Maroc : l'épargne nationale à 28,8% du PIB au T4-2024    TF1 sur les traces de ces expatriés français en quête d'"une nouvelle vie" à Essaouira    Un nouveau sommet historique pour l'or    Le Roi Mohammed VI accomplit la prière de l'Aïd Al-Fitr depuis Rabat    Marine Le Pen condamnée à 4 ans de prison et à une peine d'inéligibilité    Soldats américains disparus : leur véhicule retiré d'un marais lituanien    Real Sociedad récupère Aguerd avant le choc contre le Real Madrid en Coupe du Roi    Renforts sécuritaires massifs à Belyounech pour contrer les infiltrations vers Sebta    L'Aïd au rythme du sacrifice : Ces travailleurs qui assurent la continuité des services essentiels    Aïd Al Fitr célébré ce lundi 31 mars 2025 au Maroc    Amir Al-Mouminine accomplira lundi la prière de l'Aïd Al Fitr à la mosquée « Ahl Fès » à Rabat    Climat des affaires : Ces lacunes qui freinent les réformes du Maroc    Transport interurbain : Un fardeau récurrent pour les voyageurs à l'occasion de l'Aïd    Aïd Al Fitr: Grâce Royale au profit de 1533 personnes    Aïd Al Fitr : Grâce Royale au profit de 1533 personnes    Le besoin de financement du Trésor estimé à 147 milliards de dirhams en 2025    La Chine et l'Afrique de l'Ouest : Nouvelles perspectives de coopération économique et de développement conjoint    CAN U17: Les Lionceaux vainqueurs en ouverture    Coupe du Trône : programme des 8è de finale    Aïd Al Fitr : Amir Al Mouminine, adresse des cartes de vœux aux Chefs d'État des pays islamiques    L'ambassadeur de Chine au Maroc présente ses vœux aux Marocains à l'occasion de l'Aïd al-Fitr    Le Festival du Printemps Local de retour à Tanger    Jazzablanca : Le groupe australien Parcels jouera à Jazzablanca le jeudi 10 juillet    Le Niger se retire de la Force mixte anti-terroriste autour du lac Tchad    Interdiction temporaire de la pêche de la Seiche au sud de Sidi Ghazi    Foot/CAN-U17: M. Lekjaa incite les joueurs de la sélection marocaine à « livrer une performance digne de la réputation du football national »    France: La violence dans le football ne cesse de prendre de l'ampleur    Maroc-Inde: l'ambassadeur du Maroc à New Delhi rencontre un haut responsable militaire indien    Alger interdit à ses diplomates tout déplacement en France, y compris en transit    ¿Dónde ver el partido Marruecos-Angola de la CAN Sub-17 este domingo por la noche?    Aïd Al Fitr : Appel à redoubler de vigilance et à prendre les précautions de sécurité sur les routes    Sixtine Félix reveals why she changed her stance in Bennis-Alj-Slaoui rape case    Ouarzazate : plus de 230 millions de dirhams pour des projets de développement socio-économique et sportif    Le président de X-Links menace de délocaliser la liaison reliant le Maroc au Royaume-Uni face à l'inaction de Londres et qualifie Rabat de «future puissance des énergies renouvelables»    Maroc : des sinistrés du séisme contraints de signer un engagement contesté    Syrie : Formation d'un nouveau gouvernement    Criquets pèlerins en Tunisie : des experts de la FAO évaluent la situation    Ramadan : 69,1% de PdA pour la télévision publique marocaine    Jazzablanca 2025 : Le groove australien s'invite avec Parcels    Pour l'IMAP, le Plan Maroc Vert a favorisé des cultures intensives en eau au détriment de variétés plus adaptées aux conditions arides    L'Aïd El Fitr célébré lundi en Egypte, en Jordanie, au Sultanat Oman, en Syrie et en Irak    Liga : Une victoire ''polémique'' du Real avant Barça-Gérone de cet après-midi    CAN U17 / Ce soir, Maroc - Ouganda: Horaire et chaînes ?    Polisario : Après les policiers, les enseignants sont privés de salaires    Rabat : Cérémonie en célébration de la Journée mondiale du théâtre    Ramadan 2025 : Les Marocains préfèrent le pôle audiovisuel public    Nuit du Destin à El Jadida : Une Symphonie de Traditions et de Foi    Deux Marocains remportent les première et troisième places du prix Katara pour la récitation du Saint Coran    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Bouteflika : Une imposture algérienne (39)
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 13 - 12 - 2004

Directeur du quotidien algérien «Le Matin», Mohamed Benchicou a publié à la veille des présidentielles algériennes un livre pamphlet, «Bouteflika : une imposture algérienne», qui retrace la carrière politique et militaire du président Abdelaziz Bouteflika. Le livre, qui a fait l'effet d'une bombe, a valu à son auteur deux ans de prison ferme.
