La Grande-Bretagne a donné, sans même le vouloir, une leçon au Maroc sur le meilleur moyen de défendre ses intérêts face aux Espagnols et à l'Union européenne. Les réactions en cascade de Londres sur l'avenir de Gibraltar pourraient inciter Rabat à emprunter la même voie, d'autant qu'elle fait face aux mêmes adversaires sur la question des conséquences du verdict du 21 décembre 2016 la CJUE sur l'accord agricole de 2012. Après la présentation de la feuille de route devant mener au divorce entre Londres et l'Union européenne, l'avenir de Gibraltar est de nouveau au cœur d'une vive polémique entre l'Espagne, la Grande-Bretagne et les Vingt-Sept. Les politiques britanniques sont vent debout contre une proposition de l'UE concédant aux autorités de Madrid un droit de véto pour qu'un accord sur le Brexit puisse s'appliquer à Gibraltar. C'est une rupture avec une certaine «neutralité» adoptée jusqu'au là par l'UE sur ce dossier. Une position qui devrait contraindre Londres à entrer dans des négociations avec Madrid autour du minuscule territoire de 6,8 km2. Au 10 Downing street, résidence et lieu de travail du Premier ministre du Royaume-Uni, l'heure est à la levée de boucliers. La cheffe du gouvernement, Theresa May a affirmé dimanche que son pays n'est pas disposé à céder sa souveraineté sur le Rocher sans l'accord de la population locale. Son chef de la diplomatie est allé un peu plus loin que sa supérieure hiérarchique. «Gibraltar n'est pas à vendre (…) Gibraltar ne peut faire l'objet d'un marchandage. Gibraltar ne sera soldé», a martelé Borris Johnson dans une interview accordée au Sunday Telegraph. Une leçon pour le Maroc Même son de cloche auprès du ministre de la Défense. Michael Fallon a indiqué à la presse britannique que Londres «protégerait et défendrait la population de Gibraltar jusqu'au bout» tant qu'elle souhaite rester sous le giron de la couronne. Un membre influent au Parti conservateur a même brandi le recours aux armes. Et de rappeler le souvenir de la guerre des Malouines ayant opposé, du 2 avril au 14 juin 1982, la Grande-Bretagne contre l'Argentine, un autre pays hispanophone. Face à ces réactions en cascade, le chef de la diplomatie espagnole n'a pas souhaité monté sur l'arbre de la polémique. Ce matin à Madrid, à l'occasion d'un forum, il s'est contenté de déclarer sur un ton moqueur que «le traditionnel flegme britannique a brillé par son absence». «Le gouvernement espagnol n'est pas obligé de répondre aux observations des politiques du Royaume-Uni sur ce thème particulier», a-t-il indiqué comme le rapporte le journal El Pais. La répartition des rôles entre les membres du gouvernement britannique sur la question de Gibraltar pourrait servir de leçon pour l'exécutif marocain, notamment sur la question des conséquences du verdict de la Cour de justice de l'Union européenne, du 21 décembre 2016, excluant les produits du Sahara de l'accord agricole de 2012. Comme Londres, Rabat a des cartes en main à faire valoir en vue d'amener l'Espagne et l'Union européenne à de meilleurs sentiments.