Non. La séance mensuelle n'aura pas lieu à la deuxième Chambre. Attendu chez les conseillers depuis des mois, le chef de gouvernement Abdelilah Benkirane sera l'hôte encore une fois de la première Chambre au sujet du dialogue social. Mais l'absence du chef de l'Exécutif ne durera pas trop longtemps à la chambre haute du pays. Les conseillers préparent, en effet, une motion d'interpellation. Une sorte de convocation un peu au-dessous d'une motion de censure mais largement au-dessus d'une séance mensuelle de questionnement sur la politique générale. Car si la motion de censure qui est du ressort exclusif des députés peut conduire à la chute du gouvernement, la motion d'interpellation n'est au mieux qu'une occasion de débattre avec le chef de gouvernement. Autant dire qu'il s'agit d'une initiative symbolique de la Chambre des conseillers. Mais l'opposition, majoritaire à la deuxième Chambre, est décidée à aller jusqu'au bout dans cette entreprise tout en espérant marquer un gros coup à quelques mois des élections communales. Dans ce sens, la motion peut intervenir si tout va bien courant mai. En effet, les forces de l'opposition viennent de franchir un nouveau palier dans les préparatifs avec le lancement d'une collecte des signatures. Car la Constitution du pays exige de la Chambre des conseillers la collecte des signatures d'un cinquième de ses membres pour la recevabilité de la motion. Une condition qui peut sembler comme du gâteau pour l'opposition largement majoritaire chez les conseillers. «Nous avons décidé de lancer une collecte des signatures à partir de cette semaine», explique Hakim Benchemach, président du groupe parlementaire du PAM (Parti authenticité et modernité) à la Chambre des conseillers. Au côté des partis de l'Istiqlal, de l'Union socialiste des forces populaires (USFP) et de l'Union constitutionnelle, le PAM veut ainsi mener le Parlement marocain à la mise en œuvre pour la première fois dans les annales de l'institution législative, d'une motion contre le chef de gouvernement. Difficile d'affirmer cependant si cette information est mauvaise ou plutôt bonne pour Benkirane. Ce dernier sera très sollicité dans les semaines à venir par le Parlement avec tout ce que cela implique comme nombre d'heures sur les écrans de la télévision publique. Le Parlement s'apprête à tenir pour la première fois des séances annuelles sur les politiques publiques. Celles-ci sont prévues par l'article 101 de la Constitution du pays. A cette fin, les deux Chambres parlementaires sont décidées à accorder leurs violons. Dans ce sens, le président de la Chambre des représentants, le Rniste (Rassemblement national des indépendants, majorité) Rachid Talbi Alami, et le président de la Chambre des conseillers, le Pamiste Mohamed Cheikh Biadillah, ont tenu une première réunion de coordination. Il y aura ainsi non pas une seule mais deux séances annuelles. La première aura lieu chez les représentants et traitera de la gestion déléguée alors que la deuxième est prévue chez les conseillers sur la gouvernance territoriale. Du grand spectacle en vue. Interpellation ou censure, quelle différence ? La motion de censure est différente de la motion d'interpellation. La première est du domaine de prérogatives réservées aux députés. La deuxième est du ressort des conseillers. La première peut conduire à la chute du gouvernement mais la deuxième est plutôt symbolique. La Constitution est beaucoup plus explicite concernant la différence entre les deux motions. Dans ce sens, l'article 105 stipule que «la Chambre des représentants peut mettre en cause la responsabilité du gouvernement par le vote d'une motion de censure. (…) La motion de censure n'est approuvée par la Chambre des représentants que par un vote pris à la majorité absolue des membres qui la composent. Le vote ne peut intervenir que trois jours francs après le dépôt de la motion. Le vote de censure entraîne la démission collective du gouvernement». Pour sa part, l'article 106 dispose que «la Chambre des conseillers peut interpeller le gouvernement par le moyen d'une motion signée par le cinquième au moins de ses membres. Elle ne peut être votée, trois jours francs après son dépôt, que par la majorité absolue des membres de cette Chambre. Le texte de la motion d'interpellation est immédiatement adressé par le président de la Chambre des conseillers au chef de gouvernement qui dispose d'un délai de six jours pour présenter devant cette Chambre la réponse du gouvernement. Celle-ci est suivie d'un débat sans vote». Une séance mensuelle ce mardi Alors qu'il était attendu à la Chambre des conseillers, le chef de gouvernement sera ce mardi à la Chambre des représentants. Cette dernière tiendra, ce mardi, sa séance mensuelle consacrée aux réponses du chef de gouvernement Abdelilah Benkirane aux questions relatives à la politique générale. Actualité oblige, les députés ont choisi d'interpeller le numéro un de l'Exécutif sur le dialogue social. Benkirane va donc présenter le bilan du dialogue avec les centrales syndicales les plus représentatives. Pour rappel, la séance mensuelle à la Chambre des conseillers avait été reportée à plusieurs reprises, notamment en raison des déplacements du chef de gouvernement à l'étranger. Aucune explication n'a été cependant donnée ni par le Parlement ni par les services du chef de gouvernement sur les raisons ayant conduit l'organisation de la séance mensuelle à la première Chambre pour la troisième fois consécutive. Le dernier passage de Benkirane chez les conseillers remonte, en effet, au mois de décembre 2014. A noter enfin que les séances mensuelles se tiennent conformément aux dispositions de l'article 100 de la Constitution et au règlement intérieur de la Chambre.