Les enseignants poursuivent leur grève de la faim à Marassa près de Bab El-Had, à Rabat. Entassés les uns à côté des autres, ils survivent avec uniquement de l'eau et de petits morceaux de sucre. Rencontre. Affaiblie, Fatiha M. arrive avec difficulté à converser et à bouger. De sa vie aussi bien privée que professionnelle, elle en parle avec une profonde amertume. « Cela fait 27 ans que je travaille pour le ministère de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur, de la Formation des cadres et de la Recherche scientifique. En parallèle, j'en ai eu malheureusement aucune reconnaissance ! » dit-elle. Et d'ajouter : «Mon époux a été affecté à Fès et depuis je vis toute seule dans un village à 70 km de la ville de Taounate. Mes trois enfants sont par contre à Fès. Et je ne peux les prendre avec moi de peur de les laisser seuls à la maison!». À la quarantaine, Fatiha M. est mère de trois enfants qu'elle n'a pas vus depuis le déclenchement de cette grève de la faim : «En fait, cela fait deux ans que je vis loin d'eux. Pour mes enfants, leur maman est au travail !». Juste à côté d'elle, une autre institutrice tente, en vain, de s'endormir. « Je n'arrive plus à fermer les yeux ! J'enseigne, il y a cinq ans, dans la banlieue d'Ouarzazate, tandis que mon mari est à Fès. Cette grève de la faim est mon dernier recours!», lance-t-elle avec une voix enrouée. Profondément touchée par la détérioration de la santé de cette jeune institutrice, sa mère observe, elle aussi, et sans pour autant le vouloir, une grève de la faim. «Je fais quotidiennement la navette entre Fès et Rabat. Ma fille ne veut qu'être près de son époux et je pense que c'est un droit légitime», raconte-t-elle. Les nerfs à fleur de peau, ces grévistes s'attendent toujours à une réaction favorable de leur ministère. «Ce n'est pas en entamant la troisième semaine de notre grève de la faim que nous allons faire marche arrière. Nous irons jusqu'au bout!», affirme une autre institutrice. «Certains pensent qu'il ne s'agit que de mariages blancs pour fuir les régions désenclavées. Ce n'est pas notre cas puisque la plupart sont des mères», ajoute-t-elle. Cette grève de la faim est également menée par des hommes, mais ils sont moins nombreux par rapport aux femmes. La revendication reste toutefois la même : bénéficier de leur droit au regroupement familial. Il est à rappeler qu'un sit-in a été organisé, le lundi 26 septembre, par différentes associations, pour les soutenir. Des familles ainsi que des amis de ces enseignants ont également pris part à cette manifestation. Par ailleurs, et rien qu'en 2004, les fonctionnaires de ce ministère demandant un regroupement familial étaient plus de 5.000 personnes. Chaque cas reste toutefois particulier, et ce selon la distance séparant l'époux de son épouse. Contacté à plusieurs reprises par ALM, Habib El-Malki est resté injoignable.