En 2015, le Maroc avait clairement soutenu la candidature de Muhammadu Buhari lors de l'élection présidentielle. Cette année, ce soutien s'exprime via le ralliement de la zaouïa Tijaniya au président sortant. Après un report d'une semaine, l'élection présidentielle au Nigéria aura lieu samedi 23 février. Les Nigérians auront à choisir entre deux candidats : le président sortant Muhammadu Buhari, du parti du Congrès des progressistes (APC) et Atiku Abubakar, du Parti démocratique populaire (PDP). Le scrutin de cette année constitue encore une entorse à une tradition établie depuis des années au Nigéria. En effet, les deux prétendants à la magistrature suprême sont de confession musulmane et originaires du nord du pays. La rotation avec les chrétiens du sud n'aura donc pas lieu cette fois. Pour le Maroc, cette élection est cruciale dans la consolidation de ses relations politiques et économiques avec ce grand Etat d'Afrique. A deux jours du scrutin, le royaume préfère se montrer discret. Il n'a pas clairement affiché sa préférence à la candidature de Buhari comme en 2015. Pour mémoire, le roi avait rejeté une demande d'entretien téléphonique avec l'ex-président nigérian, Goodluck Jonathan. L'appui de la confrérie Tijaniya à Buhari Le souverain «n'a pas jugé opportun d'accéder à cette demande du fait que la démarche soit liée à des échéances électorales importantes dans ce pays (…) La demande des autorités nigérianes s'apparente plus à un acte de récupération de l'électorat musulman de ce pays qu'à une démarche diplomatique normale», expliquait le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué. Si aujourd'hui Rabat n'a pas proclamé sa préférence entre Muhammadu Buhari et Atiku Abubakar, une autre partie l'a fait à sa place. Le 11 février, soit seulement cinq jours avant la date initiale des élections, le Mouvement soufi Tijani a demandé publiquement à ses fidèles de voter en faveur du président sortant. «Il a été testé et on peut lui faire confiance pour un deuxième mandat», affirmait son président, Timasaniyu Ahmed-Rufai, dans un communiqué. La confrérie compte parmi ses adeptes, Muhammad Sanusi II, l'émir de la région de Kano, une véritable autorité religieuse, politique et économique au Nigéria, considérée proche du Maroc. D'ailleurs, il est l'une des voix soutienant l'adhésion du royaume à la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Cet appui de la tariqa Tijaniya à la candidature de Buhari n'est pas une surprise. Le président sortant a multiplié les gestes d'ouverture en direction de la zaouïa. En novembre 2016, il recevait une délégation marocaine de la confrérie conduite par son chef Mohamed Kabir Ibn Mohamed. Au cours de la rencontre, il a demandé l'appui des religieux du royaume à la diffusion de messages de paix auprès de la population. En juin 2018, il déroulait le tapis rouge à Abuja au Sénégalais khalife général, cheikh Ahmed Tidiane Niasse, une autre figure proche du Maroc. La religion est fortement présente au scrutin du 23 février. Outre l'appui des Tijanis, Buhari peut espérer un ralliement des évangélistes chrétiens à sa candidature grâce à son vice-président, Yemi Osinbajo, qui fut un pasteur évangélique.