Les Canariens avouent volontiers leur méconnaissance des réalités du Maroc et veulent se défaire de cette image pour se rapprocher davantage de la société civile marocaine. Ainsi, soucieux d'avoir une information "à la source" sur le Royaume, contraire à celle à sens unique véhiculée par la presse canarienne et espagnole en général, l' "Association canarienne des études de la globalisation" (ACEG), une ONG parmi les plus actives sur l'Archipel des Canaries, a invité des acteurs de la société civile marocaine pour participer à un séminaire sur les relations avec l'Afrique qui a réuni plusieurs journalistes et universitaires. "Malheureusement, les Canariens ont une grande méconnaissance de la réalité marocaine", reconnaît d'emblée le coordonnateur général de l'ACEG, M. Esteban Velazguez Guerra en déplorant le manque de contacts entre la société civile du Maroc et des Canaries. Pour ce prêtre très engagé dans le dialogue entre les cultures et les religions, "la société civile canarienne reçoit régulièrement une image négative du Maroc à travers la presse locale". En effet, que ce soit sur le plan de l'immigration, du Sahara ou de la femme, le Maroc est présenté dans les différents médias sous une image tronquée ne reflétant nullement la réalité. Mais les Canariens élèvent, de plus en plus, leur voix pour réclamer de leurs médias une couverture objective de la réalité marocaine et de l'Afrique en général et souhaitent une meilleure compréhension du Royaume ainsi qu'un grand rapprochement avec ce pays avec lequel ils ont entretenu de bonnes relations à travers l'histoire et qui se trouve être le plus proche de leur archipel. "Les Canariens ont eu durant plusieurs siècles des relations spéciales avec le Maroc dans le domaine du commerce et de la pêche et des liens humains très étroits", a déclaré à la MAP, M. Guerra tout en insistant sur la nécessité de multiplier les contacts et les échanges entre les différents acteurs de la société civile des deux bords, en particulier entre les journalistes. Cette obstination de la presse canarienne à entretenir une image négative du Maroc est également dénoncée par Catherine Hernandez, la responsable de l'ACEG à Tenerife, l'une des sept îles de l'archipel des Canaries. "Les Canariens reçoivent du Maroc une image négative à travers la presse et ils sont avides d'une information diversifiée", a-t-elle fait remarquer en mettant l'accent sur les relations historiques "très étroites" entre les Canaries et le Royaume. "Nous voulons avoir une connaissance approfondie de la réalité marocaine et c'est pour cette raison que nous avons invité des acteurs de la société civile marocaine à ce séminaire", explique-t-elle. Les officiels et les hommes d'affaires, eux, ont déjà entamé ce rapprochement avec le Maroc avec la multiplication des séjours à Rabat de hauts responsables canariens, dont la dernière en date est celle en mai dernier, du chef du gouvernement autonome de l'archipel, M. Adan Martin et la présence, de plus en plus, marquée des entreprises canariennes dans l'économie marocaine. "Nous ne ferons pas marche-arrière dans notre rapprochement avec le Maroc et ce processus est irréversible", a assuré le directeur général des relations avec l'Afrique au sein du gouvernement autonome des Iles Canaries, M. Luis Padilla Macabeo. Et comme l'a confié à la MAP ce responsable, en marge de sa participation à ce séminaire à Tenerife, "les rencontres se multiplient, les entreprises canariennes sont, de plus en plus, présentes sur le marché marocain et la coopération se renforce et je crois que nous sommes dans la bonne direction". En effet, sur le plan économique, plus d'une vingtaine d'entreprises canariennes sont déjà présentes sur le marché marocain, notamment dans la région d'Agadir où elles s'activent dans les secteurs de la pêche, de l'agroalimentaire et de l'urbanisme. Les échanges commerciaux entre le Maroc et l'archipel restent faibles mais les Canariens sont convaincus que les deux parties pourraient faire mieux que les 80 millions de dollars d'échanges enregistrés en 2002. Animés de cette conviction et de cette volonté de renforcer leur présence au Maroc, ils viennent d'installer une délégation commerciale à Agadir et les Chambres de commerce des Canaries et des provinces du Sud multiplient les contacts pour sceller des partenariats ou monter des projets communs dans plusieurs domaines. Mais tout le monde aux Canaries insiste sur l'implication de la société civile pour compléter ce travail des hommes d'affaires et des responsables politiques et affermir la compréhension mutuelle. "On est de la même de la région et il faut que les sociétés civiles, de la même façon que les hommes d'affaires, travaillent ensemble pour améliorer la compréhension entre le Maroc et les Iles Canaries", souligne M. Macabeo. • Mohamed Touzani, envoyé spécial de la MAP á Tenerife