Les négociations sur la prise en charge des frais d'hospitalisation butent toujours sur les honoraires des chirurgiens. Les assureurs ont fait leur offre. La balle est désormais dans le camp des cliniques privées et des chirurgiens. La prise en charge des frais d'hospitalisation dans les cliniques privées par les compagnies d'assurances est bloquée depuis plusieurs semaines. Et les choses ne semblent pas se diriger vers une solution rapide. Aujourd'hui, les négociations sont au point mort. Tout a commencé en 1998, date à laquelle la Fédération marocaine des sociétés d'assurances et de réassurance (FMSAR) a signé une convention avec l'Ordre national des médecins concernant la prise en charge des frais d'hospitalisation dans les cliniques privées. C'est ce qui est connu sous le nom pompeux de "convention du tiers payant". D'une manière schématique, il s'agira pour les assurances de payer directement aux cliniques 80% ou 85% de la facture d'hospitalisation, tout dépend du taux de remboursement prévu par le contrat d'assurance-maladie. Par conséquent, le patient n'est tenu de payer que 20% ou 15% du montant figurant sur la facture. Ce système a fonctionné, tant bien que mal, pendant plus de quatre ans. Tout y était prévu. Cela va des honoraires des chirurgiens, au prix de la chambre en passant par les documents justificatifs exigés pour la constitution d'un dossier de remboursement. Toutefois, au fil du temps, les compagnies d'assurances ont constaté un certain nombre d'irrégularités dans l'application de la convention. En fait, ces irrégularités sont au nombre de deux. Tout d'abord, les cliniques. Celles-ci sont épinglées sur plusieurs points. C'est le cas des surfacturations. Sur cet aspect, un assureur affirme que "certaines cliniques facturent régulièrement à leurs patients les frais de réanimation, alors qu'elles ne disposent même pas d'un centre de réanimation". Autre problème: le non-encaissement des tickets modérateurs. Il s'agit en fait de la part que devrait payer le patient. "Si des cliniques ne l'exigent même pas, cela veut dire que les 80% que leur versent les assurances les suffisent amplement", poursuit l'assureur. En plus de ces pratiques, ce dernier affirme que les chirurgiens font également preuve d'abus dans la facturation de leurs actes, et ce, en violation totale des clauses de la Convention de 1998. En principe, toutes ces irrégularités devaient être systématiquement traitées par un Comité de suivi et de sanctions, instauré par la Convention de 1998. Cependant, l'action de cette instance, qui regroupe toutes les parties, ne faisait preuve d'aucune efficacité en matière de sanction. Avec le temps, elle a carrément cessé de se réunir. A noter que les chirurgiens ne se sentaient pas concernés par la Convention car ils n'ont pas été impliqués lors de son élaboration en 1998. C'est donc dans ces conditions d'anarchie totale que la Convention de 1998 a été appliquée pendant plus de quatre ans. En septembre 2002, les assurances ont décidé de "ne plus se laisser faire", pour reprendre l'expression d'un assureur. Ils décident alors de "dénoncer la Convention à titre conservatoire". Cette précision est importante. Elle ne signifie pas que les assureurs veulent la suspendre. C'est plutôt un appel adressé à l'Ordre des médecins (car c'est lui le signataire) et partant aux cliniques privées, à venir asseoir autour d'une table de négociation. Après cinq mois de pourparlers, auxquels ont pris part les chirurgiens à travers leur syndicat, les différentes parties ne sont arrivées à aucun accord. En signe de protestation, et pour crever l'abcès une fois pour toutes, les assureurs ont décidé de faire une dernière offre aux cliniques privées et aux chirurgiens. Et tant qu'une nouvelle convention n'est pas signée, de suspendre toutes les prises en charge. Cette situation ressemble énormément à une impasse. Les cliniques et les chirurgiens sont mis devant le fait accompli. Prenons, à titre d'exemple, une césarienne. Les assureurs proposent 400 DH par jour pour la chambre, alors que ce montant variait entre 250 DH et 350 DH. Les honoraires des chirurgiens ont été fixés par les assureurs à 3.000 DH alors qu'ils touchaient 2.500 DH. Les chirurgiens, quant à eux, exigent 3.500 DH pour une césarienne. L'anesthésiste gagne 200 DH de plus pour son intervention (elle était facturée à 1.400 DH). Le prix du bloc opératoire n'a pas changé, 2.500 DH. Les frais de pharmacie ont été baissés de 2.000 DH à 1.500 DH. En moyenne, "les assureurs ont concédé environ 5% d'augmentation, tout acte confondu", assure un professionnel.