Qui sème le vent récolte la tempête. C'est le cas de Mohamed qui a abandonné son fils aîné Rachid après la mort de sa première femme. Son rejeton est devenu violent, cruel et méchant. Il a fini par mettre le feu à la maison. Nous sommes au mois de mai 1980, sans précision du jour, dans une ruelle du quartier Sidi Othman, à Casablanca. Le bonheur comble le foyer de Mohamed et Saïda, par la naissance de leur fils aîné, à qui ils donneront le nom de Rachid. C'est leur rêve, leur avenir, leur espoir dans la vie. La jeune mère est très contente et le jeune père est plongé dans une douce béatitude. Seulement, tout est renversé, un mois plus tard. La joie cède la place à la tristesse, l'espoir au désespoir et l'optimisme au pessimisme. Quelle vie, celle qui se réduit, en un clin d'œil en enfer, et où le bonheur cède la place, sans préavis, au malheur ? Mais on ne peut rien contre le destin. Un destin qui décide, à travers la maladie, d'emporter l'épouse laissant ainsi Mohamed face à face à son bébé. Saïda est morte. Et Rachid reste sans mamelles maternelles. A son quarantième jour sur cette terre, il a perdu la tendresse et l'amour de sa mère. Quelques mois sont passés. Mohamed ne peut plus se charger seul de l'enfant. “…Je suis encore jeune et j'ai besoin d'une femme qui doit s'occuper de nous deux…“ dit-il à sa mère. C'est ainsi qu'il se marie avec Samira, pensant qu'elle se chargerait de l'enfant, qu'elle remplacerait sa mère. Lors des premiers mois de leur mariage, Samira a tenté de prendre soin de l'enfant, de se mettre à la place de sa mère. Mais personne, en réalité, ne peut compenser l'amour maternel. Au fils des mois, Samira accouche d'un nouveau-né. Elle a désormais son propre fils. Depuis elle a abandonné Rachid. Ce dernier grandit en plein malheur. Samira et Mohamed continuent à avoir des enfants et Rachid continue à être marginalisé, écarté, et laissé à son sort. Une réalité qui ne peut que le jeter dans le monde de la délinquance. A quinze printemps Rachid va commettre son premier acte de vol. Il a cambriolé l'école où il poursuivait ses études. Il est arrêté, présenté devant la justice et condamné à trois mois. Il a été mis à la maison de réforme ; un établissement ou la réforme a un autre sens. Là, Rachid a appris la consommation de toutes sortes de drogue, et d'autres comportements. Relâché, il se redirige vers la maison paternelle. Mais, son père ne veut plus de lui. Il le chasse. Rachid rejoint sa tante. Il commence à l'aider dans son commerce aux Souks hebdomadaires. Trois mois plus tard, elle découvre qu'il lui vole de l'argent. Rachid se retrouve dans la rue pour rentrer chez lui. D'autant plus que son père n'ose plus l'affronter, car Rachid est devenu plus violent, voire cruel. Personne ne peut l'empêcher de fréquenter la maison paternelle. Il n'a pas besoin de d'argent de son père, mais seulement d'un toit. Et depuis, il ne passe pas une année sans qu'il purge de peine d'emprisonnement. Il a été condamné à six mois en 1996, à huit mois en 1997, à dix mois en 1998, à deux ans en 1999. Rachid s'enfonce de plus en plus dans la criminalité, comme s'il garde une rancune envers une société qui l'a rejeté un jour. Son père, sa belle-mère, ses sept demi-frères et demi-sœurs et les voisins du quartier, tous se plaignent de lui, de ses comportements. Il est devenu l'être le plus indésirable du quartier sans que personne de cet entourage ne s'interroge un jour sur son éventuelle participation au changement radical de cet enfant. Rachid aurait pu être en ce moment en période de préparation des examens comme ses congénères. Samedi 23 mars. Mohamed vient d'accomplir la prière d'Al-Icha, avant de rentrer chez lui pour se heurter à Rachid qui lui demande quelques sous. Le père refuse. Quant à Rachid, il subtilise un billet de 100 dh du porte-monnaie de sa belle-mère, se rend chez un guerrab (vendeur de vin clandestin ), achète trois bouteilles de vin rouge. Il était deux heures trente du dimanche 24 mars quand il commence la troisième. Aussitôt, il descend à la rue, commence à insulter les habitants, à crier, à hurler. Personne n'ose s'approcher de lui. Son père alerte la police avant de retourner chez lui, et de monter à la chambre de Rachid, pour prendre la bouteille, et verser ce qui reste du vin dans les toilettes et de se rendormir. Quand Rachid rentre à sa chambre et ne trouve pas la bouteille, il reprend ses insultes, crie à haute voix, rejoint son père, le saisi par la barbe et lui met un couteau sous la gorge: «Où est ma bouteille, je vais te tuer si tu ne me la remets pas … Je vais mettre le feu dans la maison, tu vas voir, sale père…» menace-t-il. Mohamed le supplie, lui demande de le laisser tranquille. «…je vais t'acheter une autre bouteille…“ tente-t-il de le calmer. Rachid le relâche. Le père se rend de nouveau chez la police. Lorsqu'il est de retour, il trouve sa femme et ses enfants dans la rue et le feu en train de ravager sa maison. Les sapeurs pompiers qui se sont dépêchés sur les lieux, ont circonscrit le feu. Et Rachid a été conduit devant la chambre criminelle auprès de la cour d'appel de Casablanca où il a éété condamné à 10 ans de réclusion criminelle. Il ne sera libéré qu'en 2012. Sortira-t-il bien rééduqué ou gardera-t-il toujours une certaine rancune envers la société ?