-Moulay Ismail Alaoui : Seuls les nihilistes et les ignorants refusent d'apprécier à sa juste valeur l'acquis historique -Les ministres de la Communication et de la Culture exposent les réalisations accomplies et à accomplir -Des chercheurs mettent en garde contre tout travail bâclé Le président du Conseil de la présidence du Parti du Progrès et du socialisme (PPS), Moulay Ismail Alaoui, a affirmé que seuls les ignorants et les nihilistes se refusent toujours d'apprécier à sa juste valeur l'acquis historique de reconnaissance de l'Amazigh comme langue nationale par la Constitution du 1er juillet 2011, qui a prévu pour ce faire la création du Conseil national des langues et de la culture marocaine. S'exprimant lors de la deuxième séance d'un colloque national, organisé, lundi soir à Rabat, à l'initiative de l'Institut royal de la culture amazighe (IRCAM) sous le thème : « officialisation de l'Amazigh dans la Constitution du Royaume : stratégies et mesures», Moulay Ismail Alaoui a indiqué que la présente rencontre a pour objectifs de soulever toutes les questions qu'il faut au sujet des lois organiques à adopter pour passer à la deuxième étape concernant l'officialisation de la langue amazighe et la mise sur pied du Conseil national des langues et de la culture marocaine. Dans son article 5, la constitution marocaine dispose que «l'arabe demeure la langue officielle de l'Etat. L'Etat œuvre à la protection et au développement de la langue arabe, ainsi qu'à la promotion de son utilisation. De même, l'amazigh constitue une langue officielle de l'Etat, en tant que patrimoine commun à tous les Marocains sans exception. Une loi organique définit le processus de mise en œuvre du caractère officiel de cette langue, ainsi que les modalités de son intégration dans l'enseignement et aux domaines prioritaires de la vie publique, et ce afin de lui permettre de remplir à terme sa fonction de langue officielle. L'Etat œuvre à la préservation du Hassani, en tant que partie intégrante de l'identité culturelle marocaine unie, ainsi qu'à la protection des expressions culturelles et des parlers pratiqués au Maroc. De même, il veille à la cohérence de la politique linguistique et culturelle nationale et à l'apprentissage et la maîtrise des langues étrangères les plus utilisées dans le monde, en tant qu'outils de communication, d'intégration et d'interaction avec la société du savoir, et d'ouverture sur les différentes cultures et sur les civilisations contemporaines. Il est créé un Conseil national des langues et de la culture marocaine, chargé notamment de la protection et du développement des langues arabe et amazighe et des diverses expressions culturelles marocaines, qui constituent un patrimoine authentique et une source d'inspiration contemporaine. Il regroupe l'ensemble des institutions concernées par ces domaines. Une loi organique en détermine les attributions, la composition et les modalités de fonctionnement». Il s'agit donc pour tous les Marocains d'un acquis historique de taille, arraché de haute lutte par les défenseurs de l'Amazighité et d'une reconnaissance claire et nette sans ambigüité aucune du caractère officielle de la langue amazighe, à côté de la langue arabe et dont la promotion en tant que telle incombe à tout le monde dont en premier l'Etat et ses institutions spécialisées dont le Conseil national des langues et de la culture marocaine. Pour y parvenir, des lois organiques doivent être adoptées pour définir la mission et les modalités de fonctionnement du Conseil national des langues et de la culture marocaine et déterminer à la langue amazighe ses nouvelles fonctions et sa position dans toutes les sphères de la vie de l'Etat. Il est également question, a-t-il dit, de débattre de la stratégie à poursuivre en matière de gestion de la diversité culturelle et linguistique dont le pays se réclame, sans choc aucun et sans appauvrissement du patrimoine du pays. Pour sa part, le ministre de la communication, porte parole du gouvernement, Mustapha El Khalfi a mis l'accent sur les réalisations accomplies dans ce domaine, précisant que le champ médiatique est un acteur principal dans la mise en œuvre des dispositions constitutionnelles