Dans notre pays, toute crise d'un parti politique, quel qu'il soit, rejaillit, fatalement, négativement, sur toutes les formations politiques. La manière dont le Bureau politique de l'USFP est en train de régler la succession de Abderrahmane Youssoufi aiguise les appétits. Au-delà même du périmètre de ce parti. Elyazghi ou Radi, là n'est pas la question. Ce dont il s'agit est plus prosaïque. Comment profiter de cette crise – somme toute normale dans toute formation politique un tant soit peu sérieuse – pour faire avancer mes pions ? Voilà ce qui compte. Le malheur des uns… Alors dans ce registre, on remarque deux catégories d'intervenants à peine intéressés. Les premiers, disons les plus normaux, considèrent que tout ce qui fait du mal à l'USFP est bon pour eux. C'est une philosophie de la compétition politique qui fait feu de tout bois. Un parti fragile, ou fragilisé par les siens, dans une conjoncture difficile est théoriquement un nouvel espace à investir. Ceux qui ont cette appétence n'ont pas la charge de la démonstration. Elle est faite par les autres. Une posture simple qui permet de recueillir les fruits d'un arbre que l'on n'a pas planté. Tant mieux si cette attitude n'avait pas des variantes un peu dévoyées. On entre dans le débat, on distille des informations, on fait des choix, on suggère des noms, et on finit par voter pour celui qui arrangera - notamment par son incompétence ou son absence de légitimité - le mieux nos affaires. De l'huile sur le feu, l'effet est connu. Cependant, cet exercice a une limite. Dans notre pays, toute crise d'un parti politique, quel qu'il soit, rejaillit, fatalement, négativement, sur toutes les formations politiques. L'opinion politique marocaine ayant globalement peu d'estime pour l'action politique, elle se retrouve renforcée et confortée dans sa défiance nihiliste, préjudiciable au bout du compte à l'émergence d'une véritable démocratie. Le bénéfice est donc proche de zéro, quand il n'est pas arithmétiquement négatif. Les seconds intervenants dans ce débat sont plus pervers. C'est la technique Blanche-Neige. Nous sommes propres, ils sont sales. Tous. Regardez-les ! Ils ne méritent ni de nous représenter ni d'être au gouvernement. Ils sont incapables d'offrir à l'État, dans une période difficile, un interlocuteur crédible. Avec un parti en crise comme cela, ses ministres au gouvernement ne représentent démocratiquement – sans rires - rien. Et finalement pour boucler la boucle, nos pervers avancent, avec beaucoup d'aplomb, que des gens qui gèrent leurs affaires internes de la sorte sont disqualifiés pour gérer les affaires de l'État. Pas mal le bouquet ! En fait, ce dont il s'agit, c'est que ce qui se passe à l'USFP, considèrent nos analystes généreux, peut précipiter à terme ce parti dans l'opposition. Ce n'est pas pour eux un drame ontologique. L'avantage c'est que cela va libérer des postes de ministrabilité. Une aubaine par les temps qui courent. D'autant plus que le gouvernement actuel qui a vu sa majorité se déchirer piteusement lors des dernières échéances électorales attend toujours une re-confirmation ou une invalidation solennelles de son utilité, notamment, politique. L'on voit que le «Mercato» d'hiver est ouvert et les rumeurs assassines commencent déjà à fuser. Au box-office on trouve en tête le pôle «Haraki» magique que l'on habille de toutes les vertus après lui avoir prêté toutes les turpitudes. Vient tout de suite après la perspective de l'alternance technocratique – consensuelle, bien évidemment - qui serait justifiée, avec expertise bien sûr, par la faillite supposée des politiques. Après le clash immoral des élections, regardez ce qui se passe dans l'USFP… C'est un autre «Mercato» qui fonctionne avec d'autres règles. Voilà où nous en sommes et Ramadan n'arrange pas vraiment les choses. Ses longues nuits sont propices à toutes conjectures. Et, tant mieux ou tant pis, c'est selon, personne ne se gêne. On appelle cela, chez nous, un débat. Alors débattons.