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Mobilisation de la société civile des provinces du Sud marocain : Dynamique tribale et enjeux nationaux
Publié dans Albayane le 14 - 12 - 2011

La vie politique au sein des provinces du Sud marocain a été, ces dernières années, marquée par l'émergence d'une nouvelle catégorie d'acteurs. Cette avancée significative en termes de renouvellement des élites, se matérialise, depuis quelque temps déjà, par la multiplication d'organismes issus de la société civile, s'impliquant activement dans la gestion de la chose publique.
Nous tenterons à travers cette contribution, de voir si ce renouvellement des élites est susceptible de solutionner, même partiellement, les dysfonctionnements qu'a pu connaître le Conseil Royal Consultatif des Affaires Sahariennes (CORCAS), et s'il est une sorte de prélude à sa restructuration.
Un grand nombre d'entités ont donc récemment été créées, dans le but de remplir une double mission. La première étant naturellement la défense de l'intégrité territoriale nationale, et la seconde se rapportant à la bonne gouvernance locale. Ainsi, l'Organisation Démocratique Sahraouie pour le Pluralisme (ODESA), dont le congrès constitutif a été annoncé en date du 24 juillet 2011, à Laâyoune, et dont la mise en place a été rapportée par la presse marocaine arabophone, et relayée ensuite par le magazine hebdomadaire marocain Actuel, prendra la forme d'une «coordination nationale des tribus et des Organisations Non Gouvernementales (ONG) pour le Sahara ». Citons également le Mouvement Mondial pour le Soutien du Sahara Marocain, dont le premier congrès a eu lieu à Laâyoune également, le 24 juillet 2011, et dont les objectifs principaux sont de «(…) faire connaître la justesse et la légitimité de la marocanité du Sahara, au niveau régional et international, et de mettre la lumière sur les projets de développement réalisés dans les provinces du Sud, afin d'encourager les investissements dans la région».
Notons que ces entités cherchent à bénéficier le plus souvent, de par la forme qu'elles prennent, d'une double légitimité, traditionnelle et internationale. Ainsi, le facteur tribal assoit une conception traditionnelle selon laquelle les hommes se définissent par leur culture et leur appartenance à une communauté, tandis que la participation d'associations, d'ONG, ou de ressortissants marocains originaires des provinces du Sud récupérées, basés en Europe pour la plupart, laisse penser que ces organisations chercheraient à acquérir une dimension supranationale, allant dans le sens de la promotion d'une certaine conception des relations internationales, comme moyen de socialisation.
Force est de constater que ces organisations s'avèrent être parmi les premières, issues de la société civile, dont la vocation originelle est de s'affirmer en tant qu'acteurs à part entière, dans la gestion du conflit du Sahara, œuvrant dans une perspective unioniste. En effet, le Mouvement Mondial pour le Soutien du Sahara Marocain, à affirmé, à travers la personne de son président fondateur, Mustapha Abidar, le 24 juillet 2011, au cours du Congrès précité, que «(…) la création de cette organisation civile indépendante intervient pour renforcer la diplomatie parallèle et intensifier l'implication de la société civile marocaine (…) à la promotion de la proposition marocaine d'autonomie». De plus, leur engagement dans les affaires nationales est avéré, comme le démontre l'appel à voter en faveur de la Constitution du Royaume, lancé au cours d'une réunion préparatoire de l'ODESA, tenue le 25 juin 2011 à Laâyoune, par les représentants des quelques 19 tribus présentes, les plus représentatives du Sahara ; ou encore la Ligue des Partisans de l'Autonomie du Sahara, qui a réitéré, lors d'une déclaration faite à Rabat le 21 juillet 2011, et relayée par l'agence Maghreb Arabe Presse (MAP), «(…) sa pleine adhésion à la transition démocratique au Maroc et au contenu de la nouvelle Constitution en termes de consécration des droits de l'Homme et de promotion du dialecte hassani et de la culture sahraouie».
