Les ministres européens des affaires étrangères, réunis lundi à Strasbourg en vue du Sommet de Séville des 21 et 22 juin, devaient étudier les propositions espagnoles concernant l'immigration, le plus gros dossier de l'UE. Le chef du gouvernement espagnol José Maria Aznar, l'a encore répété dimanche : «il faut une régulation positive et raisonnable des flux migratoires en Europe loin des attitudes démagogiques». Dans une interview accordée au quotidien espagnol ABC, il a une nouvelle fois défendu le projet que son pays, qui dirige l'Union européenne jusqu'au mois de juillet, compte présenter au sommet de Séville. Selon lui, les pays d'origine de l'immigration «doivent accomplir leurs obligations et persécuter les mafias sinon l'UE doit se réserver le droit de revoir sa coopération avec eux». Donc de procéder à des sanctions économiques et des suspensions d'aide. Ces projets, qui rentrent dans le cadre d'un durcissement général des mesures à l'encontre de l'immigration -qu'elle soit légale ou clandestine- sur le vieux continent, avaient déjà été mis une première fois à l'ordre du jour jeudi dernier. Les ministres de l'intérieur des Quinze avaient alors apporté leur soutien au plan espagnol. Appui qui semble cependant moins évident du côté des chefs de la diplomatie réunis lundi à Strasbourg. La question, même si elle n'est pas le seul dossier proposé, devrait être tranchée lors du prochain sommet européen, qui se déroulera à Séville les 21 et 22 juin. La lutte contre l'immigration illégale est d'ailleurs aujourd'hui la grande question posée en Europe, bouleversée par la question sécuritaire et les récentes percées électorales extrémistes et populistes. Les projets espagnols se composent de plusieurs plans dont celui portant sur la gestion des frontières extérieures qui entend permettre de lutter plus efficacement contre les flux d'immigration clandestine. Les Quinze ont déjà décidé d'améliorer leur coopération dans toute une série de domaines, par exemple le contrôle des frontières maritimes et des aéroports. A Séville, les chefs d'Etat et de gouvernement se pencheront sur le projet de «police commune des frontières» qui est loin de faire l'unanimité parmi les Etats membres. Ils réfléchiront surtout sur les relations politiques et économiques avec les pays d'origine de l'immigration illégale. Là encore cette proposition espagnole ne fait pas l'unanimité. Si comme Madrid, le Royaume-Uni, l'Italie, l'Allemagne et le Danemark estiment que ces pays doivent être tenus pour responsables s'ils ne font rien pour empêcher les flux, les positions diffèrent dans le reste de l'Union, notamment en France et en Belgique. «La France considère qu'on ne peut pas sanctionner les pays en développement parce que les malheureux qui n'ont aucun moyen de subsistance chez eux veulent venir chez nous», avait ainsi récemment déclaré le nouveau ministre français de l'intérieur, Nicolas Sarkozy. Aussi, préfére-t-on proposer aux pays d'origine de l'immigration une «nouvelle relation contractuelle», notamment par l'insertion de clauses de réadmission des immigrés clandestins dans tous les accords de coopération avec l'UE, comme c'est déjà souvent le cas. Mais l'Allemagne, le Royaume-Uni, la Suède et les Pays-Bas souhaitent en finir à terme avec des subventions qu'ils jugent trop coûteuses, et entendent demander leur suppression dès la révision à mi-parcours de l'Europe, cet été. Les Quinze restent plus que jamais à la recherche d'une formule de compromis, même si de nombreux diplomates ne voient pas de solution miracle.