Le compte à rebours a commencé. Avec l'ouverture, ce vendredi, de la période de dépôt des candidatures pour les législatives, la dernière ligne droite est entamée. Avant la campagne électorale officielle. L'administration affine son dispositif technique et les commissions administratives régionales sont mobilisées. Les dernières tractations portent sur la gestion et la répartition du temps d'antenne à la télévision entre les différents partis. Anciens et nouveaux partis divergent sur les modalités de passage. Le nouveau mode de scrutin n'a pas facilité la tâche aux partis politiques. La proportionnelle, plus démocratique que le scrutin uninominal, a ouvert de nouvelles portes et amplifié les rivalités au sein des formations politiques. Non qu'elles n'existaient pas avant, avec l'ancien mode électoral. A une circonscription un candidat (donc un seul chef de file) s'est substituée aujourd'hui la formule : un groupe de circonscriptions, une liste avec autant de candidats que de circonscriptions, et un seul tête de liste. Normal que les leaders politiques, les dirigeants de seconds couteaux et même des responsables (ou militants de base, tout court) se bousculent au portillon. Avec l'ancien système électoral, l'offre était plus grande : 325 sièges à pourvoir. Le scrutin proportionnel la limite à moins d'une centaine (93 listes et donc autant de têtes de listes). A cela, il faudra ajouter le fait de la prolifération des partis politiques, qui ont commencé à pousser comme des champignons. Pas moins de 26 formations sont en lice pour les Législatives du 27 novembre. 10 de plus que pour les échéances de 1997. Les scissions et les guerres de clarifications idéologiques ne sont pas étrangères à cette inflation des structures partisanes. Au moins dix formations « nouvelles » ont vu le jour… Une situation qui aggrave la concurrence et fait disperser les voix, les influences et le rayonnement partisan, avec l'émiettement probable des forces électorales et des scores des partis. La guerre des chefs de file locaux était inévitable. Logique même. Pour tous les partis, mais à des degrés différents. On a assisté à pas mal de conflits entre frères ennemis ou contre des éléments, étrangers ou autochtones, parachutés par bien de directions, un peu partout sur l'échiquier électoral. Aucune structure n'a été épargnée et, presque partout, la bataille a fait rage. Les exemples sont multiples, mais certaines ont défrayé la chronique électorale. Notamment au niveau de la transhumance politique. Ce phénomène a touché surtout les segments de la « Haraka », l'UC, le RNI qui ont fait le plus parler d'eux. Les partis de la majorité n'ont pas été épargnés par les changements de veste politique. Chaque parti, toutes tendances confondues, a son Kemmou, Kouider, ou Chbaâtou. C'est ce qui a envenimé et attisé les appétits et les orgueils locaux. Les localiers font face, parfois dans la douleur, aux «intérêts bien compris» des partis. Chacun recherche à assurer une meilleure présentation de sa couleur. Qu'importent, parfois, les principes et «ce que l'on dira». L'essentiel est de placer quelqu'un, fût-il un corps étranger, qui serait en mesure de décrocher le siège. Car le nouveau mode de scrutin a brouillé les calculs. Il a été conçu, à l'origine, essentiellement pour permettre aux petites formations d'être représentées. Or ces dernières ne se comptent plus sur les doigts d'une seule main. Toutes les formations politiques semblent être conscientes des enjeux. A défaut d'entraîner un raz-de-marée -ce qui est complètement exclu- les partis «de première division» reviendront à l'évidence de la nécessaire composition avec les «petites» formations. Certaines de ces dernières auront leur mot à dire. Les observateurs anticipent déjà sur des alliances contre-nature pour former le prochain gouvernement. C'est ce qui expliquerait le fait que d'aucuns évitent sciemment d'insulter l'avenir… Larache, Casablanca, Oujda, Rabat, Marrakech et d'autres grandes villes ont été le théâtre d'oppositions locale aux directions. Les tractations ont abouti soit au consensus, soit à la fronde. Les luttes intestines entre sensibilités politiques ou ambitions personnelles sont déclarées, au grand jour. Partout, des déchirements, des départs, des « renégats » ont lieu et dérangent les appareils. Les choix, il faudra l'avouer, ne sont pas si évidents, dans une arène politique en décomposition progressive, qui n'encourage pas l'engagement et l'enthousiasme citoyen. Avec les publications des listes officielles des candidats, le week-end, certains l'ont déjà fait, les luttes fratricides iront de plus belle. Elles donneront plus de visibilité pour une analyse poussée des chances des uns et des autres. Signalons, enfin, la mobilisation des commissions administratives dans les régions. Les préparatifs battaient le plein, hier jeudi, à la veille du rendez-vous des dépôts de candidature. Le dispositif est mis en place, fin-prêt pour accueillir les têtes de liste, interlocuteur unique et privilégié.