Des documents déclassifiés par l'Agence centrale américaine de renseignement (CIA) révèlent, en effet, que les dirigeants algériens n'ont pas toujours été les inconditionnels radicaux du principe de l'autodétermination auquel ils semblent aujourd'hui s'accrocher comme à une bouée de sauvetage. En effet, les dirigeants algériens, selon un document de la CIA datant du 23 février 1985, ont effectivement proposé au Maroc une solution de compromis au conflit du "Sahara occidental" à travers justement le principe de l'autonomie qu'Alger décrie aujourd'hui comme une solution attentatoire au droit des peuples à disposer d'eux mêmes. Quelles que soient les motivations derrière cette proposition algérienne, consignée dans les archives nationales des Etats-Unis, cette révélation démontre que les dirigeants algériens excellent dans le "contre-pied" diplomatique dans le seul but inavoué de perpétuer une situation de ni guerre, ni paix qu'ils croient être bénéfique aux intérêts stratégiques d'une classe dirigeante maternée dans la défunte école de la guerre froide, et qui encore, dans sa cécité politique et son manque de bon sens historique et de discernement des dividendes de l'avenir en commun, refuse toujours d'admettre que le mur de Berlin est tombé et que les aspirations des peuples de la région survivront aux petits calculs et à la cupidité d'une caste dirigeante. Ministre des AE, Bouteflika pratiquait déjà la diplomatie-fiction D'autres documents déclassifiés par le Conseil national de sécurité US révèlent le contenu des entretiens qu'avait eus Abdelaziz Bouteflika avec l'ancien Secrétaire d'Etat, Dr Henry Kissinger, le 17 décembre 1975, à la résidence de l'ambassadeur des Etats-Unis à Paris. Lors de cette rencontre, fort édifiante, l'"enfant terrible" de la diplomatie algérienne essayait de ramener son interlocuteur vers une solution d'autodétermination au Sahara en s'aventurant à comparer la situation à celle qui prévaut dans les territoires palestiniens occupés. Proposition qui n'a pas manqué de sidérer le professeur des relations internationales qui, selon ses propres termes, ne comprenait pas ce "que veut dire l'autodétermination pour le Sahara", en concédant toutefois que, s'agissant des Palestiniens, il pouvait comprendre un tel principe. Génocide ! Quel génocide ? Constatant que le chef de la diplomatie américaine ne voulait pas se départir de la position de neutralité qui était celle de son administration, le jeune ministre algérien des Affaires étrangères s'entêtait tant bien que mal à plaider en faveur d'un référendum en insistant sur les garanties nécessaires qui doivent être assurées avant la tenue d'un tel scrutin. Voyant que son interlocuteur tardait à mordre à son hameçon, il a même sorti de son chapeau la menace d'un "génocide" qui pouvait intervenir dans la région. Encore une fois, le pionnier de la politique de détente avec l'Empire soviétique n'a pas pu s'empêcher de montrer sa moue sceptique face à cette dernière assertion-fiction, exposée avec une sincérité déroutante. Après avoir bien voulu distribuer un satisfecit aux Etats-Unis pour leur neutralité vis-à-vis de la Marche Verte, le jeune ministre algérien s'est par la suite engagé dans une attaque en règle contre la France et les présidents Bourguiba et Senghor, ou encore l'ancien chef d'Etat du Gabon, Omar Bongo. Tous ont été accusés de manque de "finesse" et de "recherche" (sic !), parce que, selon lui, les Algériens se sont sentis blessés par cette posture "anti-algérienne". Comme si la question du Sahara constituait un souci quotidien de l'Algérien ordinaire... Ces documents déclassifiés renseignent sur les véritables intentions d'Alger s'agissant du conflit du Sahara, avec un principe cardinal qui guide leur démarche depuis le début : s'opposer systématiquement à la position du Maroc, quelle qu'elle soit. Et le Polisario dans tout cela ? Les documents démontrent que l'ancien chef de la diplomatie algérienne n'a pas mentionné une seule fois le Polisario. Il n'allait évidemment pas s'embarrasser de la position des séparatistes qui est de toute façon dictée à partir d'Alger. Une vérité qui ne trompe personne, car la marche de l'histoire, comme d'ailleurs la Marche Verte sont irréversibles.