La guerre en Ukraine rebat les cartes de la campagne présidentielle: Emmanuel Macron, dont l'annonce de candidature reste suspendue à la situation internationale, multiplie lundi les rendez-vous diplomatiques tandis que son Premier ministre reçoit des candidats contraints de se positionner, non sans quelques contorsions. Le président sortant est pris en tenaille entre d'une part la gestion de la guerre russo-ukrainienne et d'autre part la date limite, ce vendredi, pour déposer sa candidature pour sa réélection. Le choix du timing et de la forme de la déclaration de candidature d'Emmanuel Macron, largement favori dans les sondages, a viré au casse-tête pour lui, même si le déclenchement du conflit en Ukraine écrase la campagne et pourrait du coup se transformer en un atout pour le président dans une période d'extrême instabilité, au risque d'escamoter le débat démocratique. Le président réunissait lundi matin un conseil de défense consacré à l'Ukraine. Il devait aussi participer dans l'après-midi à une visioconférence avec des dirigeants étrangers, « afin de poursuivre l'étroite coordination entre alliés et partenaires européens » sur le conflit en Ukraine, a annoncé l'Elysée. Le chef de l'Etat français accueillera ensuite à l'Elysée le chancelier allemand Olaf Scholz et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen pour un dîner de travail avec les représentants des industriels européens, a ajouté la présidence. Ce weekend, la France a en particulier décidé l'augmentation des livraisons d' »équipements de défense » à l'Ukraine et le renforcement des sanctions économiques et financières contre la Russie. De son côté, le Premier ministre Jean Castex organise lundi à 15H00 une « réunion d'information » à destination des candidats à la présidentielle autour du conflit en Ukraine et des sanctions infligées à la Russie. L'invitation a été adressée aux seuls candidats ayant au moins 300 parrainages d'élus, excluant par exemple Christiane Taubira, qui s'en est plainte dimanche soir estimant que « cette conception de la démocratie ne l'honore pas ». L'ex-ministre de la Justice de François Hollande, qui ne récoltait que 128 parrainages au dernier décompte, a annoncé lundi matin consacrer toute se semaine à la recherche de nouvelles signatures. Elle a annulé ses autres engagements. Tous les candidats concernés ont accepté, sauf Nathalie Arthaud (LO). Il n'était pas clair dans l'immédiat si le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon participerait à cette réunion ou serait représenté, alors que certains candidats comme l'écologiste Yannick Jadot ont estimé qu'il aurait été « de bon ton » d'être reçu par le président de la République et non le Premier ministre. La candidate LR Valérie Pécresse a parlé lundi, en marge du salon de l'Agriculture, d'une « réunion souhaitable » en ajoutant que « dans ce contexte, il faut faire preuve à la fois de responsabilité et d'esprit de proposition ». L'eurodéputé Yannick Jadot a lui dit sur franceinfo qu'il en profiterait pour demander un « exercice normal de transparence » sur les livraisons d'armes à l'Ukraine par la France, dont le détail n'a pas été dévoilé. La guerre en Ukraine oblige aussi les candidats à chambouler leurs programmes et à se positionner sur le conflit et ses conséquences. Le candidat d'extrême droite Eric Zemmour, qui a condamné Moscou mais dont les positions prorusses font débat, a estimé lundi sur RTL que l'arrivée de réfugiés ukrainiens risque de « déstabiliser la France », et « préfère qu'ils soient en Pologne », qu'il « faut aider » à faire face. La candidate LR a pour sa part lancé des piques à ses adversaires d'extrême droite estimant « que tous ceux qui prônent une admiration ou ont une fascination pour Vladimir Poutine sont discrédités aujourd'hui pour présider la France ». A gauche, la socialiste Anne Hidalgo ou encore M. Jadot s'en sont eux pris ces derniers jours à M. Mélenchon, accusé lui aussi de sympathies avec Moscou avant la guerre. Lors d'un déplacement à la Réunion ce weekend, M. Mélenchon a admis avoir « commis une erreur ». Pendant ce temps, au salon de l'Agriculture, passage obligé pour tout candidat, la crainte d'une flambée des prix était dans tous les esprits. La question de « souveraineté agricole va se poser dans les mois qui viennent de manière aiguë », a affirmé Mme Pécresse, souhaitant la mise en place d'un « bouclier » pour protéger les agriculteurs français. Outre Mme Pécresse, Mme Hidalgo et le communiste Fabien Roussel ont déambulé lundi matin dans les dédales du salon entre vaches et produits agricoles.