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Benamour : «Le Conseil des Ouléma est caduc»
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 07 - 07 - 2004

Le président fondateur de l'association "Alternatives", Abdelali Benamour, estime que le Conseil supérieur des ouléma est dépassé et qu'il est temps de créer une autorité religieuse qui ne soit pas formée uniquement d'ouléma.
ALM : Le débat est relancé sur le rôle des prédicateurs de mosquées. Quelle est votre position ?
Abdelali Benamour : Notre pays est dans une période où il est traversé à la fois par des courants modernistes, progressistes et conservateurs. Ces derniers sont une réalité et l'on ne peut pas négliger leur existence. Mais le problème est que le vide existe du côté de leur représentation. Normalement, ce courant conservateur devait être incarné par le Parti de l'Istiqlal comme il l'a toujours été par le passé, mais, malheureusement, ce parti semble ne plus vouloir jouer ce rôle estimant, peut-être, qu'être de droite n'est pas valorisant. En tout cas, il a laissé le champ vide, ce qui a profité à des courants islamistes.
Et je pense que ces derniers doivent clarifier leurs positions. Qu'ils choisissent entre intégrer le système démocratique ou demeurer à l'extérieur.
Vous parlez du PJD…
Tout à fait. D'ailleurs, je leur ai toujours dit qu'ils doivent choisir entre deux voies : être un parti qui défend les valeurs islamiques dans le cadre du jeu démocratique, ou un parti qui veut islamiser l'Etat.
Donc, vous n'êtes pas contre l'existence d'un parti qui puise ses idéaux dans l'Islam ?
J'ai toujours dit que je ne voyais aucun inconvénient à ce qu'il y ait un parti qui prône une société conservatrice et plus attachée à la religion. Le problème n'est pas là. D'ailleurs, en Occident, il y a des partis démocrates chrétiens. Alors, pourquoi ne pas avoir chez nous des partis "démocrates musulmans". Certes, nous sommes tous musulmans, mais cela n'empêche pas qu'il y ait des gens plus conservateurs que d'autres. Mais, ces partis doivent accepter que les règles du jeu soient celles fixées par la Constitution et les principes de la démocratie. Or, le problème chez eux, c'est qu'ils veulent imposer leurs propres règles et demandent que leur référentiel, à savoir la religion soit imposé comme règle du jeu. Quand ils demandent par exemple que l'Etat interdise les boissons alcoolisées, ils ne jouent pas le jeu de la démocratie. Je leur ai toujours dit que s'ils obtenaient la majorité au sein du Parlement, ils pouvaient adopter une loi qui va dans ce sens, mais ils doivent accepter que leur successeur, une fois qu'ils auraient perdu la majorité, rétablisse la consommation de l'alcool. C'est ça la démocratie. Mais quand ils commencent à dicter à l'Etat ce qu'il doit faire, ils deviennent des "fauteurs de trouble".
Mais que leur répondez-vous quand ils disent que les mosquées sont faites pour la prédication religieuse et qu'il ne doit pas y avoir de censure sur les prêches ?
Bien au contraire. La mosquée est un lieu de prédication, certes, mais il ne faut pas qu'elle soit monopolisée par un discours radical. En Islam, il n'y a pas de clergé. Au Maroc, nous savons tous qu'il existe une seule autorité religieuse qui est le Roi. Il est le seul représentant de la religion.
Et à mon avis, il faut que le Monarque crée autour de lui un Conseil de l'autorité religieuse…
C'est le rôle du Conseil supérieur des Ouléma…
À mon avis, ce Conseil est devenu caduc. Car, il est composé uniquement d'Ouléma alors que l'autorité religieuse dont je parle doit regrouper, en plus des Ouléma, des penseurs, des médecins, des ingénieurs…Ce qui lui permettra de prononcer des fatwas en prenant en considération toutes les données scientifiques et religieuses. Mais cette fatwa ne devrait aucunement être une obligation. Elle devrait se contenter de donner un point de vue à titre indicatif.
En plus de cette autorité religieuse, je pense qu'il est temps de combattre les discours radicaux par la loi. Je ne vois pas pourquoi l'Etat tolère des déclarations dangereuses comme celles de Raïssouni. Il faut commencer à demander des comptes à ces gens-là.
Et je ne comprends pas non plus l'attitude passive des partis politiques qui peuvent prendre l'initiative de faire des propositions de loi pour réprimer ce genre de dérapages.


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