Depuis un mois l'opération militaire israélienne «Bordure protectrice» a tenu en haleine l'opinion publique. Cette offensive menée sur la bande de Gaza depuis le 8 juillet a eu pour lourd bilan pas moins de 1.822 morts et n'a pas manqué de remettre sur le tapis la question du boycott d'Israël. Plusieurs appels au boycott, qu'il soit économique, politique ou culturel, ont été lancés partout dans le monde. Au Maroc, cette tendance revient à chaque escalade de violence en Palestine pour ensuite se faire oublier. Comment ces actions sont-elles accueillies et à quel point ont-elles un écho au-delà des frontières ? Mondialement, les violences qu'exerce Israël sur le peuple palestinien n'ont jamais été autant exposées. La médiatisation du conflit a servi de coup de pouce aux différents mouvements d'indignation et de boycott, y compris au Maroc. S'agissant des effets concrets que peut avoir une action de boycott, Adnane El Khattate, membre du réseau BDS Maroc (Boycott, désinvestissement et sanctions), explique que l'efficacité du boycott est l'éradication du mal à la racine. «Quand l'économie d'une entité est affaiblie, la guerre avec toutes ses dépenses ne pourrait être envisagée. Et les exemples indien et sud africain sont des réussites historiques du boycott». Toutefois si le mouvement n'est pas de masse, il serait difficile d'en toucher le résultat. Sa réussite est selon lui conditionnée par l'importance du mouvement populaire et même des décisions étatiques. Quant à l'engouement qu'aurait le citoyen marocain pour les produits importés et leur éventuelle adhésion à ces mouvements. Bouazza Kherrati, président de la Fédération marocaine des droits du consommateur (FMDC), explique que même si le consommateur marocain devrait boycotter ne serait-ce que pour répondre à un «appel de conscience», il est difficile pour lui d'identifier la provenance des produits qu'il consomme. Il affirme que croire à un succès de ces mouvements est difficile au Maroc car, paraît-il, les Israéliens passent par des sociétés-écrans installées dans différents pays. «La plupart des produits qui circulent au Maroc et qui sont en provenance d'Israël passent d'abord par un pays arabe, ils portent donc un label arabe et c'est justement cela qui rend leur traçage difficile pour un consommateur lambda». Ceci dit, la société civile engagée dans cette action n'est pas près de lâcher prise. «Au Maroc, la mobilisation souffre du black out mais il faut savoir que cette campagne est une arme efficace pour faire plier Israël. L'inquiétude qui monte face au succès du boycott témoigne de son succès», déclare à ALM Salaheddine Lemaizi, membre d'Attac Maroc (Association pour la taxation des transactions pour l'aide aux citoyens). Kamal Hachkar, historien et réalisateur du film «Tinghir Jérusalem» retraçant l'exode de la population juive marocaine vers Israël, estime quant à lui qu'il est favorable au boycott des produits des colonies et de tout ce qu'Israël peut faire derrière les frontières de 1967. Il se pose toutefois des questions sur son efficacité : «Cela voudrait dire que nous boycotterons aussi les 20% de Palestiniens citoyens israéliens». Pour ce qui est du boycott culturel, nombreux sont ceux qui le refusent et ne lui trouvent aucune justification. Sous sa casquette de cinéaste, Kamal Hachkar s'indigne: «Je suis contre toute forme de boycott culturel car les plus beaux films dénonçant l'occupation et la politique des gouvernements israéliens ont été réalisés par des Israéliens. D'ailleurs, il existe des artistes israéliens qui ont pris des risques en se prononçant contre la guerre de Gaza. Ils ont même été menacés de mort et sont traités de traîtres». Il est à rappeler qu'en octobre 2013, deux propositions de loi contre la normalisation des relations avec Israël avaient vu le jour à l'initiative de cinq groupes parlementaires. Ces projets de loi posant des restrictions au niveau des échanges culturels, économiques, politiques et sportifs ont créé une polémique et ont aussitôt été gelés au niveau de la commission de justice et législation au Parlement. Si ce gel a été un soulagement pour certains, d'autres continuent à le dénoncer.