relatives à l'officialisation de la langue amazighe. La constitutionnalisation de l'Amazigh en tant que langue officielle est régie par une loi organique, mais reste aussi liée à une politique d'information publique efficiente et agissante, a expliqué le ministre. Selon le ministre, le rôle des médias en la matière est axé sur la contribution à l'usage de l'Amazigh dans la vie publique, la promotion de la langue standard, la dimension visuelle liée au caractère Tifinagh, ainsi que sur l'officialisation de l'Amazigh dans le cadre de l'unité culturelle de la nation. Il a également fait état d'une véritable volonté de son département de procéder à la valorisation de l'information amazighe, en dépit des grands défis relatifs aux objectifs fixés dans le cadre du projet 2013-2016 pour la promotion de la chaîne amazighe. Il a également indiqué que son département a conclu différents accords de partenariat aussi bien avec l'IRCAM qu'avec des universités marocaines pour la formation et l'ouverture de filières dédiées à l'Amazighité dans son ensemble. Il a précisé de même que contrairement à la presse écrite, la presse électronique amazighe est très active et que les soutiens accordés aux productions cinématographiques amazighes sont de nature à contribuer à la promotion de ce secteur prometteur. Il a en outre rendu hommage à l'IRCAM pour les efforts consentis en matière de production de la littérature écrite amazighe et des instruments littéraires requis, précisant que l'IRCAM n'est plus en mesure de répondre à toutes les attentes et qu'il est temps de passer le relais au Conseil national des langues et de la culture marocaine, avant d'énumérer les progrès réalisés pour introduire l'usage de l'Amazigh dans la publicité. Pour sa part, le ministre de la culture, Mohamed Amine Sbihi a fait état des actions entreprises par son département pour donner corps aux lois organiques requises dans le sillage de l'officialisation de la langue amazighe et surtout de la création du Conseil national des langues et de la culture marocaine. Pour y parvenir, il a été procédé à la réactualisation des textes régissant notamment l'octroi des aides et subventions pour la création notamment en langue amazighe, à la signature d'accords de partenariat avec l'IRCAM, à l'organisation des festivals amazighs et la collecte et compilation des proverbes et autres adages rapportés par l'oralité amazighe. Un plan d'action pour les quelque années à venir a été déjà mis en place et un rapport scientifique de référence a été élaboré sur le statut des langues et la mission du Conseil national des langues et de la culture marocaine, chargé de concrétiser étape par étape le projet. Pour sa part, le secrétaire général du Conseil supérieur de l'enseignement, Abdellatif Moudni a appelé à la vigilance pour éviter de «bâcler» le travail devant être réalisé en matière d'élaboration des lois organiques nécessaires à l'officialisation de la langue amazighe et la mise sur pied du conseil national des langues et de la culture marocaine. Toute précipitation dans le cadre de ce processus est susceptible de faire rater au législateur marocain ce projet linguistique et culturel, jamais entrepris au Maroc, a-t-il mis en garde, appelant à rechercher dans ce domaine à améliorer la sécurité culturelle et linguistique du pays et à promouvoir la complémentarité souhaitée entre les composantes de cette mosaïque. Il faudra éviter de transformer l'enrichissement escompté à travers la promotion du multilinguisme en un processus d'appauvrissement du patrimoine national, a-t-il estimé, appelant à respecter une méthodologie claire et précise et à faire preuve de calme, de créativité, d'écoute et de patience au cours de l'élaboration des lois organiques concernés. Au-delà de ce travail laborieux, il faudra rejeter la tutelle des extrémistes de tout bord et des tenants des positions tendancieuses et politiciennes aussi bien sur le processus d'élaboration que sur les lois organiques attendues, sachant que le Conseil national des langues et de la culture marocaine ne peut être qu'un établissement autonome et indépendant pour jouer pleinement son rôle en matière de gouvernance du secteur dont il a la charge.