Sur fond de campagne fédérale et d'agressions contre des femmes voilées, les députés québécois viennent d'adopter à l'unanimité une motion condamnant l'islamophobie. Malgré cette adoption d'une seule voix, le débat sur le port du niqab s'éternise. Le texte vient peut être à point nommé pour le stopper. La montée de l'islamophobie avait fait l'objet d'un texte parlementaire au Québec. A l'initiative de la députée Françoise David du parti Québec solidaire, les députés québécois ont adopté à l'unanimité, une motion visant à condamner l'islamophobie, les appels à la haine et à la violence envers les Québécois de confession musulmane, rapporte Radio Canada. Cette motion est motivée, selon sa dépositaire, par la multiplication des actes et propos racistes sur les réseaux sociaux mais aussi par le débat sur le niqab exploité par les partis à des fins électoralistes. «Ce dont on s'est rendu compte, c'est qu'un certain nombre de gens mêlent tout : djihad, niqab, islam, radicalisation. Tout est mêlé, alors qu'en fait - et c'est important de le dire - l'immense majorité de nos concitoyens de confession musulmane ne veulent qu'une chose : vivre en paix au Québec, en intégrant les valeurs québécoises d'égalité entre les hommes et les femmes. Ils veulent vivre en paix et rejettent toutes ces formes de conservatisme et de radicalisme», a plaidé Françoise David en présentant sa motion. Cette députée de gauche a dû batailler vaille que vaille, malgré les réticences de certains partis politiques, pour que dans son texte le mot «islamophobie» soit maintenu. «On avait souhaité une portée plus large parce qu'en fait, lorsqu'on a fait la consultation sur la politique publique, il y a beaucoup de gens qui sont victimes d'intolérance», défend la ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, Kathleen Weil avant d'ajouter «On a tous ce rêve de bâtir une société inclusive [...] On partage tous cette fierté ici, à l'Assemblée nationale, et quand on parle d'une voix, c'est avec une voix très forte et qui dénote la cohésion qu'on a à cet égard». La ministre est soutenue dans son souhait de rendre le texte plus inclusif par les partis, certains allant même jusqu'à demander à condamner le racisme antimusulman au même titre que l'islamisme radical. Adoption de la motion contre l'islamophobie en plein débat sur le port du niqab L'adoption de la motion pourrait peut-être contribuer à atténuer le débat sur le port du niqab lors des cérémonies d'assermentation, dans lequel s'enlisent depuis quelques semaines les partis québécois avec en toile de fond une campagne fédérale. C'est normal qu'il y ait un débat sur le port ou non du niqab (...), mais qu'on en parle pendant 15 jours, que des partis politiques et particulièrement les conservateurs finissent par en faire l'enjeu électoral de tout premier plan en se posant en défenseur des femmes, là je dis stop» tempête Françoise David, qui selon des récents propos, ne supporte pas de vivre «dans un Québec intolérant». Celle qui est à l'origine de la motion votée ce jeudi par les députés québécois explique que «les incidents qui se multiplient depuis quelques semaines sont des incidents qui touchent particulièrement les musulmans du Québec». Les incidents auxquels elle fait référence, se rapportent à une agression d'une femme voilée. Selon le Journal de Montréal citant un quotidien local, mardi dernier à Anjou, deux adolescents ont fait chuter une femme enceinte en lui arrachant son hijab. Une attitude que le mari de la victime a présentée comme un acte islamophobe. Ce qui n'a pas manqué de raviver les oppositions autour du débat partisan sur le niqab. Du côté de l'Association des musulmans et des Arabes pour la laïcité au Québec (AMAL), le porte-parole Haroun Bouazzi qui s'est dit «inquiet» pour la sécurité des femmes musulmanes, se serait bien passé de la vaine prolongation de ce débat qui dure 2 semaines. «On est tannés que des choses aussi marginales que le port du niqab soient instrumentalisées pour obtenir des gains politiques. Il y a clairement un malaise au Canada par rapport à une minorité religieuse». Toujours selon Haroun Bouazzi, le port du voile est motif ces dernières années de plusieurs femmes qui se sont fait insultées et agressées. «Nous avons déjà vu des victimes, mais là, l'intensité est grande. Il y a un réel problème dans notre société de haine envers les musulmans et ça prend de l'ampleur» concède-t-il. Une ampleur qui pourrait se réduire avec l'adoption de cette motion condamnant l'islamophobie.