationale, de signer le protocole additionnel du TNP.