Seif Kousmate, photojournaliste franco-marocain, est arrivé samedi dernier à Casablanca. Détenu pendant trois jours à Nouakchott, il a été expulsé alors qu'il effectuait une enquête sur l'esclavage en Mauritanie. Le reporter a été interpellé le 20 mars «à la frontière avec le Sénégal d'où il devait prendre un vol retour pour le Maroc», a rapporté mardi Reporters sans frontières (RSF). Transféré à Nouakchott, il a été placé en détention, son téléphone et son ordinateur lui ayant été confisqués. Des cartes numériques contenant des photos de reportage ont notamment été saisies, mais le journaliste dit avoir «suffisamment d'éléments» pour publier son reportage. Selon RSF, la police a interrogé Seif Kousmate sur ses liens avec Biram Dah Abeid, ex-candidat à la présidentielle et fervent anti-esclavagiste. «Le photojournaliste a décidé d'entamer une grève de la faim, avant d'être finalement expulsé le 24 mars», ajoute la même source. Contacté par RSF, Seif précise que les autorités l'ont d'abord «soupçonné de terrorisme, puis d'activisme pour la cause des descendants d'esclaves». En Mauritanie, l'esclavage a été aboli en 1981. Même si une nouvelle loi rehausse la peine pour ce crime de 10 à 20 ans depuis 2015, près de 43 000 personnes (soit 1% de la population) en sont encore victimes, selon un rapport d'Amnesty International cité par RSF. «C'est la deuxième fois en un an qu'un reporter enquêtant sur ce thème se fait expulser, rappelle de son côté Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique de RSF. La Mauritanie ne mettra pas fin à la pratique illégale de l'esclavage en empêchant les journalistes de s'y intéresser.»