Les Marocains résidant à l'étranger, pourtant une clientèle d'habitués, se font rares cette année chez les orfèvres de Casablanca. Et pour cause : si le choix est toujours très large et le travail de qualité, les prix atteignent un sommet cet été, au Maroc comme ailleurs. L'engouement pour cette «valeur refuge» a tellement fait monter les prix que certains MRE préfèrent même vendre qu'acheter. Reportage parmi les orfèvres de Bab Marrakech et de Kissariat Haffari de Casablanca. Qui dit été, dit non seulement plage, mais aussi saison de mariages, notamment pour les Marocains en séjour estival au Maroc. Et qui dit mariage, dit bijoux en or. Si vous avez attendu de rentrer au pays pour trouver chaussure à vos pieds, vous serez bien déçus, car le cours de l'or enregistre une hausse cette année. Le gramme d'or non travaillé de 14 carats coute à la date d'aujourd'hui 30,00 dollars US, soit 238,965 Dhs. Quant au gramme d'un 18 carats brut, il a atteint cet été les 38,55 dollars américain, soit 307,077 Dhs marocain. Des prix en hausse Une visite des orfèvreries de Casablanca le confirme : toutes sont désertées par les clientes. Les échoppes de Bab Marrakech n'ont rien à envier à celles de Kissariat Haffari (centre commercial sur l'avenue Mohamed VI à Casablanca). Car, une fois passé chez l'orfèvre, l'or, façonné en bijou coute plus cher. «Les Marocaines raffolent des bijoux en or, mais maintenant, dès que tu leur annonces le prix elles sursautent et te prennent carrément pour un fou, nous raconte ce bijoutier de Bab Marrakech à Casablanca, elles te laissent tout sur le comptoir et sortent. Les prix ont doublé, voire triplé cette année». Dans les bijouteries visitées, le bijou coute 376 Dhs le gramme. Et ce n'est qu'un prix de départ selon cet autre bijoutier, puisque pour certaines parures le gramme peut aller jusqu'à 413 Dhs. Contre 250 Dhs le gramme en 2010 et 170 Dhs en novembre 2009. Mesdames préfèrent l'immobilier Abdelkbir, bijoutier de Haffari, se plaint : «Depuis deux ans, on ne vend plus rien. L'année dernière, les MRE venaient vendre leurs bijoux en disant qu'elles veulent acheter des appartements. Cette année, elles veulent les meubler». En effet, avec les facilités de crédit accordées par les banques, les acheteurs préfèrent se tourner vers l'immobilier. Mme Bouchra, qui aidait sa fille à choisir une alliance nous assure que «les femmes d'aujourd'hui préfèrent investir dans l'immobilier. Un appartement, on peut le louer, mais un bijou ça meuble les tiroirs. On peut même plus les porter dehors : les vols à la tire, voire les agressions sont monnaie courante aujourd'hui». Des raisons de sécurité donc, mais pas seulement. La fille de Mme Bouchra nous confie qu'elle a également d'autres dépenses comme «aller chez l'esthéticienne, à la gym, prendre des cours de langue…etc. On n'a plus d'argent à placer dans l'or». En bref, hormis le prix du gramme qui explose, le marché de l'or souffre également d'une nouvelle génération d'épicuriens qui relèguent l'économie au deuxième rang derrière les petits plaisirs de la vie, le pouvoir d'achat en baisse et la concurrence de l'immobilier. Les orfèvres en sont touchés, leurs ventes diminuent, mais ils n'en sont pas encore menacés. «En été, il y a beaucoup d'Espagnols qui viennent acheter l'or marocain, des Français aussi» temporisent certains bijoutiers de Bab Marrakech.