La voix de l'art plastique d'une génération ! Les souvenirs viennent par bribes déchiquetées ou par des ensembles, à travers lesquels le conteur nous présente à voir une géométrique et un aspect donné et indéfini. Quand ils sont en plus imprégnés d'une forte dose de nostalgie, ils font preuve d'une présence continuelle. C'est cette présence qui est mise en œuvre dans les tableaux destinés à cet effet par l'artiste Younès Amirouche. Découverte tardive, j'en conviens, mais une fois faite, c'est tout un pan d'années enfouies qui refait surface. Seul l'art et la création réussissent ce tour de force. Et de l'art, il y en a chez ce oujdi natif des années soixante, grandi comme nous tous dans le culte d'une culture empreinte de l'amour de vie via les chansons et livres. A voir sa technique mixte, mêlant un matériau fait d'objets divers et différents, mais toujours ayant trait au chant et à l'écrit, on se prend l'esprit dans un canevas d'images, de situations, de poses, dans une multitude de sensations qui rend l'actuel de la vision tel un plongeon dans le charme. C'est toute une vie qui vous vient en face. Voir une fameuse Françoise Hardy, celle d'un disque trente trois tours, comme sortie d'un rêve où le pinceau intervient en créant des touches colorées à côté ou tout près équivaut à un baiser d'admiration qui ne s'est jamais tari ou oublié. J'avoue que j'y ai pensé comme si c'était moi l'artiste. Oui, car il y a une identification impressionnante là-dessus. On croit même sentir chanter «Au temps d'amour». Le plus remarquable est que l'artiste semble l‘avoir recréé en la plaçant, elles et les autres figures mythiques de la douce variété française, dans un tableau dédié à la peinture avant tout. Ils sont comme peints selon la vision subjective de l'artiste, qu'on ne peut que partager avec délice. Ça fait partie du registre du commun senti, inspiré, vécu, imaginé mais que seul l'artiste arrive à faire émerger. Dans ce tableau (cf. à côté), ce tout mêlé est dessiné vers la moitié basse, laissant tout une partie, celle d'en haut libérée d'icones, on dirait un magma de mémoire avec ce brun illuminé. Tout le travail de B. Amirocuhe, consiste à creuser cette face de l'être en prise avec les images vives et immobiles qui l'entourent, où l'œil trouve sa place, ou un livre, une affiche, ainsi que des reproductions faites par la main qui crée d'objets captés, palmiers ou portes, yeux de femmes. Le tout avec un dosage d'ombres effacées et de lumières cadrées, avec un équilibre de couleurs vivantes qui charment par l'accentuation de l'effet et l'attirance. Ce sont même des scènes narratives à vrai dire. Les tableaux semblent narrer des histoires modernes, de nos temps. Cette contemporanéité fait l'originalité de la peinture de l'artiste. Il ne s'est pas embarrassé de la culture primaire, des origines ni de l'entourage sociétale, naïve ou autre, mais la culture du vécu universel que partage monsieur tout le monde un peu partout. L'artiste nous sort de l'exotisme tant suivi, copier, élevé comme l'une des seules alternatives dans l'art plastique marocain. Ca se fait toute en parfaite maitrise des arts plastiques, à la fois de manière savante, puisque le peintre est professeur des arts plastiques, et de façon créative du fait qu'il possède un monde propre, une vision personnelle et un démarche à part. Tout cela concourt à faire de Benyounès Amirouche une voix sincère d'une génération peu représentée par les pionniers....