Pour le pouvoir algérien, la question du Sahara occidental est centrale malgré les dénégations. En témoigne des extraits du livre de Bernard Bajolet, ancien ambassadeur français en Algérie entre 2006 à 2008. «Le soleil ne se lève plus à l'Est, mémoires d'Orient d'un ambassadeur peu diplomate», est le titre du livre écrit par Bernard Bajolet, ancien ambassadeur de la France en Algérie entre 2006 et 2008. Le site TSA en a publié d'intéressants extraits. Ce diplomate, parfaitement arabisant, a également une autre casquette : d'avril 2013 à mai 2017, il avait dirigé la Direction générale de la sécurité extérieure. Dès leur première rencontre, en décembre 2006, Abdelaziz Bouteflika pointe la proximité française avec le royaume. S'en est suivi un échange intéressant entre les deux hommes. Il résume à lui seule la centralité de la question du Sahara pour le pouvoir à Alger. Et c'est bien entendu, le président qui lance l'offensive. «'On nous a parlé de relations privilégiées avec l'Algérie, se plaignit Bouteflika. Mais en réalité, les privilèges ont été réservés au Maroc et à la Tunisie. L'Algérie, elle, n'a rien vu'. Le ton était donné», rapporte Bojolet. Paris a «toujours soutenu la position marocaine depuis l'époque du président Giscard d'Estaing», reproche le président algérien au diplomate. De Kissinger en 1975 à Bajolet en 2006, Bouteflika est resté le même Celui-ci lui explique que «la position de la France (…) ne relève pas d'un quelconque parti pris. Mais, elle peut être influencée par le sentiment que cette affaire est vitale pour le Maroc, alors qu'elle ne l'est pas pour l'Algérie». Visiblement excédé par le franc-parler de Bajolet, Bouteflika réplique sèchement : «Elle n'est pas vitale pour nous. Mais sachez qu'il n'y aura pas de lune de miel avec le Maroc, pas de Maghreb arabe tant qu'une solution équitable ne sera pas trouvée». Force est de constater que sur ce dossier, le président est toujours resté fidèle à sa ligne. Sa discussion de décembre 2006 avec Bajolet parait comme une suite de sa conversation avec un certain Henry Kissinger en décembre 1975 à Paris. Alors ministre des Affaires étrangères, Bouteflika n'avait pas hésité à demandé à son interlocuteur américain de «couper l'aide économique et l'aide militaire» au roi Hassan II afin de le contraindre à stopper la Marche verte, comme l'ont montré des documents déclassifiés par la CIA en 2006. Vaine médiation française au début des années 90 Outre cette discussion sur un ton direct avec le président Bouteflika sur la question du Sahara occidental, le livre de Bernard Bajolet révèle une médiation française. Alors qu'il était directeur-adjoint d'Afrique du nord et Moyen-Orient au Quai d'Orsay, le diplomate a rencontré, à Paris au début des années 90, des membres du Polisario en vue de « sonder leurs dispositions à envisager un compromis ». Une tentative qui n'a pas abouti. Il révèle qu'en novembre 2006, un mois avant son départ à Alger, Jacques Chirac lui confia qu' « on était près d'un accord. Mais les Marocains ont tout fait capoté », souligne-t-il.