Un soleil blanc comme la «ville blanche» inondait cet après-midi le grand rond-point de la place de la Liberté menant, d'un côté, au Palais Royal, et, d'un autre côté, au jardin Murdoch qui donne sur l'avenue Victor Hugo. L' immeuble de 17 étages («immeuble Liberté») qui domine par sa hauteur et sa blancheur la ville de Casablanca sur toutes les cartes postales noir et blanc depuis les années cinquante, ajoutait à la lumière qui illuminait toute la place, de son vrai nom actuel, «Place Jacques Lemaigre Dubreuil», figure historique des «Libéraux du Maroc», fondateur des «Huiles Lesieur», assassiné le 11 juin 1955, sur cette même place, par les nervis du colonialisme («présence française») à cause de son soutien, avec son journal «Maroc-Presse», au nationalisme des «indigènes», les Marocains. Nous étions deux jeunes Marocains, étudiants, forcément rebelles comme il se devait en ces débuts des années 70, revenus, le temps d'un week-end, dans nos familles, ayant quitté, par auto-stop, le campus universitaire de Rabat-Agdal, l'unique au pays à l'époque...L'air du temps était à la gloire de la mini-jupe. Elle en portait une, cousue de ses propres mains avec lesquelles les miennes commençaient à se familiariser, maintenant que nous étions arrivés au 2ème rendez-vous d'amoureux osé dans notre propre ville, hors de la protection et la liberté ambiante dont nous jouissions au Campus de Rabat qui abritait, comme un no man's land, nos assemblées générales et meetings de l'UNEM, nos manifestations, nos settings et nos veillées de chants dits « révolutionnaires » à l'époque, soufflant des quatre coins du Monde (Cheikh Imam, Al Ghiwane, Tupamaros, Léo ferré...).