Ainsi, ces organismes affirment la volonté d'inscrire leur action dans une dynamique réformiste nationale, formulant pour ce qui est de l'ODESA, «Le souhait de faire de la nouvelle Constitution une base pour l'édification d'un cadre démocratique ouvert, se basant sur le pluralisme et la garantie des spécificités régionales». Il y a donc une transcendance de la simple organisation intertribale, se manifestant par l'appui apporté à une cause nationale, et qui témoigne par la même occasion, de la capacité d'adaptation du modèle tribal à un contexte étatique moderne. En effet, l'expérience historique commune des tribus sahariennes et de l'Etat, a permis un rapprochement significatif entre eux, prenant la forme notamment, d'un partage des tâches sociales et politiques, facilité par une complémentarité structurelle. Cette complémentarité est rendue effective par un contexte socio-politique favorable, l'Etat central et les tribus ayant mis en place une stratégie commune à long terme. De plus, parmi les règles qui fondent l'unité nationale, qui n'est aucunement antinomique de l'expression des particularismes locaux, on retrouve la dimension pacifique et conciliatrice socialement attachée à l'administration du domaine spirituel. En outre, la nation, comme conception très ouverte fondée sur l'adhésion, est sous-tendue par la volonté de vivre ensemble.
Plusieurs organismes issus de la société civile ont également affirmé leur intention de participer à la moralisation de la gestion des affaires publiques sahariennes, en exigeant la reddition de comptes aux dirigeants qui auraient participé à la création d'une situation de crise socio-économique au Sahara, qui toujours selon la presse, serait liée au tribalisme.
Il convient de relativiser ces propos, qui font peu de cas des spécificités du système tribal marocain, et de l'importance des particularismes régionaux. De cette manière, compte tenu de l'actualité du fait tribal dans le Maroc contemporain, la forme revêtue par les interactions intertribales, s'apparente à une coopération ethnolignagère, dont les fondements sont la prépondérance de la coutume, de la filiation et des associations tribales. Le tribalisme est de manière indiscutable inhérent à la région saharienne, comme le confirme l'ancrage ancestral de ses structures, réparties en trois confédérations de tribus, le groupe des Rguibat, celui des Tekna et celui des Oulad Dlim, qui constituent aujourd'hui encore, les unités de base de l'organisation sociale et de l'organisation politique dans la région. Notons que ces deux niveaux d'organisation sont ici interdépendants, du fait des fortes imbrications de la parenté et du champ politique dans ce cadre tribal.
L'implication de ces entités tribales, autre facteur œuvrant dans le sens de la préservation de l'unité nationale, qui se réalise par la mise en valeur de la mosaïque tribale saharienne et des spécificités socio-historiques de chacune de ses composantes, prend deux formes. D'une part la représentation de ces dernières par leurs notables, puisque les tribus bénéficient par le biais de leurs «chioukhs» et des grandes divisions tribales d'une redistribution du pouvoir, accordée par les autorités centrales. D'autre part, des représentants des tribus participent aux activités institutionnelles nationales, et dans ce cadre, il conviendrait d'éviter tout amalgame entre la dynamique tribale binaire caractérisant l'activité politique, en ce sens que la tribu ne se définit pas seulement par ce qu'elle est, mais aussi par son environnement tribal, et les luttes partisanes pour le pouvoir personnel. Suivant cette logique, la tribu peut être définie comme «(…) un collectif qui assure la cohésion de ses membres au travers d'un sentiment d'appartenance renforcé par de nombreux liens de natures diverses (religion, traditions communes, langue) (…) c'est avant tout une entité qui lutte pour survivre. (…) les logiques tribales sont une manière d'être de la tribu, fondée sur une communauté de langage, de symboles, d'affects (…)».
Ainsi, bien que la création quasi-simultanée de deux associations, l'«Association des Elus du Sahara» et l'«Association des Parlementaires des Provinces du Sud», respectivement les 22 et 30 janvier 2011, affiliées à deux formations politiques distinctes, puisse être interprétée comme l'expression d'une lutte entre partis politiques, celle-ci relève en fait de cette dynamique tribale singulière. En effet, c'est un moyen pour certaines tribus d'encadrer les élus des provinces du Sud, pour faire valoir leurs revendications propres, notamment en matière de préservation de l'intégrité territoriale et de l'unité nationale.
Il apparaît donc clairement qu'il n'existe aucune opposition entre le fait tribal et l'Etat, dans sa conception moderne. Bien au contraire, la tribu peut être considérée comme un levier dans le domaine du développement, puisque sa «survie» en tant qu'entité traditionnelle, l'amène à régulièrement opérer des changements au niveau local. De plus, les tribus sahariennes remplissent un rôle essentiel, compte tenu de la symbolique qu'elles véhiculent, notamment en mobilisant les solidarités au sein de l'Etat.
