Eric Laurent muscle sa controffensive médiatique. Après son avocat, il est apparu lui même dans l'émission C à vous de France 5. Usant d'un ton ferme, le journaliste a même annoncé avoir en sa possession des «documents». L'évolution de son discours de plus en plus «radical» le fait passer de «sauveur du royaume» à la posture de «victime». Décryptage. Ecric Laurent a une nouvelle fois agité l'épouvantail de ses «révélations fracassantes». Acculé par les différentes révélations, le journaliste est monté au créneau pour affirmer hier sur le plateau de l'émission C à Vous qu'il allait poursuivre l'écriture qui devrait aboutir à la publication de son livre. Au-delà de cet effet d'annonce, c'est sur la «radicalisation» du discours du journaliste de 68 ans qu'il convient de s'interroger. Hier, Eric le «sauveur du royaume»… Au lendemain de l'éclatement du scandale qui sera irrémédiablement associé à son nom, Eric Laurent s'était posé en «sauveur du royaume» contre la menace islamiste. L'auteur des Mémoires d'un roi, qui jouait du violon au temps du régime de Hassan 2, est entre temps devenu un pourfendeur du palais pour finalement tenter de sauver le régime marocain selon ses dires. Aux journalistes qui l'interrogeaient sur les motifs qui l'ont poussé à vouloir monnayer la non-publication de son livre, l'auteur du Roi prédateur en 2012, un livre à charge contre le successeur de Hassan II, expliquait que le «deal» était un arrangement gagnant-gagnant qui aurait éviter au Maroc de devenir «une république islamique». Les quelques millions auraient ainsi empêché la publication d'un livre dont le contenu supposé incendiaire aurait pu déstabiliser le royaume et précipiter la fin de la monarchie. Le journaliste pense ainsi avoir évité au royaume un scénario à la libyenne. Pourtant avant même l'annonce des éditions du Seuil de ne plus publier le livre, Eric Laurent avait soutenu mordicus que son livre allait être publié. Aujourd'hui la même rhétorique est reprise agrémentée de «documents [qui] sortiront s'il devait lui arriver quelque chose», ajoute-t-il. Il semblerait donc que la crainte de l'instauration d' «une république islamique» ne soit plus une priorité pour Eric Laurent. … Laurent la «victime», aujourd'hui De «sauveur du royaume», le journaliste-essayiste français est passé à la position de victime. Dès ses premières interviews, le journaliste a cru bon de faire le parallèle entre son arrestation et la disparition de Ben Barka. Il a raconté ainsi que lorsqu'on l'a transporté le jour de son arrestation vers le poste de police pour la garde-à-vue, il a vraiment eu peur pour sa vie pensant qu'il allait disparaître surtout quand la voiture de police à emprunter le périphérique en direction d'Orly. Le journaliste qui va jusqu'au bout de son raisonnement avait expliqué qu'il pensait qu'on le mettrait dans un avion pour l'amener au Maroc et le torturer. L'attitude d'Eric Laurent dénote une volonté de répondre, coup pour coup, aux sorties médiatiques de la partie adversaire qu'il souhaite discréditer. Dans son entretien avec l'équipe de C à vous, Eric Laurent explique qu'il fera publier son livre qui concerne la famille royale. Exprimant des craintes pour sa vie, Eric Laurent explique aussi avoir placé ses manuscrits dans 3 endroits différents au cas où il lui arrivait un accident. «Tous les documents sortiront», clame-t-il haut et fort. Des menaces à peine voilées contre le Royaume qui pourrait user selon le journaliste des méthodes dignes des années de plomb. C'est pourtant le Royaume qui a joué la carte de la transparence en saisissant d'une plainte le parquet de Paris, dès le premier rendez-vous. Chronologie des faits 23 juillet 2015 : Eric Laurent qui prépare un livre à charge contre la famille royale, contacte depuis Paris le secrétariat du Palais royal pour demander un rendez-vous avec Mounir Majidi. La secrétaire prend le message suivant : "Merci à Monsieur Majidi de me rappeler, j'ai des éléments d'une extrême gravité à lui communiquer". Mounir Majidi lui envoie comme émissaire l'avocat Hicham Naciri avec lequel Eric Laurent échange quelques sms avant de convenir d'un premier rendez-vous. 11 août 2015 : Eric Laurent rencontre au bar du Royal Manceau Hicham Naciri qui enregistre la conversation au moyen de son téléphone portable. Il est question du Japon d'où l'avocat du palais revient de vacances. C'est au cours de ce premier entretien que la somme de 3 millions d'euros est évoqué pour la non-publication du livre à charge. L'Etat marocain porte plainte pour chantage et extorsion de fonds au parquet de Paris. 21 août 2015 : L'avocat marocain et le journaliste français se revoient pour un second rendez-vous, cette fois-ci sous surveillance policière. Eric Laurent explique que Catherine Graciet est au courant de la négociation. Une information judiciaire est ouverte et placée sous la supervision de 3 juges d'instruction. 27 Août 2015 : Eric Laurent et Catherine Graciet rencontre Hicham Naciri au restaurant de l'hôtel Raphaël dans le 16ème arrondissement de Paris. Les deux journalistes sont filmés et photographiés par la police à leur arrivée, leur conversation est aussi sous écoute. Après renégociation du montant (2 millions au lieu de 3), Catherine Graciet aurait rédigé en 3 exemplaires un manuscrit de renonciation à la publication du livre. L'avocat leur remet une enveloppe de 40.000 euros chacun en billets répertoriés. Les journalistes signent, prennent l'argent et sortent du restaurant parisien où ils sont arrêtés et placés en garde-à-vue avant d'être mis en examen pour "chantage et tentative extorsion de fonds" sur la personne du roi.