«Il y a de bonnes raisons de s'interroger sur l'inactivité du gouvernement dans la mise en place d'une solution efficace pour faire aboutir le dossier de la Samir», ont souligné les participants à la visioconférence organisée par le Parti du progrès et du socialisme (PPS), mercredi 23 décembre, et placée sous le thème «Le devenir de la raffinerie la Samir : la sécurité énergétique et les prix des hydrocarbures». Le débat qui a été modéré par Najib Amrani, rédacteur en chef du journal Al Bayane, a connu la participation de Abdelouahed Souhaïl membre du Bureau politique du PPS, Rachid Hammouni, député du PPS et également membre du Bureau politique du PPS et Mohamed Benmoussa, vice-président du Front national pour la sauvegarde de la raffinerie marocaine de pétrole. Il faut dire, selon les intervenants que la gestion des gouvernements qui se sont succédé de ce dossier a été catastrophique à tous les étages et ce depuis la privatisation de ce joyau industriel. Un tel constat témoigne de l'échec des choix stratégiques opérés par les gouvernements. Mohamed Benmoussa «Le moment de vérité est venu» D'ailleurs, l'opération de privatisation a été effectuée sans aucun respect aux règles de transparence, a indiqué Mohamed Benmoussa, en évoquant dans ce sens la responsabilité partagée entre plusieurs départements à commencer par l'administration des douanes, la banque centrale ou encore les bureaux d'audits, entre autres. Pour cet expert financier, la libéralisation du secteur des hydrocarbures sans mettre en place des mécanismes d'accompagnement a été une erreur fatale et a eu des effets pervers. Cela évoque la question de la compétence de l'équipe gouvernementale, mais aussi la problématique de l'autonomie de la décision en lien avec le conflit d'intérêt. Pour le militant associatif, «le moment de vérité est venu pour que les partis politiques clarifient leurs positions en soutenant les deux propositions de lois portant sur le transfert des actifs de la Samir au profit de l'Etat et la régulation des prix des hydrocarbures». Le but escompté, a-t-il ajouté, consiste à donner une seconde vie à la raffinerie en vue de défendre le pouvoir d'achat des citoyens et renforcer la compétitivité des entreprises. Cela étant, le dossier de la Samir a un caractère économique et social d'où l'urgence de l'intervention des acteurs concernés, a-t-il martelé, tout en pointant du doigt la neutralité négative du gouvernement Saad Eddine El Otmani, surtout que l'on sait que le rapport établi par la mission d'information parlementaire sur le prix des carburants évoque un soupçon de complicité entre les distributeurs, a-t-il rappelé en notant que ces derniers auraient réalisé des «profits non éthiques» s'élevant à 38 milliards de DH depuis 20126. Le conférencier est allé même à poser l'hypothèse sur l'existence d'une main invisible au sein du gouvernement qui bloque toute solution à ce dossier. Cela étant, l'argument judicaire servant comme prétexte pour le gouvernement ne tient plus la route, tout en l'appelant à s'ingénier à trouver les solutions qui s'imposent à travers la mise en place des garanties des mesures clarifiant le devenir des secteurs en vue d'encourager les preneurs potentiels. «Le dossier de la Samir est un dossier qui relève de l'intérêt suprême du pays et nécessite la mobilisation de tous les acteurs», a-t-il martelé tout en mettant en garde contre le facteur temps. En termes plus clairs, la valeur de la Samir a connu une baisse significative passant de 24 milliards de DH à 17 milliards de DH rien que pendant 3 ans. Abdelouahed Souhaïl «Faire preuve d'un esprit patriotique» De son côté, Abdelouahed Souhaïl s'est attelé dans son intervention sur les enjeux de la création de la Samir au lendemain de l'indépendance dont la finalité consistait à assurer une autonomie énergétique à l'Etat marocain vis-à-vis des cartels pétroliers, tout en déplorant le manque du professionnalisme de ceux qui ont mené l'opération de sa privatisation sans se doter des mesures préventives. En procédant de la sorte, on est passé de la logique du monopole de l'Etat à une autre logique marquée par la domination du secteur privé et l'absence des règles de concurrences. Il va sans dire que tous les acteurs concernés ont failli à leurs responsabilités quant à la crise de la Samir, notamment le secteur banquier et l'administration des douanes qui ont octroyé un crédit d'enlèvement aux anciens décideurs de la raffinerie sans aucune garantie. «Il s'agit d'une situation incompréhensible», a-t-il déclaré avec insistance. A l'instar de Mohamed Benmoussa, Abdelouahed Souhaïl s'est interrogé sur le mutisme de l'Exécutif et son incapacité à prendre le taureau par les cornes, et ce en prenant des mesures SMART au lieu de sombrer dans une logique de spectateur, sachant, a-t-il insisté que la solution du dossier est tout-à-fait envisageable. Cela requiert, avant tout, une volonté politique et une prise de conscience des enjeux du dossier par l'ensemble les formations politiques. Pour ce faire, le gouvernement est appelé à inscrire ce dossier parmi les priorités de son agenda, a-t-il noté avec substance. Et pour le militant du PPS, les solutions ne manquent pas, que ce soit via la conversion des dettes de l'Etat en investissements ou par l'établissement d'un partenariat public-privé… «Il faut juste faire preuve d'un esprit patriotique», a-t-il ajouté. Rachid Hammouni «Renforcer le rôle de l'Etat» Quant à Rachid Hammouni, il a soulevé le silence du gouvernement et son non engagement à prendre en considération les recommandations de la mission d'information du Parlement. Ce qui suscite plusieurs questionnements sur l'attitude gouvernementale à l'égard de ce dossier. Pour le député du PPS, la rationalisation du secteur des hydrocarbures a besoin d'un renforcement du rôle de l'Etat en tant que protecteur des intérêts des citoyens et en vue d'assurer la sécurité énergétique du pays. Les soupçons de complicité entre les distributeurs qui ont réalisé des bénéfices faramineux au détriment du pouvoir d'achat de consommateurs est un secret de polichinelle. En témoigne les marges de profits évoquées par le rapport du Parlement, a-t-il indiqué. Tout en soulevant le retard enregistré en matière de la location des bacs de stockages, qui a privé l'Etat des gains significatifs, il a émis des craintes quant à la fermeture définitive de la société. Pour l'intervenant, le redémarrage de l'entreprise va permettre à l'Etat de faire économiser des devises et alléger par conséquent le déficit commercial. Abondant dans le même ordre d'idées, l'intervenant a soulevé l'interactivité de l'Exécutif avec les propositions de l'institution législative tout en jetant la responsabilité sur les gouvernements précédents. Ce dossier qui constitue un problème complexe voire structurel doit être approprié par les partis politiques, devant soutenir fortement l'initiative législative, a-t-il insisté.