Nabil El Bousaadi Inédit ; plus d'une trentaine d'organisations de la société civile hondurienne ont réclamé, dans un communiqué en date de ce lundi, le « départ immédiat » du président Juan Orlando Hernandez qu'elles accusent d'avoir transformé le pays en un « narco-Etat » et appelé à la mise en place du gouvernement de transition qui aura en charge l'organisation des élections générales du 28 novembre prochain. « Remplis d'indignation », les signataires de cette déclaration dont « Caritas » de l'Eglise catholique, le Comité des proches des personnes disparues au Honduras (Cofadeh) et la Confédération unitaire des travailleurs honduriens (Cuth) ont réclamé, également, le départ « du président du Congrès, du président de la Cour Suprême de justice et du procureur général de la République ». Ils reprochent à tout ce beau monde « la destruction de l'Etat de droit et la construction d'une dictature (...) qui est devenue un narco-Etat ». Pour rappel, en Février dernier, dans une lettre ouverte adressé au président du Honduras, Gabriela Castellanos, la présidente du Conseil national anti-corruption hondurien avait déjà exigé la démission du chef de l'Etat et demandé à ce dernier de se soumettre à la justice pour répondre de ses liens présumés avec le narcotrafic. Un groupe de députés avait adressé une demande similaire au président Juan Orlando Hernandez. Mais pourquoi donc la classe politique hondurienne fait-elle preuve d'autant d'acharnement contre le chef de l'Etat ? Cette affaire avait débuté en Novembre 2018 lorsque Tony Hernandez, 42 ans, le frère du président du Honduras, fut arrêté à Miami. Elle reprendra en Octobre 2019 quand après deux semaines de procès, ce dernier fut reconnu coupable par un tribunal fédéral de New York de trafic de drogue pour avoir fait rentrer, aux Etats-Unis, quelques 185 tonnes de cocaïne. Ce dossier a refait surface mardi 30 mars avec la condamnation du mis en cause à la réclusion à perpétuité. De l'avis du juge Kevin Castel, la prison à vie, assortie de restitutions et de confiscations de bien à hauteur de 138,5 millions de dollars reste « pleinement méritée » contrairement aux 40 années d'emprisonnement pour lesquelles avait plaidé sa défense. Rejetant toutes les accusations dont a fait l'objet son frère qui compte faire appel du jugement prononcé par le tribunal new yorkais, le président Juan Orlando Hernandez a sévèrement critiqué les tribunaux américains pour s'être appuyés sur des témoignages faits, selon lui, à titre de vengeance, par d'anciens chefs de gangs de trafic de drogue qui, par le passé, avaient été persécutés par le gouvernement hondurien. Réfutant ces allégations, le procureur fédéral, Matthew Laroche, a insisté, de son côté, sur les liens très forts qui unissent l'accusé et « son frère, le président » et qui ont permis, à ces derniers, de faire du Honduras, un « narco-Etat virtuel ». Mettant en avant les énormes quantités de cocaïne introduites par Tony Hernandez aux Etats-Unis mais aussi les meurtres et les intimidations de témoins commandités par ce dernier, le juge Kevin Castel a, d'emblée, écarté toutes « circonstances atténuantes » pour cet homme qui, en sa qualité de « député du Congrès du Honduras aurait pu utiliser son pouvoir pour de bonnes causes » mais qui, de son propre chef, a préféré « choisir une direction opposée ». Le magistrat ajoutera, enfin, que l'accusé « a conspiré avec son frère, le président du Honduras et canalisé l'argent de la drogue vers des campagnes du Parti national [au pouvoir au Honduras] en échange de promesses de protection aux narcotrafiquants ». Au vu de tout cela, il semble donc qu'avec ces histoires de trafic de cocaïne Tony Hernandez ait bien « éclaboussé » son frère qui, dans le meilleur des cas, va être contraint de se dessaisir du pouvoir et, dans le pire, le rejoindre dans sa cellule. Ce feuilleton ne fait que commencer, alors attendons pour voir...