Au gré des circonstances, il est tantôt Boumediène, tantôt De Gaulle, quelquefois Che Guevara, souvent monarque, fréquemment dictateur, parfois tous ces personnages à la fois sans qu'on sache où se trouve Bouteflika dans cette procession d'idoles qui peuplent son esprit. Il prend d'autant plus le risque de se trahir qu'il ne maîtrise pas son discours : l'homme semble s'exprimer plus par ses hormones que par son cerveau.
A Alger, en ce début d'année 2000, le bruit fait rapidement le tour des chancelleries : à la tête du pays il y aurait un prophète illuminé.
Abdelaziz Bouteflika ne fit rien pour démentir la rumeur. Il multipliera les sorties narcissiques avec un bonheur à chaque fois renouvelé. « Je crois que vous trouverez difficilement quelqu'un qui soit aussi rapide que moi, déclare-t-il dans un prestigieux quotidien anglais. Moi et les partis algériens, nous ne fonctionnons pas à la même vitesse. Je crois que je vais un peu plus vite et M. Jean-Pierre Elkabach a dit que, quelque part en France, on pensait de moi que je donnais le vertige. »
Devant Jean-Pierre Elkabach, justement, qui lui demandait la date de formation d'un prochain gouvernement, il n'hésite pas à s'identifier aux grands auteurs de romans policiers : «Quand Simenon ou Agatha Christie font un peu de suspense, vous trouvez que c'est très élégant et c'est très charmant sur le plan intellectuel. Quand c'est moi qui fais un peu de suspense, vous pensez qu'il y a crime.»
Le prophète est intarissable sur ses mérites : «Je ne sais pas si je bouscule trop de tabous.Mais dès que j'en vois un, je ne résiste pas à l'envie de le remettre en question. C'est tellement dur de changer des mentalités qui ont été façonnées sous le règne de l'Etat-providence.» Il en finit par se persuader lui-même: « Je suis en train de réhabiliter l'Etat et je suis en train de mettre l'Algérie sur les exigences de l'an 2000, c'est-à-dire une nécessaire et inévitable modernisation.»
Le président participe à la construction du mythe du rédempteur, et trouve une opinion réceptive aux légendes spontanées.
Les intégristes islamistes seront les premiers à s'apercevoir que derrière cette imposture il y avait une opportunité politique à saisir : la concorde nationale qui doit les réhabiliter aux yeux d'une opinion marquée par leurs crimes doit beaucoup à leur adresse dans l'art de flatter le président mégalo.
Car la gravité de la situation n'effraie évidemment pas le nouvel élu Bouteflika : «En arrivant au pouvoir j'ai trouvé une Algérie complètement, complètement défigurée. Complètement salie. Salie. Il n'y a pas de mots plus forts je crois. Il me fallait trouver une formule pour donner une image différente de l'Algérie.» Mais que les Algériens se rassurent, le timonier
est à la barre : «Si vous avez un chef, il est là pour régler les problèmes », se fait-il un devoir de leur rappeler.
Bouteflika se plaît dans l'infinie parodie du pouvoir : il est de toutes les conférences et, pour le seul dernier semestre de 1999, il n'accorde pas moins d'une centaine d'interviews à la presse étrangère, la plupart diffusées en parallèle en Algérie.
Il prend le risque de trop parler, donc de trop promettre, mettant à dure épreuve la capacité de l'Etat à tenir des engagements emphatiques. Bouteflika provoquera le discrédit et l'illusion. Le discrédit pour le prestige de l'Etat, l'illusion chez les citoyens persuadés que le Père Noël est enfin arrivé avec le
pain et la paix.
