Il n'avait pas l'intention de tuer son ami. C'est du moins ce que ce jeune homme, âgé de vingt-huit ans, a confirmé au début de son interrogatoire par le président de la chambre criminelle près la Cour d'appel de Casablanca. Ne pouvant fixer des yeux le président de la Cour, il racontait sincèrement son histoire qui a coûté la vie à son ami, Abdellah, son aîné de deux ans. Il a affirmé qu'ils ont vu le jour à la même rue à Derb Soltane, qu'ils avaient fréquenté la même école, qu'ils jouaient au football sur le même terrain… Il a précisé avoir pris son premier joint avec lui ainsi que son premier verre. Il racontait tout cela en fondant en larmes. Il a précisé qu'ils passaient de bons moments à chaque fois qu'ils retournaient de leur emploi. Lui est mécanicien alors que le défunt était menuisier. Outre leurs voisins, leurs amis, leurs collègues, les cafés de la Place des Sraghna et les bars du centre-ville étaient les témoins de leur relation amicale puisqu'ils les fréquentaient chaque soir. Cependant, les mauvaises langues sont arrivées à l'envenimer. Il a précisé au président de la Cour et à ses deux assesseurs que son ami Abdellah lui a reproché d'avoir parlé à sa sœur. «Je lui ai répondu que je la considère également comme une sœur», a-t-il ajouté à la Cour. Mais, Abdellah ne l'a pas cru. Il lui a demandé de ne plus adresser la parole à sa sœur. La nuit du crime, ils avaient bu quelques verres dans un bar du centre-ville. Vers minuit, ils sont retournés à leur quartier pour continuer à s'enivrer. Abdellah avait déjà acheté une bouteille de vin rouge qu'il gardait chez lui. Au fil des verres et de la conversation, Abdellah lui a réitéré sa demande de ne plus parler à sa sœur. L'alcool étant monté à la tête, il lui a expliqué qu'il l'aime et qu'il avait l'intention de la demander en mariage. Et c'est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Abdellah a perdu aussitôt ses nerfs et a donné des coups de poing à son ami. Ce dernier s'est saisi de la bouteille du vin rouge, l'a brisée et lui a asséné des coups de tesson au niveau du cou. Abdellah est tombé par terre, gisant dans une mare de sang. Le mis en cause est resté près de lui jusqu'à l'arrivée de l'ambulance. À mi-chemin de l'hôpital, Abdellah a rendu l'âme pour être enterré ensuite. Et le mis en cause a été condamné à 12 ans de réclusion criminelle après avoir bénéficié des circonstances atténuantes.