Le ministère de l'Intérieur a lancé un concours exceptionnel, dans le but de doter Ajdir d'un mémorial. Trois sculpteurs ont déposé leurs dossiers. Si Ikram Kabbaj, Hassan Slaoui et Abderrahman Rahoule se félicitent de cette initiative, ils sont toutefois sans nouvelles de la suite qui a été donnée au concours. C'est une première. Le ministère de l'Intérieur a lancé un concours, en vue de réaliser une œuvre d'art monumentale. Quatre sculpteurs ont été contactés par téléphone pour se présenter au ministère de l'Intérieur. L'un d'eux, craignant peut-être une convocation d'un autre âge, a préféré rester chez lui. Ikram Kabbaj, Hassan Slaoui et Abderrahman Rahoule se sont, de leur côté, courageusement dirigés vers les locaux d'un ministère, connu pour avoir d'autres préoccupations que la promotion de la culture. Ils ont été “très bien accueillis“ par un haut cadre du ministère de l'Intérieur. Il leur a expliqué que son administration a décidé de réaliser “un Mémorial à haute portée symbolique et artistique“. Le mémorial en question est censé immortaliser un moment très important dans l'Histoire contemporaine du Maroc : le discours prononcé par S.M. le Roi Mohammed VI le 17 octobre 2001 à Ajdir. C'est lors de ce discours qu'il a été décidé de promouvoir la langue et la culture amazighes par la création de l'Institut royal de la culture amazighe (IRCAM). Ce discours, qui rompt avec les mesures en demi-teinte concernant la reconnaissance de l'amazigh, a été prononcé dans un cadre magnifique. Une clairière au milieu d'une cédraie. Un espace si beau qu'il invite au recueillement. Ajdir, située à 40 km de Khénifra, est l'une des régions les mieux boisées du Moyen-Atlas. Ce site naturel a été choisi par le maître d'ouvrage pour contenir une œuvre monumentale. Les trois candidats se félicitent de l'initiative du ministère de l'Intérieur. Ikram Kabbaj milite depuis de nombreuses années pour que nos villes soient ornées d'œuvres d'art publiques. Elle consacre beaucoup d'énergie aux symposiums internationaux de sculpture qu'elle organise chaque année au Maroc. Le concours du ministère de l'Intérieur la remplit d'enthousiasme : “le seul fait qu'un ministère de cette importance lance un concours d'idées constitue en soi un événement !“ Hassan Slaoui est non moins enthousiaste. Il voit dans ce concours les marques “du changement du Maroc“. Abderrahman Rahoule a également des raisons pour se féliciter du projet : “C'est une excellente initiative. L'on est au moins sûrs que le ministère de l'Intérieur ne chante pas le refrain des Copains d'abord“. Seulement si les trois artistes saluent de façon unanime le projet, ils déplorent le peu de temps qui leur a été laissé pour préparer leur dossier. “Le projet est trop solennel pour être préparé en une semaine !“, s'exclame Hassan Slaoui. “Ils ont fait les choses à la hâte. Nous avons été pressés par le temps“, explique Abderrahman Rahoule. “Nous avons travaillé comme des fous pour réaliser les projets en sept jours“, renchérit Ikram Kabbaj. En une semaine, les trois artistes ont fait les choses selon les règles de l'art. Ils se sont déplacés à Ajdir, avant de courir contre la montre pour concevoir leurs projets. Ils les ont déposés le mardi 14 octobre 2003 au secrétariat général du ministère de l'Intérieur. Dans la fiche technique du concours, il est précisé que les délibérations du jury se dérouleraient le mercredi 15 octobre 2003. Les délibérations ont bel et bien eu lieu à cette date, sans que le nom du lauréat ne soit proclamé. Les artistes attendent toujours. Ce qui est très surprenant, compte tenu de la précipitation dans laquelle le maître d'ouvrage a organisé le concours. En ce qui concerne le coût prévisionnel du mémorial, il varie entre 500 000 et 1 million DH. L'auteur du projet retenu sera récompensé par 50 000 DH. Le deuxième prix par 30 000 DH. L'initiative de dresser une œuvre d'art à Ajdir est très louable. Mais elle est vaine tant qu'elle n'a pas abouti. Au ministère de l'Intérieur de confirmer sa réputation d'administration redoublement efficace, en menant à terme le projet. Il aura ainsi contribué à doter un espace hautement symbolique d'un surcroît d'émotion esthétique.