Sénatrice et, à ce titre, protégée par l'immunité parlementaire qui lui épargne une détention préventive, Christina Fernandez de Kirchner, 66 ans, péroniste, ayant présidé aux destinées de l'Argentine de 2007 à 2015, après son époux Nestor qui siégea à la magistrature suprême du pays de 2003 à 2007, a comparu ce mardi devant le Tribunal de Buenos-Aires pour «l'une de la dizaine d'affaires de corruption dans lesquelles elle est mise en examen» et qui a trait à 52 contrats d'une valeur globale de plus d'un milliard de dollars conclus, sous sa présidence, avec l'entreprise Austral Constructions. A ses côtés, comparaissent, en état de détention, Lazaro Baez, le patron de l'entreprise précitée, simple employé de banque de la province de Santa Cruz – le fief politique des Kirchner en Patagonie – rapidement devenu un richissime chef d'entreprise en BTP, Julio de Vido, ancien ministre de la planification arrêté en Octobre 2017, son vice-ministre José Lopez ainsi que douze autres accusés parmi lesquels figure Alberto Fernandez, ancien chef de cabinet du président Nestor Kirchner, décédé en 2010. Mais nonobstant l'accusation pour laquelle elle est appelée à répondre devant la Cour, l'ancienne présidente de l'Argentine reste, toutefois, protégée par l'immunité parlementaire dont les péronistes, majoritaires au Sénat, refusent de la dépouiller tant qu'elle ne sera pas condamnée et avant que tous les recours judiciaires ne soient épuisés; ce qui risque de durer plusieurs mois encore, voire même jusqu'à ce que cette dernière, candidate à la vice-présidence du pays, devienne, de fait, présidente du Sénat en cas de victoire. En effet, trois jours avant l'ouverture de ce procès, l'ancienne cheffe de l'Etat a annoncé, à la surprise générale, que lors des élections présidentielles qui se tiendront le 11 Août prochain, elle ne briguera pas la présidence du pays mais la vice-présidence alors même que les sondages la placent bien loin devant Mauricio Macri, le président sortant et que la présentation, à grand renfort de publicité le 9 mai dernier de son livre «Sinceramente» dont 300.000 exemplaires ont été vendus en trois semaines avait été interprétée par ses compatriotes comme étant le lancement de sa campagne électorale. Or, dans une vidéo de treize minutes postée samedi dernier sur les réseaux sociaux, on voit Christina Fernandez de Kirchner, en sa qualité de patronne du Parti Justicialiste (péroniste), désignant Alberto Fernandez, avocat de 60 ans, comme candidat à la présidence de la République en déclarant «J'ai demandé à Alberto Fernandez de prendre la tête du ticket que nous formerons, lui comme candidat à la présidence et moi comme candidate à la vice-présidence». Mais cette dernière étant elle-même née Fernandez, nombreux sont ceux qui voient dans cette «candidature», une formule «Fernandez-Fernandez» où le principal intéressé servira d'épouvantail. Raison pour laquelle, pour s'affirmer, dès à présent, comme candidat à part entière, Alberto Fernandez a déclaré, ce lundi, au premier jour de sa campagne à Santa-Cruz, dont la gouverneure n'est autre qu'Alicia Kirchner, la sœur de Nestor Kirchner : «Je ne suis pas une marionnette de Cristina». Mais, nombreux sont aussi ceux qui voient dans cette stratégie le meilleur moyen qu'aurait trouvé l'ancienne présidente pour rassurer le monde des affaires et les marchés internationaux alors même qu'elle continue à susciter le rejet d'une large frange de l'électorat. S'agit-il, enfin, pour l'ancienne présidente de revenir au pouvoir en passant par la fenêtre ? C'est tout comme ; mais attendons pour voir…