Par ailleurs, l'unité nationale est sous-tendue par une interprétation commune de l'histoire du pays, assimilée par l'Etat et les entités tribales, ces dernières ayant démontré à maintes reprises leurs liens historiques avec le Maroc, aussi bien au niveau juridique que social ou religieux. L'attachement indéfectible des tribus sahariennes à l'unité nationale ayant pour corollaire la reconnaissance et la mise en valeur de leurs particularismes, qui, loin de porter préjudice à cette unité, contribuent à la renforcer, en raison de l'absence de toute opposition entre l'intérêt national et les intérêts identitaires propres des provinces du Sud.
Et c'est au nom de la promotion de cette unité nationale qu'est né le CORCAS, héritier de la tradition consultative maroco-musulmane, et dont la composition prend en compte l'ensemble des tribus du Sahara. Ce Conseil consultatif a établi une feuille de route qui lui a permis de participer à la mise en place du Projet Marocain d'Autonomie, qui prend en considération les spécificités culturelles, historiques et économiques des provinces du Sud. Les compétences lui étant dévolues par le dahir, référencé 1-06-21, portant sa création, du 25 mars 2006, sont nombreuses et diversifiées, de telle sorte que le CORCAS est amené à exercer trois fonctions différentes : une fonction de représentation qui tend à rendre la gestion des affaires sahariennes plus proches des populations des provinces du Sud, une fonction purement consultative doublée d'une capacité d'engager une politique de proximité dans le large cadre de ses compétences, et enfin la mission extrêmement importante de la défense, au niveau international, de l'intégrité territoriale du Royaume.
De ce fait, les tribus sahariennes, à travers leurs élus et leurs «chioukhs», les acteurs associatifs et les représentants des ressortissants marocains originaires du Sahara marocain récupéré résidant à l'étranger, participent conjointement à la concrétisation d'une politique participative et démocratique dans la région.
Mais bien que ce Conseil ait été pensé pour répondre de manière optimale aux besoins des citoyens marocains originaires du Sahara occidental, il n'en demeure pas moins que son mode de fonctionnement interne ait été sujet à bon nombre de critiques. En effet, des luttes personnelles intestines ont mis à mal l'efficacité du CORCAS dans les missions qui lui incombaient. De même que la prépondérance du président de ce Conseil a conduit
plusieurs observateurs à s'interroger quant à la représentativité effective des diverses composantes sahraouies en son sein.
Ainsi, si l'on considère tous les points abordés précédemment, on constate qu'une dynamique nouvelle est en marche. Il s'agit d'un processus de renouvellement des élites locales du Sahara, puisque de plus en plus d'organismes semblables à l'ODESA tendent à émerger, la société civile sahraouie se mobilisant, dans le but de participer activement à la bonne gouvernance de la région.
Allant dans ce sens, le Souverain marocain a fait part, dans son discours adressé à la nation à l'occasion du 34ème anniversaire de la Marche Verte, le 6 novembre 2009, confirmé par le discours du trône du 30 juillet 2010, de l'engagement national pris dans le but d'assurer «La restructuration du Conseil Royal Consultatif des Affaires Sahariennes (CORCAS), dans la perspective de la fin de son mandat. Il s'agira de revoir sa composition et de renforcer sa représentativité en assurant son ouverture sur de nouvelles élites compétentes et patriotiques». Cette énergie novatrice semble annoncer un avenir meilleur pour le CORCAS, et servira notamment à accroître son efficacité dans la mobilisation nationale autour de la question du Sahara, au moyen de la garantie d'une réelle représentativité des tribus et de la société civile.
*Analyste au Centre d'Etudes Internationales
Le Centre d'Etudes Internationales (CEI) est un groupe de réflexion et d'analyse basé à Rabat. Acteur actif du débat afférent à la conflictualité saharienne et à certaines thématiques nationales fondamentales, le CEI a publié, en 2010, auprès des éditions Karthala, un ouvrage collectif intitulé : « Une décennie de réformes au Maroc (1999-2009) ». En janvier 2011, le CEI a rendu public, auprès du même éditeur, un second ouvrage titré, « Maroc-Algérie : Analyses croisées d'un voisinage hostile ». Il vient également de faire paraître, auprès des éditions précitées, un ouvrage portant sur « Le différend saharien devant l'Organisation des Nations Unies ». Outre ses revues, libellées, « ETUDES STRATEGIQUES SUR LE SAHARA » et « La Lettre du Sud marocain », le CEI compte par ailleurs à son actif plusieurs supports électroniques parmi lesquels figurent, www.arsom.org, www.saharadumaroc.net, www.polisario.eu et www.ibn-khaldoun.com.


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