Pour la première fois depuis neuf mois, un attentat-suicide a frappé lundi Israël, faisant quatre morts dont le kamikaze palestinien, qui s'est fait exploser devant une boulangerie de la station balnéaire d'Eilat, ville la plus méridionale de l'Etat hébreu, jusqu'ici épargnée par les attentats. L'attentat, justifié par le Hamas au gouvernement qui y voit "une réponse naturelle" à la politique israélienne, a été revendiqué conjointement par le Jihad islamique et les Brigades des martyrs d'Al-Aqsa. Les deux organisations ont expliqué vouloir rappeler aux militants du Hamas et du Fatah du président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas s'affrontant dans la Bande de Gaza qu'il fallait "tourner les armes vers l'occupation". Les combats interpalestiniens ont fait plus de 60 morts dans le territoire depuis décembre et tué encore quatre personnes lundi. Les autorités israéliennes ont averti que l'attentat risquait de remettre en cause les deux mois de trêve à Gaza. Le Premier ministre Ehoud Olmert a promis de continuer "le combat en cours et sans fin contre les terroristes". Son ministre de la Défense Amir Peretz a réuni en urgence les responsables de la sécurité. "Il est clair que des groupes extrémistes font tout ce qu'ils peuvent pour mettre fin à la trêve", a-t-il noté, promettant de prendre "les mesures nécessaires". "C'est un événement grave, c'est une escalade, et nous le traiterons comme tel". L'explosion a secoué dans la matinée la tranquillité d'Eilat, au bord de la mer Rouge, près des frontières égyptienne et jordanienne. Séparée des grandes villes israéliennes par des centaines de kilomètres de désert, cette station touristique prisée des Israéliens avait jusque-là été épargnée par le conflit israélo-palestinien. Le jeune homme s'est fait sauter devant la boulangerie d'un quartier résidentiel. Des témoins ont dit ensuite l'avoir remarqué parce qu'il portait un long manteau d'hiver peu adapté à cette douce journée ensoleillée. D'après la police, il tenait la bombe dans un sac et non une ceinture d'explosifs, d'ordinaire utilisée par les kamikazes. Toujours selon la police israélienne, il serait entré en Israël via l'Egypte, qui possède une longue frontière désertique et relativement peu protégée avec l'Etat hébreu. Le Jihad islamique avait affirmé qu'il était passé par la Jordanie, ce qu'Amman a démenti. A Beit Lahiya, dans le nord de la Bande de Gaza, une foule s'est rassemblée devant le domicile du kamikaze pour fêter l'attentat. Selon le Jihad islamique, l'homme qui portait la bombe s'appelait Mohammed Siksik, il avait 20 ans et venait de Gaza, et non de Cisjordanie évoquée dans un premier temps. D'après sa famille, il était parti de chez lui il y a trois jours. Les proches du jeune homme, dont le frère est un militant important du Djihad islamique, ont expliqué qu'il était au chômage et avait perdu récemment sa petite fille emportée par une maladie. Son meilleur ami avait été tué dans un accrochage avec les forces israéliennes. C'est le second attentat-suicide perpétré en Israël depuis que le Hamas a remporté les législatives palestiniennes du 25 janvier 2006. Le Mouvement de la résistance islamique avait apporté son soutien au premier attentat qui avait frappé un restaurant de Tel Aviv le 17 avril dernier. Fawzi Barhoum, porte-parole du Hamas à Gaza, a justifié lundi l'attentat d'Eilat comme une "réponse naturelle" aux opérations de l'armée israélienne dans les territoires palestiniens ainsi qu'au boycott par Israël du gouvernement dirigé par le mouvement islamiste. "Tant que dure l'occupation, la résistance est légitime", a-t-il jugé. "La bonne chose, c'est que les armes du Fatah soient dirigées vers l'occupation, pas vers le Hamas". Un porte-parole du Fatah, Ahmad Abdul Rahman, a condamné en revanche l'attentat-suicide. "Nous sommes contre toute opération qui prenne pour cible des civils, israéliens ou palestiniens", a-t-il rappelé, même si les Brigades des martyrs d'Al-Aqsa, qui ont revendiqué également l'attentat, sont considérées proches du parti de Mahmoud Abbas. A Washington, la Maison Blanche a condamné l'attaque et prévenu qu'elle tenait le gouvernement Hamas pour responsable. "L'incapacité à agir contre le terrorisme affectera inévitablement les relations entre ce gouvernement et la communauté internationale et portera atteinte aux aspirations du peuple palestinien à un Etat à eux", a fait savoir la présidence américaine.