Dans un bar-restaurant, Abdelilah a engagé une conversation avec Saïd. C'était le début d'une amitié qui n'a duré que quelques heures. Puisque trois heures plus tard, Abdelilah a tué Saïd. Et ce, pour une prostituée. De grande taille, Abdelali se tenait au banc des accusés. Il ne braquait ses yeux que sur le président de la Cour. Portant un tricot en coton gris rayé en blanc, un pantalon blue-jeans et des sandales marron, il s'est levé une fois que le président de la Cour a prononcé son nom et son prénom. Il s'est contenté de répondre «présent» en arabe sans ajouter le moindre mot. Il s'est planté à sa place comme s'il attendait un nouvel ordre du président de la Cour. Effectivement, il lui a demandé d'avancer vers le box des accusés. Fixant toujours le président de la Cour, Abdelali a levé son index pour demander au magistrat de lui permettre de prendre la parole. «Tu auras largement le temps pour nous répondre. Mais, attends un peu», lui a dit le président de la Cour qui a commencé à l'interroger sur son identité. Nous sommes à la chambre criminelle près la Cour d'appel de Casablanca. Abdelali, trente-deux ans, employé de son état, demeurant à Hay Mohammadi, à Casablanca, n'a jamais imaginé être détenu pour un meurtre. Son casier judiciaire était vierge. Malheureusement, quelques verres de vin rouge étaient suffisants pour qu'il soit dans le gouffre. «Tu es accusé de coups et blessures ayant entraîné la mort sans l'intention de la donner», lui a rappelé le président de la Cour qui était épaulé par deux assesseurs. Abdelali a gardé le silence. «Tu voulais parler il y a quelques minutes. Pourquoi tu ne réponds pas maintenant à la question de la Cour ?», lui a demandé le président de la cour. Abdelali semble être perturbé. Mais, un instant plus tard, sa langue s'est déliée. «M. le président, il m'a provoqué. Je n'avais pas l'intention de le tuer», a-t-il répondu sur un ton sérieux. Qui l'a provoqué ? Et comment ? Selon le dossier de l'affaire, Abdelali était en compagnie de Saïd ce jour du mois de mars 2010. Celui-ci n'était pas son ami. Ils se sont rencontrés au centre-ville, dans un bar-restaurant. Chacun était au comptoir en train de siroter sa bière quand ils ont engagé une conversation. Tout d'un coup, Abdellah a invité Saïd à prendre une bière dans un autre bar. En fait, tous les deux ont emprunté le chemin vers un deuxième bar où Abdelali a rencontré une jeune prostituée. C'était sa maîtresse avec laquelle il partageait le même lit à chaque fois qu'il la désirait et ce, en contrepartie d'une somme d'argent. Tous les trois ont commencé à s'enivrer. Saïd qui semblait être attiré par la beauté de la prostituée était très généreux avec Abdelilah et sa maîtresse. Il les a même invités à un troisième bar-restaurant. Abdelali et sa maîtresse ont accepté l'invitation. Saïd a hélé un petit taxi qui s'est arrêté. Quand le couple s'est apprêté à monter à l'arrière, Saïd a sollicité Abdelilah de monter devant et le laisser s'asseoir près de la prostituée. Aussitôt, Abdelilah a saisi sa maîtresse par le bras et a poussé Saïd. À ce moment, le chauffeur du petit taxi a démarré pour aller chercher d'autres clients. Quant à Abdelilah et Saïd, ils ont commencé à se quereller devant les yeux de la prostituée. Tout d'un coup, Abdelilah a poussé violemment Saïd. Celui-ci s'est renversé par terre. Et sa tête a cogné le trottoir. Suite à une hémorragie interne, il a rendu l'âme aux Urgences de l'hôpital Ibn Rochd. Devant la Cour, Abdelilah n'a pas nié être l'auteur du crime. C'est pourquoi, il a bénéficié des circonstances atténuantes et il a été condamné à dix ans de réclusion criminelle.