Pêche illégale, surexploitation minière, braconnage, rejets de déchets chimiques en mer, sont autant de menaces qui pèsent sur notre planète, fragilisent l'écosystème, hypothèquent son avenir, sa diversité, voire sa pérennité, autant de crimes environnementaux que de jeunes ingénieurs marocains proposent de combattre par la technologie. Vantant leur exploit, à Bonn à l'occasion de la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique (COP23), qu'ils ont baptisé «ATLAN Space», Badr Idrissi et Younes Moumen misent sur la «deep technologie», à comprendre «l'intelligence artificielle» que leur start-up développe pour les avions sans pilote (drones), permettant de surveiller de larges zones géographiques. Hasard du calendrier, le passage des promoteurs du projet à Bonn intervient alors que le Maroc venait de lancer son premier satellite marocain d'observation de la Terre «Mohammed VI – A», un dispositif à la pointe de la technologie en faveur du développement et du rayonnement du Maroc. Et c'est avec fierté qu'ils accueillaient cet événement exceptionnel qui ne faisait que les conforter davantage dans leur choix et leur conviction en l'avenir prometteur de ce créneau. «On est très fier du lancement du premier satellite marocain d'autant plus que notre technologie vient en complémentarité avec la technologie satellitaire», a confié à la MAP Badr Idrissi, cofondateur d'ATLAN Space, sélectionnée récemment parmi les 15 finalistes de la Start-up Istanbul. Au total, 20.000 projets innovants étaient nominés dans le plus grand événement des Startups en Eurasie. Aujourd'hui, explique-t-il, «les satellites couvrent de très larges zones, beaucoup plus importants que les drones mais avec une résolution moindre, ces derniers peuvent descendre à des altitudes plus basses». D'où la possibilité de création d'espaces de complémentarité entre les deux technologies. Ainsi, lorsque le satellite alerte ou détecte une activité suspecte, on peut intervenir, avec des drones, pour donner une visibilité plus poussée et permettre une prise de décision plus rapide, précise Idrissi. La technologie développée par «ATLAN Space» est utilisée pour le moment pour combattre la pêche illégale en Afrique de l'Ouest, un vrai fléau dans cette région où chaque année, 1,4 milliard de dollars seraient perdus à cause de «ce crime environnemental», selon les cofondateurs de la start-up. En guise de solution, ils ont développé une intelligence artificielle qu'on installe sur des avions sans pilotes pour leur permettre de déterminer la destination de la cible et comprendre la raison de sa présence dans les eaux territoriales et «partant décider s'il s'agit d'un bateau de pêche, s'il est en train de pêcher illégalement ou pas, ou s'il s'agit d'un bateau de croisière, par exemple». «Ce sont autant de données que l'intelligence artificielle comprend elle-même. Et une fois la décision est prise, c'est-à-dire on est certain à 99% que c'est de la pêche illégale, le drone intervient, soit en alertant les autorités locales, soit en signifiant au bateau qu'il se trouverait en situation illégale le sommant à arrêter toute activité», décrypte le cofondateur d'ATLAN Space. Cette technologie, qui a déjà fait l'objet d'un premier brevet, alors que d'autres devront suivre l'année prochaine, ne s'applique pas seulement à la pêche illégale, tiennent à souligner ses promoteurs. Ces derniers, qui travaillent en étroite collaboration et en partenariat avec l'Université Mohammed premier d'Oujda et l'Université internationale de Rabat, envisagent d'ores et déjà la possibilité de la transposer dans les domaines de la forêt, l'exploitation minière, le braconnage, le déversement de produits chimiques dans les océans etc. «Ce sont des crimes environnementaux qu'on est en train de combattre et c'est pourquoi on est à la COP23», a assuré Idrissi. Tout en étant fier de «cette technologie marocaine, développée par des Marocains au Maroc», les deux amis restent convaincus que la technologie d'ATLAN Space doit évoluer sous d'autres cieux pour conquérir le marché mondial.