Bouteflika gagnera très vite un sobriquet : «Le président de la parole». La formule, en plus de n'être pas très élogieuse pour le premier magistrat du pays, renseigne sur l'érosion de l'autorité présidentielle aux yeux de journalistes étrangers revenus des belles phrases dont le chef de l'Etat algérien aimait à les inonder. Il l'apprend de la bouche d'une journaliste française et s'en offusque : «Oh, Madame, le président de la parole, dites-vous ? Et bien ce président de la parole, il a promis de régler le problème du Service national, il l'a fait. Le président de la parole a promis d'amener la paix et la sécurité. Je crois que c'est en
train de se faire, et vous ne pouvez pas ne pas le constater. Le président de la parole a promis de relever l'Algérie, de donner à l'Algérie une place dans le concert des nations, je crois que vous ne pouvez pas dire le contraire. Le président de la parole a promis de changer l'image de marque de l'Algérie à l'extérieur
et je vous mets au défi de me dire que l'image de marque de l'Algérie n'a pas changé. Le président de la parole a libéré quelque chose comme 5 000 prisonniers et il est en voie de libérer encore 5 000 autres. Le président de la parole a épuré le champ des walis, et ce n'est pas peu dire. Le président de la parole a épuré, aussi, le champ des chefs de daïra, c'est-àdire les sous-préfets, et ce n'est pas peu dire.
En six mois, vous avez déjà fait beaucoup d'avancées, c'est ce que vous voulez dire ? »
Bien entendu, dans sa frénésie à vouloir s'attribuer tous les mérites, Bouteflika oubliera de préciser qu'il n'était pas l'auteur de cette décision populaire de «régler le problème du Service national», c'est-à-dire de dispenser des dizaines de milliers de jeunes gens de cette obligation civique : le mérite en revenait à l'état-major de l'Armée et au président Liamine Zeroual qui a accepté d'en différer l'annonce de façon à en faire profiter son successeur. Quant à «la paix et la sécurité» et surtout «l'image de marque de l'Algérie à l'extérieur», il fallait des dons de magicien, dont il était seul à disposer, pour les voir apparaître au sixième mois de l'élection ! Mais la presse internationale se plaisait à l'écoute des fables sans prêter crédit au fabulateur.
Le président bavard perdra aussi beaucoup de la considération de ses ministres.
«Quand Bouteflika parle au téléphone, il reste parfois deux heures, parfois plus, assure l'ancien Premier ministre Ahmed Benbitour. A la fin de la conversation, il oublie systématiquement le motif pour lequel il vous a appelé. Au début, les ministres sommés de s'expliquer au téléphone par le président
sur un dossier étaient embarrassés et se fourvoyaient dans des explications souvent laborieuses. Puis ils ont fini par comprendre le personnage : il suffisait de le laisser parler tout son saoul, écouter ses admonestations, accepter ses retours sur l'histoire, acquiescer à ses exploits du temps où lui-même était ministre, approuver ses opinions sur tout…
A la fin, Bouteflika aura oublié le reproche qu'il avait à vous faire et raccroche de lui-même. Le ministre incriminé aura perdu deux heures de stériles bavardages, mais aura aussi échappé aux sanctions.
C'est ainsi qu'on a fonctionné durant une année.»
Le président adore converser au téléphone avec ses relations féminines, parmi lesquelles la chanteuse Amel Wahby ou la femme d'affaires Soraya Hamiani, innombrables interlocutrices qui usent du temps présidentiel pour le convertir en avantages matériels, en contrepartie de l'illusion qu'elles procurent au chef de l'Etat d'évoluer dans un harem téléphonique. Les nymphes du répondeur présidentiel ont souvent été au centre des scandales qui ont éclaboussé le mandat de Bouteflika : Amel Wahby dans celui de Khalifa, Soraya Hamiani dans celui de La Baigneuse, cette statue volée dans un parc public et qu'on a retrouvée dans son jardin!
La dame sera sauvée par le président. Un innocent fera de la prison à sa place.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.