Le cheval est aujourd'hui devenu au Maroc une passion féminine. Les fantasias sont un excellent exemple témoignant de cette féminisation. Lors d'un moussem ou d'un festival présentant une fantasia, il est très fréquent de voir des cavalières décharger majestueusement leurs armes. A l'origine, la fantasia ou la tbourida est plutôt une affaire d'hommes puisqu'il s'agit d'une technique de guerre développée par les Arabes pour surprendre l'ennemi. Cette technique a été, par exemple, utilisée par les soldats arabes pour conquérir l'Espagne au 8e siècle. Aujourd'hui la fantasia est devenue un sport et un spectacle qui attire bon nombre de spectateurs conquis. Les chevaux les plus utilisés sont le barbe et l'arabe barbe. La fantasia repose sur deux étapes principales : la charge rapide et la retraite subite. Les cavaliers lancent leur cheval en même temps en tenant la bride d'une seule main et de l'autre main, ils font tourner au dessus de leur tête leurs fusils. Ensuite ils se lèvent et tirent en même temps en l'air, font demi- tour et repartent aussi rapidement qu'ils sont venus. Auparavant, les femmes accueillaient les cavaliers avec des you-yous. Aujourd'hui, elles contribuent à la tradition et assurent le spectacle. Othman Essakali, journaliste et réalisateur de films documentaires a eu l'opportunité d'approcher de très près les membres de la toute première troupe féminine de fantasia, il y a cinq ans de cela. Il a réalisé un documentaire avec des images somptueuses sur ces femmes intitulées «Les Rebelles de l'Atlas», un film diffusé par la chaîne Equidia et dans différents festivals du monde. Il les a suivi lors de leurs entraînements, dans leur famille et lorsqu'elles assistent à des fantasias masculines. «Ce film a été tourné trois ans après l'entrée en vigueur de la Moudawana pour mieux comprendre son impact sur la vie de ces femmes qui décident d'exercer un sport d'homme», explique Othman Essakalli. Dans le film, Lalla Amina, présidente de la Fédération royale marocaine des sports équestres, accorde une interview à l'équipe. Elle raconte l'histoire de la création de la toute première troupe féminine de fantasia à Mohammedia en 2005. Un jour, une femme, dont le père est éleveur de chevaux et cavalier de fantasia est venue voir la princesse en lui expliquant qu'elle et des amies souhaitaient monter et participer à des spectacles de fantasia. La princesse leur a donné un coup de main et, dès l'année suivante, elles ont pu participer à des fantasias. Aujourd'hui elles ont leur propre championnat féminin. Othman Essakali souligne également un point intéressant dans le film. Certaines jeunes filles craignent que leur futur mari ne leur interdise de monter à cheval. L'une d'elle l'explique parfaitement en déclarant que son futur époux devrait lui aussi aimer les chevaux et être un cavalier. Le film dénonce également un certain machisme et une jalousie de la part des cavaliers. Dans une scène, trois jeunes cavalières assistent à un festival de fantasia et ont une envie spontanée de monter à cheval et d'accompagner certaines troupes. Ce n'est pas chose facile. Après avoir essuyé plusieurs refus, elles finiront par trouver une troupe qui les accepte. Les jeunes filles font leur show et sont au final très applaudies par les spectateurs.