Samedi 14 septembre, des milliers de personnes, en majorité musulmanes, ont battu le pavé à Montréal pour manifester contre le projet de «Charte des valeurs» du gouvernement du Parti québécois. Plusieurs voix se sont élevées contre cette charte jugée «discriminatoire», notamment le chef du Parti libéral québécois qui se dit «prêt à se faire passer sur le corps» avant son adoption qui risque de ne pas être un long fleuve tranquille pour le Parti québécois. Explications. La «Charte des valeurs» au Québec reçoit son lot de critiques au fur et à mesure de l'approche de son adoption. Pas plus tard que samedi, des milliers de personnes, majoritairement musulmanes, se sont mobilisées dans le centre-ville de Montréal pour donner un coup de frein à l'adoption de cette charte initiée par le gouvernement du Parti québécois, rapporte la presse canadienne. La manifestation était organisée par le Collectif québécois contre l'islamophobie, dont le Montréalais d'origine marocaine, Adil Charkaoui, est le porte-parole. Ce dernier avait été interpellé en 2003 pour des liens présumés avec Al-Qaïda, avant d'être libéré six ans après. Selon la presse canadienne, aucun incident n'a été répertorié durant la manifestation qui s'est déroulée dans le calme. Les protestataires n'ont fait que critiquer «verbalement» le gouvernement de Pauline Marois. Pour les mêmes sources, diverses communautés religieuses se sont jointes à la manifestation. Même s'il est contre la charte, le Centre consultatif des relations juives et israéliennes avait, dans un communiqué publié vendredi, affirmé «ne pas avoir l'intention de participer à la manifestation», soulignant son refus d'être associé aux organisateurs «qui comprennent des intégristes religieux radicaux». Des responsables politiques s'insurgent Tout compte fait, l'adoption de la «Charte des valeurs» risque certainement de ne pas être un long fleuve tranquille pour le gouvernement Marois. Alors que des responsables politiques se lèvent un après l'autre pour s'opposer à l'initiative du Parti québécois, Philippe Couillard, chef du Parti libéral du Québec, indique qu'il faudra lui «passer sur le corps» avant de l'adopter. Selon lui, cette charte institutionnalise une «discrimination à l'emploi». Pour Couillard, le gouvernement devrait jouer la carte de la prudence sur cette question et voir les choses à long terme, dans le meilleur intérêt des Québécois. Le député de la Coalition Avenir Québec (CAQ), Gérard Deltell, pense presque de même. Il a invité le gouvernement Marois à «mettre de l'eau dans son vin» et «limiter l'interdiction du port de signes religieux au personnel de l'état en position d'autorité». «Nous ne nous soucions pas de ce vous avez sur la tête. Ce qui nous importe est ce qu'il y a dedans», avait ironiquement lancé Lakeridge Health Oshawa, un hôpital se trouvant en Ontario en réponse à la «Charte des valeurs». «Mon voile couvre mes cheveux, pas mes compétences.», s'est également révolté Adil Charkaoui. Une femme insultée en pleine rue pour son voile Un nouvel incident a été révélé par les médias canadiens. Une femme musulmane aurait été invectivée, le 31 août dernier, à la sortie d'un supermarché en raison de son voile. Elle aurait été apostrophée par une étrangère qui lui aurait lancé: «il vaudrait mieux pour toi de changer de religion». Son fils est alors intervenu mais la passante lui aurait craché au visage et l'aurait frappé avec son sac. Selon son mari, Aldelmalik Mansouri, c'est la première fois qu'une situation pareille leur arrive en 14 ans de résidence au Canada. Une plainte a été déposée auprès de la police et une enquête a été diligentée. Selon plusieurs sources canadiennes, une autre jeune femme musulmane a indiqué récemment qu'elle avait été congédiée d'un restaurant de Québec, pour la même raison. Au lendemain de cet incident islamophobe, du sang de porc a été versé sur la façade de la mosquée de Saguenay et une lettre avait été laissée sur place par les profanateurs. «Laissez vos hijab, niqab, burqa, charia, oubliez vos revendications primitives, cessez de vous sentir en permanence humiliés et intégrez-vous ou rentrez chez vous», pouvait-on lire sur la note. Quoi qu'il en soit, le Conseil musulman de Montréal a déjà pris ses devants quant à la «Charte des valeurs» au Québec. L'organisation se dit prête à saisir les tribunaux en cas d'adoption de cette charte et la stratégie judiciaire à employer serait gestation.