Arrêté au port d'Algésiras en novembre 2010, un jeune franco-marocain a été condamné à huit ans de prison pour trafic de stupéfiant et terrorisme. Mustapha Naïm, Lyonnais, purge sa peine dans une prison casablancaise. Jusqu'à ce jour, il nie tous les faits qui lui sont reprochés. Une affaire dont le fil conducteur semble entrecoupé. El Mustapha Naïm, un jeune français d'origine marocaine est détenu depuis seize mois dans le cadre d'une condamnation à huit ans dans la prison d'Oukacha à Casablanca, a révélé le blog Vox Maroc, lundi 27 février. Mustapha a été arrêté le 1er novembre 2010, alors qu'il retournait en France après un séjour avec sa femme à Mohammedia, sa ville natale. C'est au port d'Algésiras que le jeune homme est interpellé par des hommes en civil dont l'un lui demande de le «suivre pour des vérifications», rapporte Le Progès.fr. Mustapha méfiant aurait hésité jusqu'à ce que les individus s'emparent de lui de force le menottent et l'embarquent dans le bateau d'une compagnie espagnole, accompagné de son épouse, direction Tanger. Enceinte de huit mois, l'épouse de Mustapha a assisté à la scène incapable de venir en aide à son mari. «Ils ont pris chacun une jambe, un bras et l'ont traîné par terre. Moi, je criais sans comprendre ce qui se passait ! […] On ne nous donnait aucune explication sauf que quelqu'un portait le même nom que lui», raconte-t-elle. Arrivé à Tanger, le couple est séparé. Mustapha est embarqué dans une camionnette sous le regard de son épouse. Torture ? A VoxMaroc, Mustapha a pu raconter sa sombre expérience. «Pendant le trajet, je n'ai pas cessé de m'inquiéter du sort de ma femme, ils m'ont dit qu'ils l'avaient mise dans un taxi pour aller chez des membres de la famille à Tanger», raconte El Mostafa. «Avant d'arriver au péage de Rabat, ils m'ont mis un bandeau sur les yeux et m'ont obligé à me baisser. […] Je ne saurais dire exactement pendant combien de temps, peut-être 5 minutes. Une fois arrivés à destination, les policiers qui m'escortaient n'ont même pas franchi le portail de la prison, ils m'ont confié à une autre équipe. […] Pour entrer dans l'enceinte, je devais baisser la tête, je n'ai pas compris pourquoi.», raconte Mustapha Naïm, dans son interview. Il est visiblement transféré dans un centre de détention à Temara. «On ne me reprochait rien de particulier pendant les interrogatoires, ils ont parlé de trafic de drogue, de terrorisme, ils prêchaient le faux pour savoir le vrai. J'ai été tabassé, électrocuté et filmé. Ils m'ont apporté des vêtements propres qui étaient dans mon coffre, j'ai donc compris que ma voiture était à Temara aussi», relate-t-il. La torture aurait duré 10 jours. Pendant ces dix jours, personnes n'avait aucune nouvelle de lui. «Je paniquais, je n'avais aucune nouvelle. J'ai écrit des courriers aux ministères, à tout le monde», raconte sa femme, qui recevait des réponses selon lesquelles son mari n'était plus au Maroc. Et la justice dans tout ça? Dans de cette affaire, les zones d'ombres sont multiples. Après la détention secrète, Mustapha a été placé en garde à vue par la PJ de Casablanca pour trafic de stupéfiants. Mis en examen, il est condamné fin 2011 par un tribunal marocain à huit ans de prison. En France, maitre François Heyraud, ne pouvant pas intervenir dans la procédure lui trouve cependant une faille : la disparition de son client pendant dix jours n'est mentionnée nulle part dans son procès-verbal. Le passeport d'El Mustafa porte bien le tampon de sortie du sol marocain le 1er novembre et aucune entrée depuis. Pour les autorités marocaines, M. El Naïm a été arrêté le 10. Pourquoi n'existe-t-il aucune trace de ces dix jours ? Pourquoi le PV fait-il état d'une arrestation à Mohammedia et non en Espagne ?, interroge son avocat. Le 10 janvier, François Heyraud a porté plainte contre X pour enlèvement et séquestration et pour faux en écriture publique et usage de faux. Mustapha est également soutenu par l'Association de défense des droits de l'homme au Maroc (Asdhom) qui considère que la démarche employé par la justice marocaine n'est pas claire. Contacté par Yabiladi, Abid El Kharttabi, président de l'Asdhom s'indigne : «Les circonstances de son arrestations déjà ne sont pas conformes à la loi. On le condamne pour trafic de drogue, alors que d'après le témoignage de sa femme, on a fouillé sa voiture et on n'a rien trouvé. Sur quelle base est-il condamné ? On lui a fait signer un PV en arabe, alors qu'il ne sait pas lire l'arabe». «On parle aussi de terrorisme, comme dit sa mère, c'est quelqu'un qui ne fait même pas sa prière. Il n'est pas pratiquant», a-t-il ajouté. Pour l'heure, Mustapha est toujours en prison et espère que la France intervienne pour sa libération. Au Maroc, nous n'avons pas pu joindre les autorités compétentes au ministère de la Justice.