Abdelali Benamour, universitaire et membre fondateur de l'Association "Alternatives" et du «Collectif Démocratie et modernité», réagit aux attentats de vendredi et interpelle l'ensemble de la société. Entretien. ALM : Quelle est votre première réaction par rapport aux attentats de vendredi dernier ? Abdelali Benamour : Comme tous les Marocains, je suis outré par ce qui s'est passé. Mais au-delà de l'indignation, ce qui est très important, c'est ce qu'il faut faire demain. C'est-à-dire ? En termes d'analyses, il faut repenser la question intégriste sur le plan international et au Maroc, notamment sur le partage des tâches. Est-ce que vous voulez dire qu'il s'agit d'une composante d'une même entité ? Structurellement, les intégrateurs ne forment pas une seule composante. Mais, objectivement, ceux qui recourent directement à la violence et ceux qui créent les conditions objectives pour le développement de la violence appartiennent à la même composante. Ceux qui se sont faits exploser, est-ce qu'ils n'ont pas été influencés par les discours régnants dans le camp intégriste ? Partant de l'analyse en question, il faut ensuite interpeller les composantes de la société pour qu'elles réagissent. J'entends par là une partie de la société civile qui se complaît parfois dans l'amalgame en hésitant devant le comportement du mouvement intégriste et une certaine presse qui ouvre ses colonnes à tout cela. Imaginez des organes de presse en France en train d'ouvrir leurs colonnes à Le Pen. L'interpellation va aussi vers les partis politiques qui doivent remettre de l'ordre dans leurs pensées et leurs structures internes pour encadrer réellement les citoyens. L'interpellation va aussi au monde économique qui doit produire et penser à la redistribution des revenus. Egalement, les pouvoirs publics sont interpellés pour qu'ils jouent le rôle de modernisation réelle du pays en dépassant notamment l'équilibrisme auquel ils recourent face aux intégristes, d'un côté, et aux modernistes de l'autre, et pour qu'ils jouent le rôle de développement en dehors du système rentier actuel. Enfin, aux intégristes, je dis la chose suivante: nous sommes des démocrates, nous acceptons le pluralisme, mais à condition que vous dépassiez vos discours confus qui permettent aux violences de se manifester. Ces attentats pourront-ils entraver la démocratisation du pays? J'espère que ces attentats donnent, au contraire, l'occasion pour nos gouvernants, nos composantes politiques et de la société civile pour qu'on réagisse ensemble en vue de la construction d'une démocratie réelle avec un Etat fort.