La discrimination qui touche une bonne partie des musulmans d'Europe, n'épargne pas ceux de Marseille. Dans la ville phocéenne, la population musulmane serait victime de discrimination de plusieurs sortes, estiment deux chercheurs qui viennent de publier leur étude. Une étude «qualitative» dont la méthodologie fait l'objet de critiques venant de la presse locale. Marseille, la cosmopolite à forte concentration musulmane, n'échapperait pas à la discrimination dont se plaignent bon nombre de musulmans dans la plupart des villes européennes. Telle est en somme l'une des principales conclusions de l'étude «Les Marseillais Musulmans», qui vient d'être publiée la semaine dernière. Elle porte la signature de Françoise Lorcerie et Vincent Geisser, tous deux chercheurs au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) d'Aix-en-Provence. L'étude de plus de 315 pages révèle des détails assez troublants, qui ferait de cette cité de quelques 200 000 musulmans, une ville «divisée et xénophobe». L'Islam ne serait «pas respecté» à l'hôpital et les musulmans sont victimes d'une «méfiance croissante» de la part des soignants. Les chercheurs ont également constaté une «hiérarchisation socio-ethnique» en matière de logements sociaux. Ils parlent d'une «logique de sécurisation des quartiers populaires à forte concentration d'immigrés». Les politiciens et les médias continuent pour leur part de se distinguer par leur «discours stéréotypé stigmatisant et sécuritaire» alors que les policiers, bien que «moins racistes» sont accusés de «pratiques coloniales». Conséquence : seuls 55 % des musulmans interrogés ont indiqué avoir un sentiment d'appartenance à cette grande ville méditerranéenne de la France, contre 70% pour les non-musulmans. Ces derniers, ainsi que les premiers ont communément admis que les arabes (65 %), les noirs (55 %) et les musulmans (38 %) étaient victimes de préjugés raciaux. La presse moins convaincue Ce constat fait dire à Nazia Hussain, directrice du programme «Chez nous en Europe» de l'Open Society Foundations (financé par le milliardaire américain George Soros) que «la ville de Marseille est souvent considérée comme l'une des plus cosmopolites d'Europe. Cependant, elle peine toujours à reconnaître la diversité des identités de ses citoyens musulmans». Ces résultats, relayés par divers blogs et forums sur la toile, n'a pas laissé une certaine presse indifférente, notamment la presse locale. Le quotidien régional «La Provence», qui n'a visiblement pas apprécié que les deux chercheurs se soient juste basés sur un «mini-sondage», parle d'une «très étrange étude d'un milliardaire sur les musulmans de Marseille». Les 100 musulmans et 100 autres non-musulmans qui ont rempli le questionnaire des deux chercheurs, complété par six «focus» (groupes de discussions) et des «entretiens avec des autorités locales» ne suffisent pas, aux yeux du quotidien, pour parler de discrimination à Marseille. «La Provence» crache sur ce sondage qui, à l'instar de tout autre sondage, se base toujours sur un échantillon représentatif.