C'est à l'âge de 43 ans, plus de dix ans après son divorce, que Rachida Yakoubi a pris la décision de revivre par l'écrit l'expérience douloureuse de son divorce. Son livre, «Ma vie, mon cri» se veut un rayon de lumière pour toutes ces femmes qui vivent la même situation. Comme son nom l'indique, ce témoignage de Rachida Yakoubi se veut un cri. Cri de détresse et de colère. Un cri étouffé à l'intérieur de l'être. Un cri de honte. C'est le cri de rage face à l'injustice sociale. C'est un cri qui prend la forme d'un signe identitaire relatif à l'appartenance de Yakoubi à une société où la femme se cherche toujours et ne réussit pas vraiment à se fixer des repères solides. C'est un cri, sans doute, qui se veut un signe de vie, un besoin de transmettre en mots tous ces sentiments chagrinés qui font vibrer ce texte. Un témoignage chagriné Le texte de Rachida Yakoubi se refuse à être un ouvrage littéraire. C'est un témoignage exprimant une voix féminine et solitaire. Il retrace le parcours d'une femme divorcée, condamnée à l'exclusion, tout en étant armée d'une bravoure exceptionnelle lui permettant de retrouver la paix. Ce livre s'impose. Il s'indigne. Il dérange. Incontestablement, parce qu'il accuse. Il accuse l'entourage de Yakoubi. Ces amis qui l'évitent et lui ferment leur porte. Ces hommes qui ne voient plus en elle qu'un objet de désir. Cette justice qui se montre injuste. Et surtout, ces femmes mariées qui la traitent avec mépris. Une victoire bien méritée Mais ce qui fait l'originalité de l'expérience de Yakoubi, c'est qu'elle refuse malgré tout de baisser les bras. Après avoir vécu cette mauvaise épreuve de femme divorcée au sein d'une société qui se montre très réservée face à de telles situations, Yakoubi a décidé de prendre la plume pour relater son histoire, en vue d'expliquer comment elle a réussi à vaincre le mal. Quand elle utilise le «je» pour relater son histoire et témoigner sa détresse ou sa lutte, elle n'écrit pas pour elle seule mais aussi pour parler aux autres femmes. Il s'agit de créer un nouveau mode d'expression qui met en scène le plus profond du «je» individuel tout en étant représentatif de la femme en général. Yakoubi cherche à dire à ses lectrices que l'on peut atteindre la rive malgré les naufrages, et sans sombrer dans la débauche. Ecrire est pour Yakoubi plus qu'une issue, une mission ; c'est un enseignement pour ses consœurs. Guérir par l'écriture Toutefois l'acte d'écrire, chez Rachida Yakoubi, est à prendre et à lire aussi comme un dépassement de cette peine antérieure située dans le passé, appartenant aux retours rétrospectifs et ouvrant au «je» différents jeux pour guérir ses blessures. Loin d'être uniquement une écriture de l'intime, ce témoignage de Yakoubi est aussi une écriture thérapeutique. L'acte d'écrire permet à Yakoubi de reproduire ses maux par des mots dans l'espoir de les remédier et de chasser sa névrose. «Ma vie, mon cri», Rachida Yakoubi, Editions Paris-Méditerranée (2003), 262 pages