Face à l'intransigeance du département de Habib El Malki, les enseignants, demandeurs du regroupement familial, assurent qu'il ne leur reste qu'un seul recours : la grève de la faim. Le Comité national des familles du personnel de l'enseignement lésé par l'absence de mutation en vue du regroupement familial ont entamé hier, 29 août, un sit-in devant le siège du ministère à Bab Rouah à Rabat. Selon le porte-parole du comité, Fouad Haraja, "les personnes lésées vont observer prochainement une grève de la faim illimitée". Le Comité a adressé un appel au ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement professionnel, de la Formation des cadres et de la Recherche scientifique en vue du règlement de ce problème dans les plus brefs délais. En effet, ces enseignants qui ont demandé des mutations pour un regroupement familial sont au bout de leur patience. Après une série de manifestations et de sit-in devant le siège du ministère de l'Education nationale et qui n'ont, vraisemblablement, donné aucun résultat, ces enseignants ont décidé d'entamer une grève de la faim illimitée jusqu'à ce que leurs doléances soient prises en considération. Et pour cause, le ministère a décidé, depuis deux ans environ, de mettre un terme aux "mouvements spéciaux" des enseignants et qui étaient traditionnellement consacrés aux regroupements familiaux et aux mutations pour des raisons de santé. Le ministère n'a conservé que les "mouvements ordinaires" ouverts annuellement au mois de mai à l'ensemble du personnel de l'enseignement, soit environ 300.000 personnes. Les résultats de ces "mouvements ordinaires" ont été rendu publics au début du mois d'août. Au total, presque 5.000 demandes (toutes situations confondues) ont été acceptées. "Parmi elles, une poignée seulement concerne les regroupements familiaux", souligne Allal Belarbi, secrétaire général du Syndicat de l'enseignement affilié à la CDT. Et d'ajouter: "Il est anormal que des époux soient séparés, certains depuis une vingtaine d'années, car cette situation grève considérablement leur rendement". Même son de cloche chez l'UNTM. Le vice-président du Syndicat de l'enseignement de cette centrale, Abdellah Attach, explique que "des contacts ont été pris avec l'UMT, la FDT et l'UGTM pour adopter une position commune à l'égard de ce dossier". D'ailleurs, cette semaine, des réunions sont prévues avec le ministre Habib El Malki. Abdellah Attach estime également que malgré la suppression officielle des "mouvements spéciaux", le ministère procède toujours à des "mutations secrètes" dont bénéficient quelques chanceux. "Nous l'avons signalé au ministre qui nous a promis de mettre un terme à ces pratiques". Depuis cette fameuse circulaire du ministre Habib El Malki, la fronde sociale est montée d'un cran. Certaines familles, il faut le reconnaître vivent dans des situations extrêmement difficiles. C'est le cas de Mustapha Oubardane. Il est fonctionnaire du ministère de l'Education nationale, à Rabat et plus exactement dans le service de la planification. Sa femme est enseignante à Laâyoune, soit à 1.200 km de la capitale. "Depuis cinq ans, notre famille est déchirée, mes deux enfants vivent avec leur mère à des centaines de kilomètres de moi", explique Mustapha Oubardane. En 2004, ils étaient plus de 5.000 dans cette situation, avec des degrés de gravité plus ou moins importants. Ce qui semble ulcérer Mustapha Oubardane, c'est le contenu de la circulaire du ministre Habib El Malki. Selon lui, "ce document octroie des avantages à toutes les femmes, sauf à celles qui sont mariées". Ainsi, la veuve, la femme célibataire qui prend en charge sa famille et la femme divorcée ont chacune un bonus de cinq points si elles veulent rejoindre la ville où résident leurs parents. La circulaire passe quasiment sous silence le cas des femmes mariées. "C'est à croire que le ministère veut pousser les femmes à demander le divorce pour obtenir leurs droits", renchérit Mustapha Oubardane. Par ailleurs, la particularité de cette circulaire qualifiée de "décision unilatérale" par les syndicats, puisqu'ils n'ont pas été impliqués dans son élaboration, c'est qu'elle n'opère aucune distinction entre les regroupements familiaux. "A titre d'exemple, poursuit Mustapha Oubardane, une famille qui est séparée par une centaine de kilomètres, entre Casablanca et Rabat, souffrent évidemment moins que celle déchirée par 1.200 km voire plus".