Ce n'est pas dans mes habitudes, ou bien rarement, je vais profiter de cette belle tribune pour parler d'un problème personnel. Mais, comme vous allez le voir, c'est pour faire œuvre utile. Non, je ne vais me plaindre ni de certains comportements inciviques de mes voisins, pourtant j'en ai plein à vous raconter, ni des nombreux dysfonctionnements de notre administration, alors qu'il y en a gogo, mais je voudrais râler carrément contre le pouvoir, celui qu'on appelle dans les pays démocratiques, le 4ème pouvoir, et que chez nous certains appellent, par ironie ou par cynisme, «le 4ème pourboire». Oui, c'est de la presse qu'il s'agit. Rassurez-vous, je n'ai pas l'intention de lui tomber dessus à bras raccourcis car je ne voudrais pas faire le jeu de ses ennemis jurés, et qui sont, en général, aussi, les ennemis de la démocratie. J'aime trop la presse pour prendre ce risque. Au-delà du fait que j'en use et j'en abuse presqu'à ma guise depuis des années, je suis un consommateur industriel de journaux de tous bords et de tous genres. Je ne vous révèlerai pas le budget qui y passe chaque jour pour ne pas subir les foudres de ma douce moitié qui croit toujours qu'on me les offre parce que je suis sympa. Et parce que j'aime la presse, je vais la châtier un peu, et même beaucoup car il le faut. C'est pour moi une épreuve très difficile, mais comme c'est pour la bonne cause, j'accepte de souffrir. Je ne vais pas lister tous les griefs que j'ai contre mes amis et confrères de la presse écrite, mais je vais me limiter aujourd'hui à vous relater une triste affaire que je viens de vivre avec un de nos journaux arabophones les plus en vue, affaire qui en dit long sur les failles encore béantes de la presse de notre pays. Le samedi 9 mars, j'ai eu la surprise de trouver dans ce journal une déclaration politique tonitruante sous mon nom et avec ma photo. Or, ne me souvenant pas avoir eu un contact récent avec ledit journal, j'ai lu très vite l'article et je me suis aussi vite rendu compte que ces propos n'étaient pas les miens. J'ai aussitôt adressé une mise au point aux responsables en exigeant qu'elle soit publiée dans les meilleurs délais, dans la même place et au même format comme l'exige la loi. Hélas, malgré plusieurs relances, une semaine après, rien n'avait été fait. Et il a fallu que j'adresse une correspondante officielle au président de La Fédération des éditeurs de journaux – et que je remercie au passage - pour que le nécessaire soit enfin fait, très discrètement d'ailleurs… 10 jours après la publication de ma non-déclaration. Pour l'anecdote, sachez que le papier en question n'est pas du tout un faux, et il avait bien été commis par un pote qui porte le même nom que moi, mon homonyme, quoi ! Bien sûr que cette histoire est marrante et qu'on peut en rigoler autant qu'on veut, mais, à mon avis, on n'a pas le droit de l'évacuer d'un revers de manche, car les dégâts qui peuvent découler de ce type de fautes peuvent être parfois très graves. Là, la victime, c'était votre humble mais grande gueule serviteur qui profite de toutes les occasions pour (sa) tirer à boulets rouges sur les fauteurs de fautes, mais imaginez un citoyen «normal» sur qui on raconte des mensonges ou qu'on accuse à tort... Non, franchement, camarades, il faudrait prendre les choses au sérieux. Oui, bien sûr, le journaliste a le droit d'écrire ce qu'il veut, mais à condition que ce qu'il écrit, d'une part, soit vrai et vérifié, et d'autre part, ne porte pas atteinte à l'intégrité morale ou physique des personnes concernées. En tout cas, journaliste ou pas, personne n'a le droit de piétiner l'éthique et d'outrepasser la loi. Du moins dans un vrai Etat de droit. Sans rancune. Bon week-end à tous et à toutes, y compris aux fauteurs et autres vrais ou faux auteurs …