C'est un rapport très contesté que celui produit par l'ONG internationale Human Rights Watch (HRW) sur le respect des droits de l'Homme au Maroc. Le lendemain de sa publication, en fin de semaine dernière, un communiqué de la délégation interministérielle aux droits de l'Homme (DIDH) a dénoncé une sous-estimation délibérée des réalisations du Maroc en la matière. «Autant le Maroc est ouvert pour recevoir toutes les observations et les critiques en matière de droits de l'Homme ou tout autre domaine, autant il refuse toute évaluation ou critiques basées sur des allégations de source unique», affirme le communiqué de la DIDH rendu public vendredi. Quelques bons points pour le Royaume La nouvelle politique de migration adoptée par le Royaume est, en effet, l'une des rares avancées du Maroc en matière de droits de l'Homme citées par le rapport de HRW. «Le Maroc a mis en œuvre des réformes annoncées en 2013 à ses politiques relatives aux migrants», indique le rapport, notant l'accord de plus de 500 permis de résidence d'une année renouvelable à des réfugiés reconnus par le Haut-Commissariat aux réfugiés. La campagne exceptionnelle de régularisation des migrants a également été saluée par HRW, des milliers de permis de résidence avaient été accordés en 2014 à des migrants d'origine subsaharienne qui n'étaient pas demandeurs d'asile mais qui remplissaient certains critères. Autre réforme que reconnaît HRW au Royaume, le retrait de l'article 475 du code pénal en janvier 2014 après un combat de longue haleine mené par la société civile. Ce texte, très controversé, permettait à des violeurs d'échapper aux poursuites pour viol de mineures en épousant leurs victimes. Le rapport constate, cependant, que le principe d'égalité entre les hommes et les femmes contenu dans la Constitution de 2011 tarde à voir le jour sur les textes de lois. Il note, entre autres, que «le Code de la famille contient des dispositions discriminatoires pour les femmes en matière de succession et le droit pour les maris de répudier unilatéralement leurs épouses». La question du travail et des droits des enfants, longtemps mise en relief par des institutions nationales telles que le Haut-Commissariat au plan (HCP) et le Conseil national des droits de l'Homme (CNDH), a elle aussi eu leur part du rapport de HRW. «Le nombre d'enfants travailleurs domestiques a diminué ces dernières années, mais des filles dès l'âge de 8 ans continuent à travailler dans des domiciles privés jusqu'à 12 heures par jour pour des salaires modiques», déplore le rapport, nous rappelant par la même occasion que le projet de loi relatif à la réglementation du travail domestique traîne dans les arcanes du Parlement depuis 2006. Des réformes «trop lentes» «Les réformes légales ont progressé lentement», une affirmation qui décrit pour le mieux la vision de HRW du système pénal marocain. Le Maroc peut, selon HRW, se targuer de la promulgation d'une loi en septembre 2014 autorisant la Cour constitutionnelle à bloquer une législation proposée si elle contrevient à la nouvelle Constitution, notamment si cela concerne les clauses relatives aux droits humains. Dans cette même optique, une proposition de loi excluant les civils de la compétence des tribunaux militaires attend d'être approuvée par le Parlement. «Pendant ce temps, les tribunaux militaires ont continué à juger des civils», note le rapport. Par ailleurs, «liberté d'expression», «liberté de réunion» et «liberté d'association», sont trois sections où le rapport du HRW est particulièrement virulent envers le Maroc. Il note, par exemple, que des médias indépendants continuent de critiquer les membres et politiques du gouvernement mais peuvent faire l'objet de poursuites et de peines de prison sans, cependant, indiquer qu'un nouveau code de la presse, actuellement en gestation, supprime définitivement toutes les peines privatives de liberté à l'encontre des journalistes. L'ONG reproche, en outre, au Maroc de disperser et d'interdire des manifestations hostiles à la souveraineté du Royaume sur le Sahara, mais également d'interdire la création d'associations dont les dirigeants seraient des séparatistes. Ces nombreuses critiques n'empêchent néanmoins pas le rapport de HRW de noter que le Maroc a toujours autorisé les mécanismes de droits de l'Homme des Nations Unies à visiter son territoire, y compris le Sahara. «Le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire a indiqué que les autorités lui avaient permis de se rendre dans les lieux de détention qu'il avait demandés, et d'interroger en privé les détenus de son choix», indique-t-il, notant également que le 29 mai dernier, Navi Pillay, alors Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'Homme en visite officielle au Maroc, avait relevé de «grands progrès [du Maroc] dans la promotion et la protection des droits de l'Homme».