Plus positifs et plus conciliants que lors de la réunion du mardi 22 mai, les membres de la Commission des affaires étrangères, de la défense nationale, des affaires islamiques et des Marocains résidant à l'étranger relevant de la Chambre des représentants, toutes tendances confondues, ont poursuivi, hier, l'examen du projet de loi N° 01.12 relatif aux garanties fondamentales, accordées aux militaires des Forces armées royales en attendant que le Conseil national des droits de l'homme (CNDH) ne donne son avis consultatif sur la question. D'après les interventions des membres de la Commission, l'article 7 du projet de loi en question, tel que formulé, ne peut pas faire l'unanimité de tous étant donné que les avis divergent sur sa conformité ou non avec les dispositions de la Constitution et des engagements internationaux du Royaume en la matière ainsi qu'avec les recommandations de l'Instance Equité et Réconciliation (IER). Nombre de députés ont recommandé d'approfondir le débat à ce sujet et de charger si c'est nécessaire une sous commission de l'élaboration d'un nouveau texte, qui ferait l'unanimité de toutes les parties concernées y compris les acteurs de la société civile et des organisations des droits humains. Saisi par le parlement, le CNDH a en effet organisé, samedi dernier, un atelier, à l'issue duquel un certain nombre de critiques ont été émises au sujet de la non-conformité des dispositions de l'article 7 de ce projet aux conventions internationales et engagements internationaux du Maroc en matière des droits humains. Des intervenants auraient même appelé à la révision de cet article tout en proposant l'organisation mercredi au siège du CNDH d'une journée d'étude avec la participation du gouvernement et des groupes parlementaires. Selon des experts ayant pris part à cet atelier, les dispositions de l'article 7 telles que formulées doivent faire l'objet d'un amendement, pour qu'elles soient conformes aux conventions internationales et à la nouvelle Constitution dans le but de ne pas faire bénéficier les militaires des FAR de l'impunité. Pour le CNDH, il est également nécessaire de tenir compte dans le cadre de ce dossier des recommandations de l'IER, visant notamment à protéger l'ensemble des citoyens de tout excès ou abus, à éviter que des responsables militaires ou civiles ne se sentent au dessus de la loi et à mettre en place le dispositif législatif nécessaire à cette stratégie. Exprimant son avis à ce sujet, la Coalition marocaine des organismes des droits humains indique dans un communiqué que "ce projet constitue un danger quant à ses dispositions explicites visant à légitimer l'impunité, l'atteinte aux libertés et la menace de la sécurité et de la vie des citoyens et qu'il ne respecte ni les normes internationales des droits humains ni la Constitution et les recommandations de l'Instance Equité et Réconciliation, ni les revendications des organisations des droits humains nationales et internationales". La Coalition appelle à cette occasion le gouvernement et le parlement à "assumer leur responsabilité historique et à s'opposer à toute légitimation des règles d'impunité en apportant au projet des modifications substantielles qui constitueraient les jalons du respect de la légitimité de la loi et de l'Etat de droit". Selon la Coalition, il est nécessaire d'amender le projet en question dans le but de "relier l'absence de responsabilité pénale lors de l'exécution des ordres reçus sur le territoire national avec le respect des règles de la Constitution et des garanties des droits humains et que l'ordre reçu ne soit pas contraire à la législation internationale et aux normes onusiennes quant à l'usage de la force publique". Pour la Coalition, “l'émission des ordres et leur exécution doivent être en conformité avec les règles professionnelles et de responsabilité dévolues aux militaires pour la protection des habitants civils durant la paix et la guerre et veiller à ce que l'Etat respecte ses engagements quant à la prohibition de la torture et la protection des personnes contre la disparition forcée et autres violations graves des droits humains qui ne peuvent être justifiées en aucune circonstance”. Le texte doit également “stipuler explicitement que les militaires doivent se conformer aux normes incitant au respect des droits, de la dignité des personnes et de l'inviolabilité des biens publics et privés”, ajoute le communiqué, ajoutant que le projet doit stipuler de même “ que les militaires se doivent de respecter le principe de proportionnalité lors de l'émission des ordres d'usage de la force et pendant leurs exécutions et que tout usage de la force excédant les moyens nécessaires pour atteindre l'objectif légitime dans le cadre de l'Etat de droit implique la responsabilité des donneurs d'ordres ou des exécutants selon chaque cas”. En outre, poursuit le communiqué “les violations des droits humains et les infractions à la loi ne doivent aucunement avoir lieu sous prétexte du respect de la discipline militaire”. Ce débat se focalise surtout sur l'article 7 de ce projet, lequel stipule que “Ne sont pas pénalement responsables les militaires des Forces armées royales qui, en exécution des ordres reçus de leur hiérarchie, dans le cadre d'une opération militaire se déroulant sur le territoire national, accomplissent normalement leur mission. “A cet égard, et conformément aux dispositions législatives en vigueur, les militaires bénéficient de la protection de l'Etat contre les menaces, poursuites, violences, voies de fait, injures, diffamation ou outrages dont ils peuvent être l'objet à l'occasion, pendant et après l'exercice de leur fonction. “Les conjoints, enfants et ascendants directs des militaires bénéficient de la même protection de l'Etat lorsque, du fait des fonctions de ces derniers, ils sont victimes de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamation ou outrages. “Ne sont pas également responsables les militaires, qui dans le respect des règles du droit international humanitaire et dans le cadre d'une opération militaire se déroulant à l'extérieur du territoire national, accomplissent normalement la mission pour laquelle ils ont reçu mandat”.