Jeudi, le Premier ministre Bulent Ecevit est revenu sur ses propos tenus une heure avant, lorsqu'il avait annoncé la tenue d'élections législatives anticipées, en affirmant avoir été «mal compris». «Je crois avoir été mal compris. Il est hors de question de tenir des élections anticipées avant 2004. J'y suis catégoriquement opposé», a déclaré jeudi le Premier ministre turc. S'adressant à la presse devant son domicile, où il est au repos médical assisté, Bulent Ecevit a, en une heure seulement, effectué un spectaculaire revirement politique. Peu auparavant, le Premier ministre avait en effet indiqué devant le groupe parlementaire de son parti de la gauche démocratique (DSP), première réunion politique à laquelle il participait depuis près de deux mois, que des «élections se profilaient à l'horizon», tout en s'affirmant opposé à une telle éventualité. Arrivé au Parlement d'Ankara à bord d'un mini-van et non dans sa voiture de fonction, il s'était montré incapable de monter les escaliers menant à la tribune où il devait s'exprimer. Il avait alors prononcé un discours décousu devant les micros installés au sol. Entre son premier et son second discours, M. Ecevit avait été reçu par le président Ahmet Necdet Sezer pour la première fois depuis plusieurs semaines. Et s'était enfin présenté devant les nombreuses caméras qui campaient devant son domicile pour réfuter ses premiers propos. Premier ministre d'une coalition tripartite depuis 1999, M. Ecevit doit depuis plusieurs mois faire face non seulement à sa mauvaise santé mais aussi aux divisions de son gouvernement. Les réformes à mener pour adhérer à l'Union européenne, notamment, font planer une lourde incertitude sur la vie politique du pays, avec les répercussions que cela suppose sur son économie en crise. Depuis sa première hospitalisation le 4 mai dernier, le chef du gouvernement a pourtant toujours rejeté les multiples appels à la démission. Beaucoup parmi la classe politique ont mis en cause sa santé défaillante et ont appelé à la tenue d'élections législatives anticipées. Mercredi soir, M. Ecevit avait subi un nouveau contrôle médical complet. A sa sortie d'hôpital, il avait assuré que son état de santé était «définitivement positif». Encore convalescent «pendant deux ou trois semaines», cet homme âgé de 77 ans avait été hospitalisé à deux reprises en mai. Une première fois à cause d'une infection intestinale, et une seconde fois pour une côte cassée et des problèmes vasculaires. Ses ennuis de santé chroniques ont fait en partie plonger les marchés, préoccupés par la possible démission de l'homme fort du pays. Départ qui entraînerait sans nul doute la chute de la coalition au pouvoir. Figure de la scène politique turque depuis plus de trente ans, Bulent Ecevit a aussi entraîné par son absence des querelles politiques internes. Neuf députés de sa propre formation, le DSP, avaient même laissé entendre, mardi, qu'il était temps qu'il renonce à la direction du parti. Un grand nombre des activités du DSP est en effet assumé par l'épouse et adjointe du chef du gouvernement, Rahsan Ecevit.