Nombre de médias marocains continuent à citer le site Numbeo comme une source crédible. Deux d'entre eux relayent ce mercredi un nouveau «rapport annuel sur l'indice global du crime». Mais que vaut la crédibilité de ce rapport basé sur les estimations d'une centaine d'internautes ? Des médias électroniques rapportent aujourd'hui que le Maroc serait classé cinquième parmi les pays arabes et 37ème mondial sur 118, selon un Global Crime Index 2019. Ce dernier, qui aurait mesuré le taux de criminalité dans le monde, est rendu public par «la célèbre base de données Numbeo», indique la version arabophone de 2m.ma. Le média rapporte que le royaume occuperait la douzième position en Afrique. Il souligne que plusieurs critères auraient été retenus dans ce classement, citant le nombre de meurtres, de vols, de cambriolages et viols. La plateforme Numbeo note ensuite les pays selon un baromètre allant de 0 à 100, soutenant que plus le score est proche du nul zéro, plus le taux de criminalité est faible, poursuit le média. Pour sa part, le site Al3omk indique que «selon la dernière mise à jour au mois de janvier (Numbeo), l'indice de la criminalité au Maroc est modéré, le pays étant noté à 50,24 / 100 ; il enregistre par ailleurs une hausse de 71,68 points des crimes de malversation et de corruption». Des estimations plutôt qu'un sondage scientifique Ce qu'il faudrait cependant savoir sur la plateforme Numbeo qui aurait supervisé «l'étude» sur laquelle se base ledit indice, c'est qu'elle se base seulement sur les points de vue de ses visiteurs, sans aucune approche scientifique ou procédé de croisement des données. Le classement du Maroc a été déterminé par seulement 248 internautes. Autre fait saillant concernant ce classement, son déphasage avec des faits réels ou des constats d'organisations internationales reconnues, notamment celles de l'ONU. Ainsi, selon Numbeo, certains pays connaissant des instabilités politiques ou des tensions armés, tel que l'Irak, occupent des places plus avancées que d'autres, comme l'Algérie ou encore la France. Le Maroc est en réalité 71e mondial Contrairement au classement de Numbeo, le dernier «Global Peace Index», plus crédible en terme d'approche scientifique, se base annuellement sur des données recoupées. Il est publié à Londres par le magazine The Economist, avec la participation d'experts et membres d'instituts de recherche, en collaboration avec le Centre for Peace and Conflict Studies relevant de l'Université de Sydney (Australie). La dernière édition de ce classement est sortie en juin 2018, plaçant le Maroc à la 71e position mondiale sur 163 pays, dont le degré de paix est passé au peigne fin. Pour étudier ainsi les situations de paix de 99,7% de la population mondiale, la méthodologie du Global Peace Index repose sur trois axes principaux : l'engagement ou non des pays dans des conflits locaux, régionaux et internationaux, le degré d'harmonie ou de tension internes, de même que le degré de militarisation. Plus de 24 sous-indices entrent en ligne, notamment la sûreté et la sécurité au sein de la société, les guerres internes ou externes connaissant la participation des Etats évalués, les estimations sur le nombre de morts liées aux conflits armés, le niveau des tensions internes, les relations avec les pays voisins, le niveau de confiance des citoyens, la stabilité politique, le respect des droits humains, le nombre global de prisonniers, le nombre de meurtres, les manifestations violentes, ainsi que pourcentage de dépenses militaires par rapport au PIB, ou encore le nombre de membres des forces armées. Ce n'est pas la première fois que des médias marocains sont les victimes collatérales des classements de Numbeo. En 2016, la plateforme a même estimé que Casablanca était la cinquième ville la plus polluée au monde. Au point qu'un quotidien arabophone marocain avait qualifié la plateforme de «centre américain de renommé, spécialisé dans l'étude du niveau de vie, de la sécurité, de la pollution et de l'environnement».