La réponse de Nabil Ayouch à notre article, paru dans le numéro 259, est légitime et à certains égards, fondée. C'est pour cela que nous la publions avec plaisir. Mais de là à établir un parallèle entre ALM et le New York Times, il y a un pas qui a été allègrement franchi. Pour notre part, nous ne nous amuserons jamais à comparer –qu'à Dieu ne plaise– Nabil Ayouch à Stanley Kubrick ou à Francis Ford Coppola. J'ai lu l'article de ce jour sur "Lalla Fatéma", paru dans l'organe que vous dirigez, et en tant que producteur, je me dois de réagir. En effet, je trouve le propos de votre journaliste méprisant, déplacé, pas fondé et mal argumenté. Tout d'abord, cette manière dédaigneuse d'englober dans la même besace les 2 sitcoms nationales, comme si tout était bon à mettre au panier, sans distinction, relève d'un vrai manque de discernement ; ce qui est pardonnable pour un téléspectateur mais pas pour un journaliste qui prétend juger. "Lalla Fatéma", contrairement à d'autres produits concoctés dans "l'improvisation et la précipitation" - pour reprendre les termes de votre journaliste - a nécessité presque un an de travail. A tous les niveaux, écriture, réalisation, post-production, une somme considérable d'efforts a été fournie par de nombreuses personnes. Ces efforts ont abouti à une vraie plus-value dans l'approche et les nouveautés que "Lalla Fatéma" apporte aujourd'hui au genre de la Sitcom dans notre pays. Cette approche est reconnue, parfois plagiée, en tout cas appréciée. Notamment par les téléspectateurs qui ont plébiscité la série la saison dernière et qui sont en train de lui renouveler leur confiance cette année, puisque les taux d'audience et parts de marché réalisés par "Lalla Fatéma" sont considérables. Et l'argumentaire de votre journaliste qui consiste à affirmer que si ce type de programmes plaît aux téléspectateurs marocains, c'est tant mieux pour les chaînes mais que cela ne signifie rien, est fallacieux. Car cela revient à dire que le public marocain est ignare et n'a aucun goût. Ce qui est totalement faux, car le public marocain sait reconnaître la qualité des produits qu'on lui propose. Et, son jugement doit être accepté en tant que tel car il représente, pour nous producteurs, une sanction ou une récompense quotidienne. De plus, cet argument qui consiste à mépriser le public est en totale contradiction avec la thèse que votre journaliste développe un peu plus loin, quand il dit que le public marocain est un gros consommateur d'images, qui a la parabole et qui est donc à même de comparer avec ce qui se fait dans d'autres pays. Si ce public ne peut être dupé, qu'il est informé et qu'il a le choix, alors pourquoi choisit-il de regarder en masse "Lalla Fatéma" ? Je ne prétends pas, entendons-nous bien, que "Lalla Fatéma" soit parfaite. Elle comporte des défauts et un potentiel d'amélioration très grand; nous en sommes conscients et y travaillons dur. Surtout que nous nous savons être attendus au tournant depuis le succès de l'année dernière. Mais, de grâce, cessez de jouer les maîtres d'école stériles, renseignez-vous, documentez-vous, argumentez, faites votre travail de journaliste, et cessez de comparer l'incomparable. Car, c'est vrai, si l'on compare "Lalla Fatéma" à "Friends", il a du boulot pour que nous arrivions au même niveau qu'eux. Mais si nous, lecteurs, comparions "Aujourd'hui le Maroc" au "New-York Times", il y aurait encore plus de boulot... • Nabil Ayouch