La présente chronique vient juste après la révélation de la nouvelle équipe gouvernementale, une équipe remaniée et raffermie avec notamment l'arrivée de nouveaux hommes, mais aussi d'anciens, et surtout par l'entrée formidablement élégante de 5 nouvelles femmes qui sont venues prêter main forte à leur unique consœur qui avait besoin un peu d'être secouée, ou, au moins, d'être contredite. Elle vient aussi à la veille de notre plus grande fête, une fête jadis religieuse, et qui est devenue avec le temps un casse-tête pour les économistes et un casse-tirelire pour les démunis, qu'ils soient conservateurs ou modernistes. Rassurez-vous, je ne vais vous parler ni de gouvernement ni de mouton, d'abord parce que d'autres s'en chargeront sûrement, mais aussi parce que j'ai eu ma dose, et vous probablement aussi. Aujourd'hui, j'ai décidé d'écrire sur absolument autre chose qui n'a rien à voir ni avec la politique - qu'on a de plus en plus de mal à digérer - ni avec la diététique - qui n'est pas non plus la principale caractéristique de l'Aïd El Kébir. Non, j'ai envie de vous parler plutôt de romantisme, de tendresse, d'affection, de passion, bref, en un mot comme en un million, je voudrais qu'on partage ensemble un peu d'amour. Vous allez peut-être me trouver bien désinvolte, mais, entre nous, qu'est-ce qu'on risque à parler d'amour ? Rien. Oh, non, je ne suis pas devenu lâche et je vous assure que je ne cherche aucun poste ni privilège – ça fait longtemps que j'ai définitivement désespéré – mais je vous avoue que je suis un peu paumé. Et comme disaient nos anciens : «Li tlaf ichad larde». Autrement dit : «Celui qui se perd, s'assoit par terre» (pas mal comme traduction, hein ?). Et bien, je n'ai pas attendu l'injonction de nos ancêtres, puisque, voyez-vous, je me suis déjà étalé, j'ai fermé les oreilles et les yeux pour mieux voir les étoiles et écouter chuchoter la Lune, et j'essaye de rêver à la tendresse et de penser à l'amour. D'abord, permettez-moi de vous rappeler que l'amour, il en existe de toutes sortes. Il y a, par exemple, l'amour filial, l'amour familial, l'amour pour la patrie, l'amour pour l'humanité, etc. Non, tout ça ne m'intéresse pas, en tout cas, pas présentement. Moi, j'aimerais discuter avec vous de l'amour avec un grand A et un grand aime (pas mal, ça aussi, hein ?), l'amour vanté par Baudelaire, El Qabani et Chawki, l'amour chanté par Brel, Kelthoum et Senhaji, bref, l'amour pour mon prochain et ma prochaine (rassure-toi, chérie, c'est juste une expression). Et c'est cet amour dont on a tous et toutes besoin aujourd'hui pour nous aimer les uns les autres et les autres les unes, l'amour de tous et contre toutes, tout contre toutes. Cet amour si tendre et si beau, hélas, est devenu rare, pis : il est devenu tabou. Ici et maintenant, hier et ailleurs, et si on ne fait rien, ça sera demain et partout, il faudra se cacher pour s'aimer ou juste pour aimer ou être aimé(e). Car, si on ne fait rien, aimer ou s'aimer, deviendra vite un délit grave passible d'emprisonnement, ou pis encore, de soumission à la justice populaire, une justice encore plus aveugle que celle de la balance. Mais bon sang, dites-moi, si deux êtres s'aiment et se hasardent à le montrer, qui gênent-ils au juste ? Comment ? Ce n'est pas dans notre culture ? Foutaises ! Tout notre patrimoine culturel ancestral est parfumé d'amour et enrobé de passion, et même parfois de déraison. Je vous en prie, laissez les gens s'aimer comme ils veulent et où ils veulent. C'est comme ça qu'on donnera une bonne leçon aux chantres de la haine et de l'intolérance. Je vous en supplie, faites-le pour nous, faites-le pour vous, et faites-le surtout pour ce pays merveilleux qui, franchement, mérite mieux. Très bonne semaine et très bonne fête. Vive le Maroc et vive l'amour.