En avril 1979, Juan Carlos était disposé à céder Melilla au Maroc et de confier Ceuta à la tutelle internationale. Cette disposition a fait l'objet d'un câble de l'ambassade américain, résumant une discussion entre le roi et un envoyé de Jimmy Carter. Charles Powell, l'historien et actuel directeur de l'Institut Elcano, a présenté, hier à Madrid, son livre «Roi de la démocratie» en hommage à la contribution de Juan Carlos I dans la consolidation de la démocratie en Espagne. Le Maroc est évoqué dans l'œuvre, indique l'agence Europa Press. Son auteur assure que l'ex-monarque était prêt à céder Melilla à Hassan II en 1979. Powell affirme que Juan Carlos avait fait part de son projet, dans une conversation d'une heure et demie, au sénateur américain Edmund Muskie (Parti Démocrate, ndlr), envoyé personnel du président Jimmy Carter qui effectuait alors une tournée en Europe. L'ambassadeur Terence Todman était présent à la réunion. La discussion entre les deux hommes avait fait l'objet d'un câble de l'ambassade américaine à Madrid, ajoute la même source. Longtemps placé document confidentiel ce n'est qu'en 2014 qu'il a été déclassifié ; ce qui a permis à Powell de le consulter. Seul 10.000 Espagnols chrétiens vivent à Melilla Rapidement le Maroc est placé au cœur de la conservation. «L'affaire la plus importante entre l'Espagne et le Maroc sont les deux enclaves espagnoles», disait Juan Carlos à Muskie. «Il considère que Melila pourrait être cédée au Maroc à court terme car n'y vivent que 10.000 Espagnols» de confession chrétienne, indique le câble de la chancellerie des Etats-Unis. Il faut rappeler que nous sommes en 1979, la vague de naturalisation des Marocains de Melilla et de Ceuta n'a pas encore été lancée. Elle ne le sera que quelques années plus tard, sous le premier mandat de Felipe Gonzalez. Juan Carlos a reconnu à ses interlocuteurs américains que la rétrocession de Melilla pourrait déplaire à l'armée de son pays. Il n'a pas écarté l'option d'une «protestation». Cependant, il s'est montré confiant que le «malaise» de ses généraux «durera seulement deux mois», assurant à l'envoyé de Jimmy Carter sa capacité à «contrôler la situation». Juan Carlos craignait une autre Marche verte vers Melilla et Ceuta Juan Carlos avait préparé un autre projet pour Ceuta. Du moment qu'en 1979, 60.000 Espagnols y résidaient sa rétrocession au Maroc serait plus compliquée, expliquait-il. «Peut-être le meilleur moyen» serait de lui conférer un statut international, pareil à celui qui prévalait à Tanger de 1923 à 1956. La disposition de Juan Carlos à se débarrasser de Melilla à confier Ceuta à la tutelle internationale obéissait à des considérations de politique interne. Le câble de l'ambassade révèle la principale crainte du souverain espagnol : «En l'absence d'une solution, le roi craignait la possibilité d'une autre Marche verte. Ce qui aurait créé de sérieux problèmes.» La discussion entre le monarque et Edmund Muskie remonte au 30 avril 1979, soit plus de trois années après le lancement de la Marche verte à destination du Sahara occidental.