Le second procès des 24 Sahraouis de Gdim Izik a été équitable, selon le rapport du CNDH rendu public hier. Si le procureur et les avocats des familles des victimes ont pu apporter de nouveaux éléments incriminants, ils n'ont cependant pas pu déterminer la responsabilité individuelle des condamnés. Le Conseil national des droits de l'homme (CNDH) a affirmé, jeudi 2 novembre, que le second procès des prévenus de Gdim Izik, qui a duré près de 8 mois à partir du 26 novembre 2016, était, cette fois, équitable. Pour le Conseil, qui faisait partie des organismes à avoir demandé le renvoi du procès au civil après un premier procès au tribunal militaire en 2013, ce second procès a été conforme aux normes d'un procès équitable défini par l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques : la présomption d'innocence, l'information de motifs de son accusation, le temps nécessaire à la préparation de la défense, un jugement sans retard excessif, le droit à se défendre, à faire interroger les témoins à charge et à faire comparaître les témoins à décharge dans la même condition que les témoins à charge, le droit à un interprète et à ne pas être forcé de témoigner contre soi-même ont été garantis. «La nature de la juridiction civile, la publicité de l'audience, la traduction, la garantie de temps suffisant aux différentes parties pour exposer leurs points de vue» ont assuré les conditions nécessaires au déroulement d'un procès équitable, explique le rapport du CNDH, rendu public. Ce dernier, en effet, ne considère pas la pertinence ou la justesse du verdict mais seulement l'administration du procès, de son bon déroulement selon les règles de droit. Ainsi, «pour 55% du temps des audiences - 31 au total - la parole a été donnée à la défense. Toutes les parties ont pu présenter leur point de vue librement, les allégations de torture ont été étudiées par des médecins», insiste Driss El Yazami, président du CNDH. Lors du premier procès, les associations des droits de l'homme avaient en effet déjà accusé le tribunal militaire d'avoir fondé son verdict uniquement sur les aveux des prévenus, lesquels assuraient les avoir signés sous la torture. De fait, «la cour de cassation avait cassé le jugement en première instance au motif que le verdict n'était pas suffisamment motivé et parce que les accusations n'étaient assez individualisées», rappelle Abderrazak El Hanouchi, directeur de cabinet du président du CNDH. Finalement, les enquêtes sur les allégations de torture n'ont pas pu déterminer qu'il y avait eu ou non des actes de torture. L'ONG internationale Human Rights Watch (HRW) a constaté que tous les rapports médicaux se terminaient tous par la même phrase : «Les symptômes qu'il (le détenu, ndlr) présente actuellement et les éléments que nous avons constatés au cours de l'examen ne sont pas spécifiques aux méthodes précises de torture dénoncées.» «Difficile d'établir certains détails» Les aveux sont donc restés recevables auprès de la cour d'appel, mais, cette fois, le verdict ne s'est pas uniquement basé sur eux. Le CNDH a constaté «qu'un effort a été fait pour motiver le jugement. Beaucoup d'éléments, de pièces à convictions nouvelles ont été apportées au procès : un ordinateur, des enregistrements téléphoniques, un enregistrement vidéo des évènements… En cela, le procureur a voulu répondre au manque de motivation du jugement relevé par la cour de cassation», explique le chef de cabinet. A propos de l'individualisation de peine - qui distingue les charges requises en fonction des actes de chaque prévenu -, «le parquet a mis en exergue le rôle de chaque prévenu et présenté un schéma montrant le rang de chaque accusé et les missions qui lui auraient été dévolues dans le cadre de l'organisation qui a supervisé l'incitation aux crimes perpétrés, leur préparation et leur exécution», indique le rapport du CNDH. Sur cette base, 6 accusés sur 24 ont vu leur peine réduite et deux d'entre eux ont ainsi pu retrouver leur liberté puisqu'ils avaient déjà purgé leur peine. Le procureur n'a cependant pas pu déterminer qui avait tué qui, mais s'est fondé sur le concept de «crime de foule» pour établir la responsabilité des prévenus. «Les crimes ont eu lieu dans un camp. La scène du crime a cette particularité d'être particulièrement dense», rappelle Abderrazak El Hannouchi, si bien que «cela rend difficile le fait d'établir certains détails», ajoute Mustapha Hanaoui. Aziz Daki, le procureur, a en effet répondu aux plaidoiries de la défense, lors de la dernière audience du procès, en s'appuyant sur la jurisprudence de la cour de cassation qui affirme que les juridictions de fond ne sont pas tenues de préciser l'acte matériel commis par chacun des accusés en cas d'auteurs multiples d'homicides. Aujourd'hui, l'affaire n'a pas atteint son terme puisque tant la partie civile que les prévenus se sont pourvus en cassation pour la seconde fois.